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08/09/2017

Bruissements (76)

 

 

Lucet : l’Azerbaïdjan, vous connaissez ? C’est une petite contrée hospitalière du Caucase, coincée entre la Turquie et la Russie, où le pouvoir est détenu par un certain Ilham Aliyev, président démocratiquement élu en 2003…Celui-ci compte d’ailleurs pas mal d’ « amis » dans la classe politique française ; des « amis » généreusement subventionnés et qui sont ainsi toujours prêts à rappeler publiquement les avancées de la démocratie et des droits de l’homme dans ce pays. Mais voilà, Elise Lucet, journaliste et productrice de Cash investigation n’a pas voulu manger de ce pain-là. Dans un numéro de son émission, voici deux ans, elle est même allée à qualifier l’état Azéri de « dictature, l’un des plus féroces au monde ». Du coup, le président courroucé a porté plainte contre France 2 et la présentatrice – ce qui est en soi une hérésie juridique. « Non, mais des fois ! On ne va pas se laisser diffamer comme ça. Ce n’est pas parce qu’il y a à peine cinq cents opposants politiques dans nos prisons que notre douce république doit être considérée comme une dictature.». Hier c’était la Turquie d’Erdogan qui réclamait à l’Espagne la remise d’un opposant (rappelons qu’un reporter français, Lou Bureau, croupit toujours dans ses geôles). Aujourd’hui, c’est Ilham Aliyev qui se drape de lin blanc et de probité candide. Et demain, ce sera peut-être le sympathique Ramzan Kadyrov, président de la Tchétchénie, qui portera plainte contre une association homosexuelle accusée de répandre des horreurs sur son compte. C’est quand même inquiétant comme les dictateurs, depuis quelques années, ont pris de l’assurance vis-à-vis des démocraties, et jusqu’à leur en remontrer sur leurs principes. Heureusement qu’ici la liberté d’expression, qu’ils pourchassent maintenant hors de leurs frontières, a encore une réalité. Verdict du tribunal de Nanterre en novembre prochain.

 

Corée : nouvel essai nucléaire, en sous-sol, dimanche 3 septembre en Corée du nord. La déflagration de cette bombe à hydrogène – d’une puissance quinze fois supérieure à celle d’Hiroshima – a été ressenti en Chine et jusqu’en Russie. Kim Jong Un jubile. Qu’importe s’il passe pour un fou aux yeux des occidentaux ! Qu’importe si la communauté internationale – Chine comprise – est contre lui ou si le blocus économique va un peu plus affamer son peuple ! Lui, en bon dictateur, sait que son joujou atomique est encore sa meilleure assurance pour se cramponner au pouvoir. Une assurance sur la mort, bien sûr.

 

Macron : « Les propriétaires devraient baisser leurs loyers de cinq euros. ». Voilà le dernier vœu pieu de notre télégénique président. Je suppose que, certains jours, il doit croire à la performativité de sa parole (je parle donc je fais). Cinq euros, c’est exactement le montant de la baisse des APL voulue par son gouvernement. Ce serait une compensation parfaitement équilibrée  si nous  vivions dans une société vertueuse, où le sens du profit serait tempéré par la raison. Mais, malheureusement, les choses ne se passent pas comme ça en France. Et il faudra sans doute attendre une nouvelle loi pour que les propriétaires consentent à lâcher un peu de lest.

 

Wauquiez : Il s’est teint les cheveux en blanc pour faire plus mature. Il a vitupéré contre l’assistanat et les classes populaires accusées de ruiner la France, quitte à diviser dans son propre camp. Le plus droitiste des Républicains a néanmoins réussi à conquérir la Région Auvergne-Rhône-Alpes et, à 42 ans, il espère bien devenir le prochain président de son parti : « pour que la droite soit vraiment de droite et ne pas laisser le monopole de l’opposition à Mélenchon. ». Tous les espoirs lui sont permis car il n’y a pas de personnalité marquante face à lui. S’il est élu en décembre prochain, il pourra même proposer la vice-présidence, à Marion Maréchal Le Pen – puisqu’elle est en vacance de sa famille politique. Car, avec Wauquiez à leur tête, les Républicains n’auront plus rien pour les différencier du Front National.

 

Erik PANIZZA

01/09/2017

     Vous avez dit: réformes

                   

 

 

 Au cours de son périple en Europe de l’est, la semaine dernière, Emmanuel Macron s’est laissé aller à exprimer un jugement personnel sur le peuple qu’il préside pour cinq ans : « les Français n’aiment pas les réformes. ». Cette assertion a suscité presqu’autant de remous en France que ses remontrances sur le travail – sous-payé – des Polonais en Pologne. Elle a certainement un fond de vérité. Oui les Français, tout en attendant beaucoup de l’état, n’aiment  que rarement les réformes qu’il lui impose. Encore faut-il s’entendre sur le sens du mot « réformes ».

Longtemps, on s’en souvient, il a été associé au progressisme. Ainsi le PS se voulait un parti réformiste, par opposition avec son rejeton communiste, d’obédience révolutionnaire. Au grand chamboulement, violent et sanglant, il préférait négocier avec les forces du capital pour l’obtention de mesures propres à améliorer le vécu des classes populaires. Il était, en cela, l’allié consubstantiel des syndicats dont ce fut toujours l’objectif au sein du monde du travail. Cela a donné, en 1936, la semaine de quarante heures et les premiers congés payés, la retraite à soixante ans en 1981 et la semaine de 35 heures en 1997. Ces réformes-là étaient désirées par le plus grand nombre parce qu’elles allaient dans le sens d’une émancipation, certes relative, des individus.

