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10/02/2011

Les vacances de Mme Culot

Les vacances de Mme Culot
On parle beaucoup d’avions ces derniers temps. Celui qu’a pris en hâte Ben Ali, celui qu’Hosni le Sphinx a refusé de prendre. Celui enfin que MAM a pris hélas deux fois en Tunisie pour les fêtes de Noël et qu’à l’instar de Moubarak elle eût été bien inspirée de ne pas prendre. Mais elle l’a pris et mal lui en a pris ! La Ministre des Affaires Etrangères ne peut voler avec n’importe qui, même en période de vacances, d’autant quand c’est dans un pays mené par un tyran et que le jet privé où elle accepte de monter appartient bel et bien à un ancien soutien de ce tyran. En mettant un pied dans le jet, c’est la politique extérieure de la France qui y entre (qui, elle, ne peut s’offrir toutes les vacances). Voilà qui, en tout cas, n’est pas à la hauteur de la diplomatie française. Si ce n’est pas une faute, ça y ressemble. Inconséquence fâcheuse, tempéreront certains. C’est pire : cela relève de l’incompétence. Après l’affaire Woerth, voici l’affaire Alliot-Marie. On a accusé le premier d’avoir montré trop de candeur dans sa défense. On a dû rappeler des pros dans le nouveau gouvernement, dont MAM. Plongés dans la tempête, Woerth, MAM, Juppé hier, restent les mêmes. On pense à cette noblesse sous l’Ancien Régime scandalisée d’être surprise les doigts dégoulinant de confiture. Pourtant, cette péripétie est loin d’être anodine. Elle montre comment fonctionnent nos dirigeants. Et l’on voit là combien légers, déconnectés ils sont. Combien ils en oublient leur dignité, habitués qu’ils sont à vivre de passe-droits. Arcboutés sur ce qu’il faut nommer leurs privilèges, ils suffoquent presque d’étonnement quand on dénonce leurs dérives. En voyant Mam à la télé, on voyait bien qu’elle pédalait dans le couscous. Elle se montrait sonnée d’être contrainte de s’expliquer, piquée au vif, comme si le dard de la démocratie l’avait piquée ! Une démission s’imposerait après autant de bourdes, mais rien ne dit qu’elle la présentera. Elle peut tout aussi bien se maintenir grâce à la volonté du prince ou grâce à celle du Premier Ministre, lui-même grand voyageur.

                                            Yves CARCHON

12:38 Publié dans numéro 20 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mam, jet, privilèges

07/02/2011

Les plaies d’Egypte


Dans un dernier billet à propos de l’Egypte, je parlais d’un hypothétique bain de sang si Moubarak restait au pouvoir. On y est. Neuf jours ont passé et le raïs, comme l’arapède sur son rocher, s’agrippe au pouvoir. Il veut mourir en terre d’Egypte, autrement dit il ne quittera pas Le Caire et son pouvoir. Du coup, les pro-Moubarak ont envahi aussi la rue. Les dernières images qui nous sont parvenues (images qui risquent de devenir plus rares, voire nulles si on s’en prend aux journalistes)  nous montrent que c’est d’une guerre civile dont il s’agit. Moubarak a tenté de reprendre la main, y compris par la force et en usant de ses nervis, agents de la police et des services secrets infiltrés dans la foule pour brouiller la partie et retourner le peuple. Pari funeste et dangereux ! Les Américains les premiers, suivis par l’Europe dont la France, avancent la solution d’une transition qui serait assurée par le premier ministre de Moubarak. Mais l’exigence des Egyptiens dans leur grand nombre est claire : ils ne veulent plus de la clique au pouvoir, même pour une transition qui mènerait à une éventuelle démocratie. Ils savent qu’en occupant la rue aussi longtemps qu’ils le pourront, ils ont toutes les chances d’installer la démocratie et de chasser la corruption. L’ennui, c’est qu’une révolution est souvent sanguinaire, rarement de velours ou décorée d’œillets. Qu’on se souvienne de 1793 qui succéda à 1789 ou de tant d’autres révolutions. C’est presque une loi physique : quand il y a incandescence, il y a hélas destruction. La journée d’aujourd’hui est une journée cruciale : plus le temps passe, plus Moubarak risque gros dans cette affaire ; et plus l’Egypte aura de plaies qu’il lui faudra soigner.

Yves CARCHON

03/02/2011

Et pendant ce temps-là, en Côte d’Ivoire…







La Côte d’Ivoire, ça vous dit quelque chose ? En décembre dernier, on ne parlait que d’elle dans l’actualité étrangère. Un président battu – Laurent Gbagbo – qui refuse de céder le pouvoir à son rival légitimé par les urnes – Alessane Ouattara -, ça fait quand même du remous dans la communauté internationale ; c’est même un cas d’école en matière de gouvernance à l’africaine. Et les médias de s’emballer, à l’amble des exactions et des massacres perpétrés par les partisans de Gbagbo.
Mais voilà ! Une révolution chasse un coup d’état du devant de la scène. On oublie, du coup, ses passions de la veille. C’est ce qui s’est passé lorsque la colère du peuple tunisien a précipité la chute de Ben Ali à la mi-janvier. Eclipsé, le bras de fer pour le respect de la légalité en Côte d’Ivoire. Du reste, « la révolution du jasmin » est, elle-même, en passe d’être occultée par la flambée de protestations, en Egypte, contre le pouvoir absolutiste du Raïs Moubarak. Un clou en chasse un autre. Du pain bénit pour les journaux.  Mais ça finit par devenir agaçant, cette surenchère médiatique. 
Pour revenir à la Côte d’Ivoire, le malheur se porte bien, merci. Les affrontements sanglants continuent, les banques sont au bord de la faillite et Abidjan est à peu prés désertée par ses élites intellectuelles – qui prennent, après les ressortissants étrangers, le chemin de l’exil. Néanmoins, c’est le black-out dans les grands médias et seul Internet continue à assurer un peu d’information. A l’heure qu’il est, Laurent Gbagbo est à peu près lâché par tous, y compris par la communauté économique des états d’Afrique de l’Ouest. Mais il s’accroche comme une arapède à son fauteuil présidentiel. La main tendue d’Obama n’a rien fait pour l’en décoller. Dans ces conditions, ce n’est pas un poste d’enseignant dans une université américaine qu’il mérite, mais une cellule capitonnée dans la prison du Tribunal Pénal International de La Haye. Les vieux réflexes autocratiques ont la vie dure en Afrique mais c’est, là aussi, en train de changer.


                                          Erik PANIZZA