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18/10/2010

femme de président






Madame Carla Bruni-Sarkozy est assurément une bien agréable personne. Comme nous le montrait un récent documentaire sur France 3, elle est toujours gracieuse avec son personnel, elle aime les animaux et sait à merveille réconforter son auguste époux entre deux réunions de travail. Quand elle n’accompagne pas son mari dans des missions diplomatiques ou qu’elle ne répète pas ses chansons dans son studio d’enregistrement personnel, elle s’occupe aussi des déshérités de ce monde, enfants africains touchés par le SIDA ou SDF en bout de course dans Paris. A l’instar de la défunte princesse Diana, elle ne craint pas, elle aussi, d’aller dans les hôpitaux ou de se mêler humblement aux sauveteurs municipaux, presque méconnaissable dans leur tenue réglementaire. Bref, elle accomplit à la perfection toutes les fonctions d’une reine et l’auteur de ces lignes ne doute pas  un instant de la sincérité de ses engagements. N’est-ce pas, au fond, simplement humain que de vouloir éponger sa part de misère quand, comme elle, on a autant reçu de la vie ?
Notez bien qu’il y a quand même des questions qui lui font perdre momentanément son ravissant sourire. Par exemple lorsqu’un journaliste ose avancer qu’elle fait ainsi de la politique. Et la première dame de France de lui rétorquer avec une exquise politesse:
« De la politique, moi ? Pas du tout ! Je trouve plutôt triste votre question. Je ne fais pas ça pour me faire élire. »
Là encore, qui oserait mettre en doute sa parole ? A quelle fonction politique pourrait-elle d’ailleurs prétendre ? Conseillère municipale à Neuilly ? Adjointe au maire, Député(e) ? Aucune autre situation ne pourrait lui donner la représentativité et l’aura dont elle jouit déjà.
Et pourtant, ne lui en déplaise, c’est le journaliste impudent qui a raison. Oui, elle fait bien de la politique, indirectement, par son action associative – ce qui est quand même la première forme de participation à la vie de la cité – ,et surtout par sa médiatisation. Comment pourrait-il en être autrement ? Comment peut-on imaginer que son charisme ne serve pas un peu le prestige de son époux, surtout quand ce charisme se met au service d’activités caritatives. A sa façon, Carla Bruni-Sarkozy semble dire au monde que la beauté n’est pas un obstacle à la bonté ; que l’on peut être riche et avoir le souci des pauvres. Soit ! Mais que ce soit au moins avec la pleine conscience que ces conditions de vie dégradantes sont aussi la conséquence d’un système politique qui subordonne les valeurs humaines aux valeurs financières. Un système qui accroît les inégalités, creuse les différences avec le sentiment serein de sa légitimité. Et qui, dans notre pays, en est le meilleur représentant ?  