Mais à présent le mot « réformes » a pris une toute autre tournure. Par une de ces dérives dont le langage est coutumier, il en est venu à signifier le contraire de son sens premier, à savoir la suppression planifiée des avantages acquis. La réforme du code du travail est significative de ce mouvement  avec, notamment, le plafonnement des indemnités prud’hômales et les accords d’entreprise primant sur les accords de branche. Valeur jusqu’ici de la gauche, les réformes – toujours au pluriel – sont entrées peu à peu dans le vocabulaire de la droite pour déterminer son action de déconstruction sociale, fut-elle présentée comme un mal nécessaire.

Force est hélas de constater que c’est aussi dans ce sens que monsieur Macron entend  le mot « réformes ». Dans ce cas, quoi de moins étonnant que les Français  y soient globalement réfractaires ? C’est que, malgré toutes les arguties dont on les abreuve, ils ne sont pas devenus masochistes au point d’aimer la main qui les fouette. Monsieur Macron devrait en tirer les conséquences logiques s’il espère voir un jour remonter sa cote de popularité.

 

Jacques LUCCHESI

22/08/2017

Bruissements (75)

 

 

Barcelone : alors que l’EI recule partout en Irak et en Syrie, voyant s’évaporer son rêve de califat, il trouve toujours de jeunes imbéciles pour faire son sale boulot en Europe. On se demande jusqu’à quand des gens à peine sortis de l’adolescence accepteront de mourir pour une vision aussi étriquée et obscurantiste du monde. Mais, après tout, c’est le propre de tous les esprits fanatisés. On a vu encore, le week-end dernier, ce que leurs convictions ont causé à Barcelone et à Cambrils. Et leur inexpérience aussi, puisque deux d’entre eux sont morts en maniant les explosifs qu’ils destinaient à la capitale de la Catalogne. Une sorte de justice immanente. C’est évidemment plus facile de prendre une voiture et de foncer sur la foule qui se promène sur les Ramblas à la fin de la journée. Beaucoup plus ignoble, aussi. Au total quinze personnes, de différentes nationalités, ont ainsi perdu la vie et une centaine d’autres ont été blessées. Quant aux terroristes, ils ont finalement tous été abattus ou arrêtés par la police. Reste que devant un tel carnage, on ne peut qu’éprouver le sentiment d’un immense gâchis. C’est d’autant plus absurde que toutes ces morts, d’un côté comme de l’autre, ne changeront rien à la marche du monde moderne.

 

Trump : mais la tactique de la voiture-bélier n’est plus le triste privilège des terroristes islamistes : elle fait aussi des émules chez des malades mentaux (comme à Sept-Sorts) et les militants d’extrême-droite, comme à Charlottesville (Virginie, USA) voici maintenant deux semaines. Cette violence émanant de suprématistes blancs avait de quoi déranger Donald Trump, puisqu’il leur doit en partie son élection à la Maison Blanche. Du coup, le président américain s’est empêtré dans des déclarations contradictoires, là où l’on attendait une ferme condamnation de ces groupuscules fascistes. Il a ainsi fâché ses soutiens républicains, tout comme Wall Street et les grands groupes industriels qui se sont un peu plus éloignés de lui. Rien à dire : Donald est nettement meilleur quand il s’agit d’en remontrer à un dictateur mégalomane comme Kim Jong Un.

 

Macron : Est-ce parce qu’il est supporteur de l’OM qu’Emmanuel Macron trouve du charme à Marseille au point de venir y passer ses vacances d’été ? Il est vrai qu’il n’est pas descendu dans un hôtel de la Canebière, mais dans une somptueuse villa du Roucas Blanc mise à sa disposition par le préfet. De là à penser que sa présence, dans les hauteurs de la ville, ferait hésiter les photographes…C’est ainsi qu’il a porté plainte contre un qui troublait son repos, avec les mesures de rétorsion qui s’ensuivent dans ce cas précis. Certes, les paparazzis exercent une activité souvent très agaçante pour qui a acquis un brin de célébrité en ce monde. Mais quand on est chef de l’état, il faut savoir faire preuve d’un peu de magnanimité vis-à-vis d’une profession qu’il n’a pas toujours détestée. Ne serait-il pas, lui aussi, en train  de devenir parano ?   

Médias : avant c’étaient les journalistes qui faisaient de leur profession un marchepied pour « entrer » en politique. Aujourd’hui, c’est plutôt le mouvement inverse avec des hommes et des femmes politiques qui, mis sur la touche, exportent leur sens de la communication vers les  télés et les radios. Cela a commencé avec l’ineffable Roselyne Bachelot sur D8 – 20 000 euros par mois pour débiter des âneries, c’est encore mieux qu’un poste de ministre – et ça a continué avec Jean-Louis Debré, Jeannette Bougrab, Daniel Cohn-Bendit et maintenant Henri Guaino. Après sa défaite aux législatives, celui fut « la plume » de Nicolas Sarkozy va pouvoir déverser son amertume sur les ondes de Sud-Radio, tous les matins pendant cinq minutes. Une sorte de thérapie radiophonique? Mais personne n’est obligé de l’écouter religieusement.

 

Suisse : cela ressemble à une (mauvaise) blague suisse. Elle démontre, si besoin était, que les préjugés raciaux ont la vie dure. Un hôtel des Alpes suisses a osé demander à ses clients juifs de prendre une douche avant d’aller piquer une tête dans la piscine. Evidemment, l’affaire s’est vite ébruitée et à provoqué des remous considérables dans l’opinion politique. L’état d’Israël a demandé des excuses officielles à la Suisse. Quant au centre Simon Wiesenthal, il  réclame la fermeture de l’hôtel et des sanctions contre sa directrice. Commentaire dépité de celle-ci : « si on avait su, on aurait exigé la douche pour tous les clients. » C’est ce qu’on appelle en rajouter une couche. Et la sienne est déjà bien épaisse.

 

Erik PANIZZA