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07/01/2014

Valls à contretemps

 


Faut-il interdire les spectacles de Dieudonné ? Non, bien sûr. Ce serait le faire entrer dans la victimisation, lui qui frise déjà la parano quand il affirme dur comme fer que nous vivons tous sous l’horrible joug sioniste. Ce serait surtout lui faire beaucoup de pub et donc attirer curieux et autres olibrius en mal de castagne ou renommée. Dieudonné se dit antisioniste, ce qui est bien sûr son droit. Il peut même le proclamer et en faire un show humoristique. Pourquoi pas ? Le problème, pour ne pas dire le hic, c’est qu’il se livre avec une certaine volupté à des débordements antisémites, n’hésitant pas à mettre en cause un journaliste de France Inter et ne dédaignant pas de proférer de douteuses saillies sur les chambres à gaz qu’il faudrait regretter selon lui... Bien sûr, il y a de la provocation chez Dieudonné, un humour noir, franchement ravageur. Il y a plus : quelque chose qui ressemble à du ressentiment qu’il masquerait sous un humour limite. Comment ne pas penser à ce courant antisémite qui connut son point d’orgue en France avec l’affaire Dreyfus pour ressurgir au cours des années 30 et se concrétiser funestement avec l’Etat français du maréchal Pétain ? On croyait le monstre vaincu. Mais non ! Perdure toujours dans notre douce France cette peste qui apparaît comme une épidémie, que des agents sortis de leur sommeil propagent avec vigueur, déguisés, maquillés sous d’autres oripeaux mais reprenant toujours la même antienne. C’est un fait. Il faut donc inlassablement l’endiguer. Interdire les spectacles de Dieudonné ? Non, car on toucherait à la liberté d’expression. Mais le poursuivre pour ses propos antisémites, ça oui, il faut le faire. C’est la loi. Il faut en l’occurrence l’appliquer sans délai et sans le moindre apitoiement. 


                     Yves CARCHON


  

03/01/2014

Dieudonné antisémite

 


 

Ya-t’il, à l’heure actuelle, une réelle menace antisémite en France ? Autrement dit, est-ce que les propos grossièrement provocateurs de Dieudonné sur les Juifs pourraient générer des violences physiques sur des représentants de cette communauté ? Un naturel réflexe d’auto-défense la pousse à s’insurger contre toute parole qui pourrait remettre en cause le consensus républicain sur les horreurs du nazisme. Au risque de tomber à son tour dans des attitudes extrémistes et de donner ainsi gain de cause à ses contempteurs. S’il y a un homme en France qui prend à cœur ces questions, c’est bien Manuel Valls, lui qui a décidé de mettre tout en œuvre pour stopper la dynamique Dieudonné. Mais jusqu’où le ministre de l’intérieur peut-il aller trop loin ? Car s’il est juste de réclamer à « l’humoriste » le montant – plusieurs dizaines de milliers d’euros - des huit amendes infligées pour ses propos injurieux en vertu des lois qui condamnent l’expression du racisme et de l’antisémitisme, il est plus douteux, en revanche, de chercher à interdire la tenue de tous ses spectacles - en partie par crainte des réactions de ses adversaires. N’est-ce pas s’enfermer dans l’attitude paradoxale qui consiste à lui demander de payer ses dettes tout en l’empêchant de travailler ? N’est-ce pas encore la meilleure façon de le rendre sympathique aux yeux de tous ceux qu’agace de plus en plus l’idéologie dominante du politiquement correct et de la moralité imposée à coups de décrets ? Ceux-là ne partagent pas les idées nauséeuses de son infime public de base, mais s’inquiètent à juste titre des limitations, de plus en plus fréquentes, à la liberté d’expression dans ce pays. Ils sont encore les plus nombreux, heureusement, et ce sont bien eux que Dieudonné cherche à séduire, notamment en prenant la pose du martyr, habile retournement de l’agresseur en agressé. Au-delà de sa haine proclamée des Juifs et des tristes pitreries qu’elle lui inspire, c’est l’ensemble du système démocratique actuel qu’il cherche à atteindre, quitte à assumer d’en être la « bête noire ». Même nourri par des rancoeurs personnelles, son antisémitisme n’a rien à voir avec celui de ses célèbres aînés – à commencer par Hitler lui-même. Le Juif, pour Dieudonné, n’est pas tant un sous-homme que celui qui façonne le discours officiel sur l’Histoire; celui qui empêche, par le rappel incessant du génocide subi, les autres minorités opprimées de faire reconnaître leurs propres souffrances. Cette situation, parfaitement moderne, s’appelle la concurrence victimaire. Et Dieudonné M’bala M’bala, Français d’origine camérounaise donc descendant de colonisés, en est présentement le plus remuant produit, par là le leader désigné de tous ceux qui ruminent dans l’ombre.

 

 

                       Jacques LUCCHESI

27/12/2013

Itinéraire d’un syndicaliste gâté

 

              

 

 

 Son nom sonne comme une marque d’appareils électro-ménagers. C’est pourtant dans les aciéries qu’il a fait la première partie de sa carrière. Assurément Edouard Martin, 50 ans,  a une gueule – et même une belle gueule. C’est aussi un fort en gueule, comme il l’a prouvé maintes fois devant les caméras de télévision (qui aiment bien son image). La combinaison de ces deux caractéristiques lui a valu de devenir le porte-parole officiel des métallos de Florange, subsumant sous son syndicat – la CFDT – la voix de tous les autres. Au fil des ans, on l’a vu sur (presque) tous les plateaux de télé, répétant son sempiternel discours de protestation, tellement prévisible qu’il en devenait agaçant. Oui, ce type-là en voulait, on le sentait bien. Et plus d’un a parié qu’il ne resterait pas toute sa vie métallo. En tant que prolongement – ou perversion – de l’activité syndicaliste, la politique devait forcément le tenter, surtout sur son aile gauche. Mais nul ne pensait alors qu’il cèderait si vite aux sirènes du PS,  lui qui l’avait pourtant vertement critiqué lors de la liquidation des hauts fourneaux de Florange. C’est donc sous les couleurs du parti présidentiel qu’Edouard Martin va, dans quelques mois, faire ses premières armes face aux électeurs français.  Pas pour briguer un poste de conseiller municipal mais directement dans la cour des grands, en tant que tête de liste pour la députation européenne. Dans sa circonscription du Grand Est, il aura face à lui deux poids lourds de l’opposition, l’UMP Nadine Morano et le FN Florian Philippot. Gageons qu’avec de tels adversaires, sa candidature risque de nous valoir quelques réparties bien vachardes, voire de franches engueulades. Peu importe, au demeurant. Car ce qui nous interroge présentement, c’est ce cheminement, de plus en plus fréquent, des représentants de la société civile vers la politique. C’est aussi le problème de la notoriété acquise çà et là et de ses répercussions dans cette société ; l’un de ses privilèges – ou de ses injustices – étant de permettre aux heureux élus de brûler allègrement les étapes dans la course au pouvoir. Oui, la lutte des classes a cédé le pas à la lutte des places et Edouard Martin en est le meilleur exemple en date. Son destin politique, c’est à la télévision qu’il le doit. Confirmera-t’il l’essai ? Saura-t’il convaincre les électeurs avec des idées rapportées et réchauffées pour la circonstance ? L’avenir nous le dira assez vite. Quoiqu’il en soit, il va lui falloir faire rapidement ses preuves. Car la politique n’est pas seulement qu’une affaire d’image.

 

 

                        Bruno DA CAPO

17:17 Publié dans numéro 12 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cfdt, florange, ps, grand est