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13/12/2019

       L’héroïsme en question

                           

 

 

 Longtemps on a cru que l’héroïsme appartenait au passé, à une certaine idée de la bravoure et de la guerre que les nouveaux rapports politico-économiques avaient relégué au musée. Le héros semblait réduit à ses nombreuses représentations artistiques, quelle que soit l’époque où l’on situât ses faits d’armes. Sans remonter très loin dans l’histoire, les résistants durant l’Occupation – Jean Moulin en tête – nous avaient fourni maints exemples de ce que l’homme peut faire et supporter en des situations extrêmes. Au courage s’alliait le sens du sacrifice personnel pour une action  orientée par des valeurs d’ordre éthique (amour de la patrie et de la liberté, haine de la barbarie, souci d’autrui et des générations futures, etc…). Telle nous paraît être encore la plus juste définition de l’héroïsme. C’est dire qu’elle exclue tous ceux qui, de nos jours, tentent des records aussi périlleux qu’absurdes dans le seul but d’attirer l’attention sur eux.

Si la guerre reste la première pourvoyeuse de circonstances exceptionnelles où la vie humaine semble jouée à pile ou face, la vie civile peut aussi ouvrir des brèches dans la routine des citoyens ordinaires. Les trois hommes qui ont affronté, récemment à Londres, le terroriste au couteau afin de l’empêcher de faire de nouvelles victimes, relèvent certainement de cette deuxième catégorie de héros. Tout comme les trois jeunes américains qui, en août 2015, avaient maîtrisé un autre terroriste qui s’apprêtait à faire un carnage dans l’express Amsterdam-Paris. Le cas de l’officier de gendarmerie Arnaud Beltrame qui, en mars 2018, s’est substitué à une otage dans un supermarché de Trèbes, relève autant de l’héroïsme que du martyre – lequel suppose une acceptation de sa propre mort, sans le recours aux armes pour défendre sa vie.

Car la guerre a changé d’allure et de moyens. Elle est devenue moins protocolaire, plus souterraine et plus diffuse. Si les nations s’affrontent encore, c’est par l’intermédiaire de groupes para-militaires qui représentent leurs intérêts divergents. Ou alors elles s’opposent directement à des organisations criminelles qui ignorent toute forme de diplomatie. On est loin du schéma classique de deux armées s’affrontant sur une partie du territoire national, avec les hécatombes humaines que l’on sait. Néanmoins la guerre demeure vivace un peu partout sur la planète en ce début du XXIeme siècle. Et elle requiert toujours des soldats pour la faire – des soldats désormais engagés volontaires – sur des théâtres d’opérations souvent éloignés de leur métropole.

Le cas des treize jeunes militaires français, disparus au Mali le 25 novembre dernier dans un accident d’hélicoptère, est caractéristique de cette nouvelle donne conflictuelle. Du courage, ils en avaient certainement pour avoir accepté cette mission dans ce pays africain, face à des combattants de l’ombre. Mais leur mort, aussi bouleversante soit-elle, résulte quand même de conditions accidentelles, comme il s’en produit aussi dans la vie civile. Elle n’est pas la conséquence d’une attaque  - ou d’un guet-apens - face à des adversaires déterminés, comme ce fut le cas, en mai dernier,  pour Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello. Qu’on ne s‘y trompe pas ! Cette mort accidentelle est encore plus tragique pour un soldat qu’une mort au combat les armes à la main, car elle le prive de faire la démonstration de sa valeur militaire. Dès lors, fallait-il parler aussi vite d’héroïsme comme l’ont fait nos gouvernants et les médias qui ont relayé leur voix ? N’est-ce pas faire un usage abusif de ce mot, même pour honorer à juste titre leur mémoire ?    

Au-delà de cette exigence définitionnelle, on peut se demander à quoi visent les cérémonies officielles qui accompagnent désormais la perte de chaque soldat français dans l’exercice de sa fonction. N’y a t’il pas, en filigrane, la volonté de redonner à chacun d’entre nous la fierté d’être français ? Dans ce cas c’est une leçon de patriotisme qui nous est donnée, paradoxalement à l’heure de la construction européenne ? Mais on peut aussi y distinguer une intention plus bassement politicienne. Car, à chaque nouvelle perte humaine, il s’agit de reconquérir l’opinion publique, elle qui supporte de moins en moins bien que de jeunes français aillent mourir loin de leur pays, pour des intérêts qui ne sont pas toujours très clairs. Ainsi, à l’heure ou la guerre n’est plus – heureusement - synonyme de mort de masse, chaque disparition de soldat qu’elle entraîne, directement ou indirectement, peut apparaître comme auréolée d’héroïsme.

 

Jacques LUCCHESI 

14/11/2019

Elles voient des violeurs partout

    

 

 

Docteur, j’ai la phobie des piqûres : c’est que, certainement, j’ai été violée par un infirmier quand j’étais enfant.

Docteur, j’ai la phobie des hôpitaux: c’est sans doute parce qu’un chirurgien m’a pénétrée sur la table d’opération, quand je me suis faite enlever les amygdales.

Docteur, j’ai la phobie des écoles communales: je suis sûre qu’un instituteur a abusé de moi quand j’étais à la maternelle.

