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11/08/2017

            LA VIE AU FUTUR SIMPLE

                         
Ce matin, avec les sept jeunes érythréens et soudanais qui sont venus au cours de français, comme d’habitude depuis huit mois, nous faisons un exercice autour du futur, celui qui paraît-il est simple.
Ils ont commencé par se présenter, parce qu’il y avait de nouveaux profs. Ensuite la prof la plus aguerrie a mis en place avec leur aide l’emploi du temps de la semaine.
On a bien ri par moments, parce qu’ils aiment rire et nous aussi.
Il y aura demain un nouvel atelier, un atelier poésie. Ils demandent : « C’est quoi, la poésie ? » et on reste secs. Je parlerais bien de beauté, celle qu’on fait avec les mots pour partager tout ce qu’on vit, le bien et le moins bien, et même le pas bien du tout.
Mais dans le « contexte », comme disent ceux qui paraît-il savent, « je ne me sens pas en capacité de... » je veux dire que je ne peux pas leur parler comme ça tout de suite de poésie, vu ce qu’ils vivent depuis huit mois, et depuis bien plus longtemps en fait.
J’aimerais bien pourtant, parce que j’y crois encore un peu à la poésie. Et à les regarder vivre, je pense qu’eux aussi – à leur façon à eux.
Alors on allume l’ordinateur et on tend un drap et on parle du futur, ce qui est drôlement optimiste, parce que je ne suis pas sûr qu’ils en aient un, ni nous non plus. En tout cas notre futur à tous ne sera sûrement pas simple.
Au contraire, dans la vidéo, le futur a l’air simple, quoique...
Le type arrive en pyjama, et sans débander, d’entrée, il déclare : « Je suis trop gros, à partir de l’an prochain je ne mangerai plus au restaurant le midi, comme ça je maigrirai. » C’est dans le futur, parce qu’au présent, même s’il la repousse deux ou trois fois, il finit par la bouffer, la brioche. Et puis c’est pire d’aller au restaurant le soir...
Il faut dire que sa copine ne l’aide pas à être en capacité de maigrir, elle pousse tout le temps la brioche vers lui, sans doute pour se déculpabiliser d’en avoir déjà mangé plus de la moitié.
Comme il est mal réveillé et trop occupé par sa brioche, elle lui dit comme ça : « Si tu me fais mon café, je t’aimerai pour toujours ! »
À mon avis, c’est pour de rire. On me l’a déjà fait, ce coup-là. En fait, c’est pas du futur, c’est du conditionnel. Ça dure jusqu’au prochain café.
Bon, d’accord, cette histoire de gros qui mangent trop, c’est plus des problèmes d’occidentaux que des problèmes d’Érythrée ou de Soudan, ou d’un peu partout ailleurs, là où on a faim. D’ailleurs il n’est pas gros, le type.
N’empêche, comme on est tous bon public, on a bien rigolé. C’est toujours drôle de voir des gens qui s’inventent des problèmes qui n’existent pas.
Et puis Fred est arrivée.
Elle avait l’air grave, ce qui était logique, parce que c’était grave.
Il y avait un vrai problème.
Du coup, on n’a plus rigolé du tout.
On a essayé de sourire, eux ils ont réussi, ils doivent avoir l’habitude que ça soit grave, à force...
De toute façon, il ne leur reste que ça, le sourire.
C’est pour ça que j’aimerais qu’ils restent avec nous.
Le sourire, c’est justement ce qui nous manque.

 

 

Alain SAGAULT

04/08/2017

Bruissements (74)

 

 

Moralisation : périodiquement le projet de moraliser la vie politique revient sur la table. Une affaire éclate ; le peuple crie « tous pourris ! » et le gouvernement promet des mesures d’assainissement. Mais le sujet est trop complexe, trop sensible, et on ne va pas jusqu’au fond des choses. Après l’affaire Fillon et le trouble qu’elle a jeté durant cette dernière campagne présidentielle, il fallait donner un coup de pied dans la fourmilière. Macron l’a donc fait via l’Assemblée Nationale. Après cinquante heures de débat et l’examen de quelques 800 amendements, celle-ci a donc accouché, vendredi dernier, d’un texte modifiant des habitudes de longue date. Ainsi, il ne sera plus permis à nos députés d’embaucher des membres de leur famille à des tâches complémentaires. La suppression de la réserve parlementaire, qui leur est généreusement allouée à hauteur de 130 000 euros par an, était également à l’ordre du jour. Si elle est finalement votée, leurs frais  devront être remboursés sur la base de justificatifs. En revanche, le nouveau texte leur permet encore d’exercer des fonctions de conseil parallèlement à leur mandat (si elles sont antérieures d’un an à celui-ci). Et si l’inéligibilité pour manquements graves  à la probité a été adoptée, elle ne leur fait pas obligation d’avoir un casier judiciaire vierge. On mesure là le caractère incomplet de cette réforme pourtant attendue par les Français. Paradoxalement, ces mesures adviennent  dans un contexte où le président  compte créer un statut pour la première dame. On ne saura jamais exactement ou commence la loi et où finit le népotisme.

 

Fronde : On ne croyait pas la chose possible – du moins pas si vite -, vu le caractère extrêmement ordonné de la République En Marche. Cette fois, la surprise est venue, non pas de députés, mais de simples adhérents de ce nouveau parti (qui en compte présentement 370 000). Une trentaine d’entre eux ont  contesté le manque de transparence et de démocratie interne dans les convocations de vote. Et ont constitué illico un collectif de combat,  « La démocratie en marche ». Le différend doit être porté devant les tribunaux, mais on se doute bien comment tout cela va finir.