Erik PANIZZA

16/09/2010

Europe : tous les chemins ramènent aux Roms









Et ce qui devait arriver est enfin arrivé. Après un été de circulaires douteuses et d’expulsions arbitraires, le gouvernement français s’est fait tancé – et en quels termes ! – par la commissaire européenne à la justice et à la citoyenneté Viviane Reding. Qualifiant de « honteuse » l’attitude de la France vis-à-vis des Roms, celle-ci a même osé un parallèle avec les déportations organisées durant la deuxième guerre mondiale ; parallèle pour lequel elle s’est diplomatiquement excusée peu après. Il n’empêche : ses propos, excessifs mais sincères, ont le mérite d’avoir été prononcés et de dénoncer un glissement anti-démocratique, tout de même inquiétant, de l’Etat Français. Pour qui a assisté, comme moi, à un rapatriement forcé de Roms, femmes et enfants trainant de lourds bagages vers un car spécialement affrété et encadrés par des policiers en armes, il est difficile de ne pas songer aux pires heures de Vichy, tellement ce spectacle faisait froid dans le dos. Certes, ils ne s’en allaient pas vers des camps d’extermination, mais vers la Roumanie et la Bulgarie avec quelques centaines d’euros en poche – presque un pactole.  Beaucoup, néanmoins, n’ont pas dû comprendre la sanction qui les frappait ni ce qu’on leur reprochait exactement. Après tout, ils ont toujours été marginalisés, sinon stigmatisés, où qu’ils aillent en Europe. Mais si, jusqu’à présent, un gouvernement républicain pouvait toujours expulser des individus jugés malfaisants, jamais encore il n’avait procédé à des démantèlements de campements et des renvois de masse, au motif bien léger de situation irrégulière. Jamais encore l’appartenance à une ethnie, comme celle des Roms, n’avait été aussi ouvertement pointée comme indésirable sur le sol français. Outre que ces mesures nient leur droit de libre-circulation à l’intérieur du territoire européen, elles s’opposent, par leur caractère discriminatoire, aux fondements mêmes de la fédération européenne qui s’est construite, rappelons-le, sur le rejet absolu des vieux démons xénophobes. Peut-être est-ce un effet de la politique de rupture prônée, voici trois ans, par le candidat Sarkozy ? On en voit ici les fruits amers, elle qui mène la France au tableau du déshonneur européen (même si Sarkozy peut compter sur le soutien de l’inénarrable Silvio Berlusconi). A moins que ce ne soit une énième manœuvre électoraliste et, dans ce cas, qu’importe les critiques ! Car l’intérêt européen comptera toujours  moins que la conservation du pouvoir personnel. Comme disait un certain Goebbels : « Charbonnier est maître chez soi. »


Bruno DA CAPO

16:34 Publié dans numéro 6 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roms, reding, vichy, expulsions

09/09/2010

Le marché halal





En annonçant l’ouverture, voici deux semaines, de 14 nouveaux restaurants halal, Quick – l’un des leaders de la restauration rapide – a jeté un pavé dans la mare de tous ceux, laïcards militants ou nationalistes xénophobes, qu’inquiète la visibilité de l’Islam en France. Ainsi, les Français (qui ne sont pas musulmans) seraient exclus de ces restaurants du deuxième type ou devraient manger des steaks hachés provenant de bêtes abattues selon le rite islamique. Quid de la neutralité républicaine en matière de cultes ?  Au-delà de l’effet d’annonce, il n’y avait pas de quoi décréter l’état de siège. D’abord, malgré cette progression de la restauration « orientée », Quick ne s’est pas islamisé pour autant : il n’y jamais que 22 restaurants halal sur les 362 que compte la marque sur notre territoire. Ensuite, personne n’est obligé de manger halal (ou cacher, ou macrobiotique) et ceux qui le feraient par accident ne risquent pas plus d’ennuis de santé que dans un quelconque fast-food. D’autre part, l’appel de Quick vers la communauté musulmane ne viole pas les règles fondamentales de notre laïcité – à moins que Quick ne soit financé par l’Etat français, ce qui n’est pas le cas à ma connaissance. Le débat se situe manifestement ailleurs, au niveau de l’imaginaire social en particulier. Il faudra bien admettre que la réalité humaine de la France actuelle n’est plus homogène – mais l’a-t-elle jamais été ? -, qu’elle rassemble des millions d’individus de différentes origines et qui cherchent naturellement à se regrouper selon des critères d’appartenance. Dans cette mosaïque communautaire, l’Islam émerge singulièrement avec près de 5 millions de pratiquants. Du point de vue économique, cela représente un marché en pleine expansion de  5,5 milliards d’euros par an (soit 15% de croissance annuelle). Pas besoin de pressions pour que l’ensemble de la chaîne alimentaire lui fasse les yeux doux. Le fond de l’affaire Quick – on pourrait trouver  sans peine d’autres exemples - n’est que la rentabilité à court et à moyen termes, sans aucune autre forme d’engagement ni de souci éthique. Et c’est encore ce qui est le plus inquiétant.


Erik PANIZZA

18:29 Publié dans numero 5 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : halal, islam, quick, laïcité