Docteur, j’ai la phobie des églises : c’est la preuve qu’un prêtre m’a poussée à lui faire des caresses perverses quand je faisais mon catéchisme.

Docteur, j’ai la phobie des garages : un garagiste a voulu me faire le plein, c’est facile à comprendre.

Docteur, j’ai la phobie des fermes agricoles: il y a certainement un paysan qui m’a prise de force dans la paille, quand j’étais en vacances avec mes parents dans les Alpes.

Docteur, je ne me souviens plus très bien de ce qui s’est passé mais je suis certaine qu’il y a une affaire de sexe derrière tout ça. Parce qu’en tout homme, c’est bien connu, il y a un violeur qui sommeille. Mais aujourd’hui, les féministes nous permettent d’affirmer haut et fort notre malaise et notre condition d’éternelles victimes des hommes.

Allez mes sœurs, profitez en et balancez tous ceux qui ne vous plaisent pas. La société n’en sera que plus purifiée comme ça.

 

Docteur, j’ai lu sur Internet que vous aussi, vous avez été violé quand vous étiez enfant. Quoi ! Les hommes aussi…C’est de la concurrence déloyale.

 

Mister SHAKE

22/10/2019

La police contre les pompiers

                         

 

 

 

  Fer de lance des institutions républicaines, la police française est un corps d’état qui ne cesse, à juste titre, d’être scruté par l’opinion publique. Ses actions reflètent, à la façon d’un baromètre, la température sociale du moment. Elles nous disent l’attitude de l’état vis-à-vis de la société civile et de ses attentes, si le curseur va dans le sens de la concorde ou, au contraire, de la division et de l’affrontement. C’est dire que la police est toujours sur le fil du rasoir et qu’elle fait rarement l’unanimité.

Autant le dire d’entrée de jeu: les lignes qui suivent ne remettent pas en question la nécessité de la police dans un pays comme la France ni ses principales missions (lutte contre la criminalité et le terrorisme, protection des personnes et des biens, etc..). Nous savons tous intuitivement que sans elle, la loi du plus fort se donnerait libre cours sans la moindre vergogne et que la vie sociale ressemblerait à l’état de nature décrit par Hobbes dans son Léviathan, c'est-à-dire la guerre de tous contre tous. Ce qui nous paraît plus problématique, c’est la notion d’ordre public que la police républicaine doit assurer sous la tutelle du pouvoir politique, avec les dérapages que l’on sait. Que deviennent les libertés publiques qu’elle est censée protéger lorsqu’elle réprime violemment des manifestants pacifiques qui veulent simplement faire entendre leurs revendications ou leur désaccord à des gouvernants qu’ils ont tout de même contribué à faire élire?

 La crise des gilets jaunes a mis en lumière la contradiction d’un  pouvoir qui ne peut supprimer le droit de manifester tout en le balisant et en le criminalisant insidieusement. Et, forts de leur droit à exercer une force légale, bien des policiers  en ont fait un usage outrancier contre des citoyens plus courageux que réellement dangereux. Car ce sont, la plupart du temps, les CRS qui sont, les premiers, passés à l’attaque, forçant les opposants à fuir ou à réagir violemment à leur tour, créant ainsi beaucoup de chaos. On ne reviendra pas ici sur leurs brutalités ni sur les nombreuses blessures causées par leurs armes prétendument non létales. Bornons nous à constater que les enquêtes diligentées à leur encontre sont encore en cours d’instruction, contrairement à celles, bouclées en un tournemain, qui touchaient les manifestants.   

Mardi 16 octobre, à Paris mais aussi dans d’autres villes françaises, c’est à des manifestants d’un autre type que les forces dites de l’ordre ont été confrontées : les pompiers. Des hommes sportifs qui ont, tout comme les policiers, la mission d’assurer la sécurité, voire la sauvegarde, de la population ; des hommes dont les adversaires ne sont pas d’autres hommes mais les intempéries et les éléments naturels, à commencer par le feu ; des hommes de différents statuts professionnels mais qui relèvent, pour certains, du Ministère de l’Intérieur – tout comme les policiers. Ces pompiers – sept à dix mille rien qu’à Paris, selon les sources – manifestaient eux aussi pour les mêmes raisons que les autres professions, y compris les policiers lorsqu’ils manifestent : manque d’effectifs, menaces sur leur retraites, relèvement de leur pouvoir d’achat, violences subies. Les charger aussi violemment que l’on charge des militants associatifs ou syndicaux était sans doute plus difficile pour les policiers en charge de ces manifestations. Cela n’a pas empêché des affrontements et des interpellations, preuve que le contexte est plus déterminant que la parenté professionnelle.

Non ce n’est pas demain la veille que l’on verra les policiers au coude à coude  - plutôt qu’au corps à corps – avec des manifestants qui leur ressemblent comme deux gouttes d’eau, unis dans un même désir de justice et de reconnaissance. Et c’est dommage car, pour une fois, ils seraient du bon côté de l’Histoire, le seul dont les peuples se souviennent au bout du compte: celui de la liberté, du progrès social et de l’émancipation collective.

 

Jacques LUCCHESI