 

Agression : l’omniprésence, dans l’actualité, de Macron et de la République En Marche a sans doute quelque chose d’agaçant. Mais de là à exprimer son ras-le-bol par la violence physique… C’est ce pas qu’a franchi, dimanche dernier à Bagneux, un sexagénaire excédé par une députée de ce parti et son manque de pédagogie. Un coup de poing au visage que l’auteur des faits, devant le tribunal qui le jugeait en comparution immédiate, a essayer de minimiser, prétextant « une bêtise ». Il n’en a pas moins écopé de six mois de prison dont un mois ferme. Certes, de tels gestes ne font pas honneur à la démocratie. Mais il n’est pas certain qu’il aurait pris autant s’il avait frappé une simple militante, comme il croyait le faire.

Dé-radicalisation : C’était l’unique centre de dé-radicalisation des djihadistes français. Il avait ouvert ses portes à Pontourny (Indre-et-Loire) en septembre 2016 et avait une capacité d’accueil de vingt-cinq places. Mais son pic de fréquentation n’aura pas dépassé les neuf pensionnaires et il était vide depuis février dernier. Aucun d’eux n’a d’ailleurs suivi jusqu’au bout ce programme de réinsertion : mais se sentaient-ils malades ? Aussi, devant l’échec manifeste de ce projet, le Ministère de l’Intérieur a donc décidé sa fermeture, tout en déclarant ne pas abandonner d’autres pistes alternatives à l’emprisonnement. On ne soigne pas les velléités de terrorisme comme on soigne l’addiction à l’alcool ou aux drogues.

 

Incendies: chaque été, hélas, les incendies font l’actualité, particulièrement en PACA. Avec eux c’est la vie la plus concrète, tant celle des hommes que celle de la nature, qui est menacée. Ceux qui ont ravagé, la semaine dernière, plus de 7200 hectares dans le Var, démontrent encore une fois la responsabilité humaine en amont, que la cause soit volontaire ou non. Ils soulignent aussi les failles dans le dispositif de protection, en particulier le manque et l’obsolescence des canadairs engagés dans cette lutte. Mais le pire est à venir, si l’on en croit les experts qui nous expliquent que le réchauffement climatique accentue une sécheresse qui profite aux départs de feux. Quand on vous dit que tout est lié…

 

Erik PANIZZA

28/07/2017

        Vous avez dit impopulaire…

   

                   

 La réduction du déficit public et la recherche conséquente d’économies sont un leitmotiv gouvernemental depuis maintenant trois quinquennats. Tâche ô combien délicate, qui exige beaucoup de doigté et de dosage, car il n’y a rien de plus impopulaire que l’austérité en France. Mais au bout du compte, ce sont toujours les catégories modestes qui sont impactées. Là on augmente – la CSG sur les retraites -, là on plafonne – les indemnités prud'homales – ou on baisse carrément – le montant des APL. Ce n’est pas rien de toucher, d’entrée de jeu,  aux aides au logement. Même Sarkozy n’avait pas osé le faire durant son mandat. Il faut croire que Macron, sur ce chapitre comme sur d’autres, est plus décomplexé que lui.

Car ce  nouveau coup de rabot  ne concerne pas moins de six millions et demi de foyers, parmi les plus pauvres de ce pays. Certains diront, bien sûr, que la pauvreté est une notion toute relative, qu’il vaut mieux être pauvre ici que riche là-bas. Et que cinq euros par mois, après tout, ce n’est pas grand-chose. Seulement - nous le savons maintenant – le gouvernement ne compte pas s’arrêter là pour faire passer les aides au logement sous la barre des vingt milliards annuels (elles représentent actuellement trente milliards de dépenses).

Quelle va être la prochaine étape dans cette entreprise en peaux de chagrin ? L’étude au cas par cas des patrimoines individuels pour justifier ou non le versement de ces aides pourtant nécessaires à l’équilibre quotidien des Français ? Car toucher aux APL, c’est non seulement affaiblir socialement ceux qui en bénéficient mais grignoter aussi ce droit fondamental qui garantit à chacun un logement décent dans ce pays.

Pour ceux – et il y en a – qui soutiennent cette mesure, les loyers sont trop élevés en France et c’est à cause des aides versées par l’état. Elles feraient  augmenter les prétentions financières des propriétaires. En les diminuant, le prix des loyers baissera lui aussi et les locataires ne seront pas perdants. C’est en somme la vieille loi du réajustement par le marché. Croit-on, cependant, que cette répercussion serait instantanée ? Il pourrait bien se passer de nombreux mois avant que la baisse ne devienne effective ; et ce seraient, bien sûr, les locataires pauvres qui supporteraient seuls  les frais durant cet intervalle.

Notez d’ailleurs qu’il n’y a pas que les APL qui vont bientôt diminuer; les riches aussi sont concernés par ces mesures réductrices. Il y a cependant peu de chances qu’ils s’en plaignent car l’ISF, lui aussi, va baisser à partir de 2019.Ou plutôt il ne prendra plus en compte que les avoirs immobiliers, devenant du même coup l’impôt sur la fortune immobilière. Un joli manque à gagner pour l’état qu’il devra  bien compenser par d’autres tours de passe-passe.

Autant de mesures clivantes qui ont tout pour être impopulaires et faire regretter d’avoir voté pour l’actuel locataire de l’Elysée par stratégie anti-FN. Elles pourraient bien, dès l’automne prochain, faire descendre dans la rue beaucoup de gens qui auraient préféré rester tranquillement au chaud chez eux.

 

Jacques LUCCHESI

       

14:54 Publié dans numéro 17 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : apl, logement, déficit, isf