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09/05/2017

Le moment Macron

                      

 

 

 C’est sans réelle surprise qu’Emmanuel Macron a été élu, dimanche soir, président de la république. Le huitième, exactement, depuis la fondation de la Cinquième République en 1958. Avec 66,1% des suffrages exprimés par plus de vingt millions d’électeurs, il devance de très loin sa rivale Marine Le Pen qui, elle, n’a pu réunir que onze millions de votants – soit 33,9% de suffrages. Cette élection n’aura pas fait que bousculer les lignes politiques habituelles; elle aura également bouleversé la pyramide des âges en ce domaine. A 39 ans, Emmanuel Macron (qui était, voici trois ans, un quasi inconnu en politique) devient ainsi le plus jeune président de toute l’histoire de la république française, lançant un signal fort à la jeunesse de ce pays. 

Au-delà de son accomplissement personnel et de sa volonté unanimiste exprimée avec lyrisme, il sait parfaitement que le plus dur reste à faire. Car il n’ignore pas que la majorité des votes qui se sont portés sur lui, dimanche dernier, n’étaient par dictés par une adhésion à son programme mais par une un rejet radical de celui de son adversaire. D’autre part, il va lui falloir tenir compte de l’énorme masse des abstentionnistes et des votes blancs – seize millions au total. Les prochaines élections législatives, dans moins d’un mois, vont ranimer à coup sûr de féroces oppositions, tant partisanes que personnelles.

S’il peut espérer des accommodements avec une partie du PS et même avec une frange des Républicains, aucun compromis, en revanche, n’est à escompter tant du côté du FN que de celui du Front de Gauche (qui refuse en bloc ses thèses pro-patronales). Cela va être difficile, pour lui, d’obtenir une majorité de députés à l’Assemblée Nationale, d’autant qu’une bonne partie des 577 candidats qui vont se présenter sous les couleurs d’En Marche seront, eux aussi, des novices en politique. Mais n’anticipons pas…La semaine prochaine, nous connaîtrons enfin la composition de son gouvernement ; ce qui en dira déjà long sur la politique qu’il compte mener pour les cinq années à venir. Vraiment les Français ne sont pas près de se reposer en ce printemps maussade.

 

      Jacques LUCCHESI

05/05/2017

                               Macron domine Le Pen

                 

 

 

 

 Rarement un débat télévisé opposant deux candidats à l’Elysée fut plus attendu. Il est vrai que leurs projets respectifs de société sont diamétralement opposés, même si tous les deux s’écartent des schémas normatifs portés jusqu’ici par la gauche et la droite républicaines. Certains s’étonnaient que la percée du FN  ne suscitât pas plus de réactions dans la rue. Quel contraste, en effet, avec la mobilisation citoyenne qu’avait entraînée, en 2002, la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour, face à Jacques Chirac ! Du reste, il n’y avait pas eu, cette année-là, ni débat ni dialogue entre les deux derniers prétendants à la fonction suprême. Et quid de tous les indécis, pour une raison ou une autre, à ce moment crucial de notre histoire politique ? Malgré des réticences aisément compréhensibles, ce débat, mercredi soir, leur aura peut-être permis d’affiner leur jugement sur l’un et l’autre des duellistes.

Qu’a-t-on vu sitôt le top chrono ? Une Marine Le Pen hyper agressive, attaquant d’emblée son adversaire sur son image symbolique (candidat du système, soumis aux puissances de l’argent, etc…) ; autrement dit sur des généralités et pas sur son programme. Le ton, d’abord ironique (en quoi elle rappelait le style de son père) est vite monté, jusqu’à l’invective et l’accusation. Face à elle, tel un boxeur en repli, Emmanuel Macron restait stoïque et déterminé, répliquant chaque fois qu’elle lui en laissait la possibilité. On s’attendait, bien sûr, à quelques réparties cinglantes mais pas à un tel pugilat verbal, celui-ci  mettant rapidement sur la touche les deux journalistes (Nathalie Saint-Criq et Christophe Jakubyszyn) chargés de l’arbitrer. Cependant, à mesure que le temps passait, on s’apercevait que le jeune leader d’En Marche prenait l’ascendant sur la présidente du FN. Il connaissait mieux qu’elle ses dossiers et n’avait aucune difficulté à démonter ses choix économiques (notamment sa volonté de revenir à une monnaie nationale), éclairant le marasme qui pourrait en résulter pour le pouvoir d’achat des Français. Quant à la sécurité, sujet phare de Marine Le Pen, il avait aussi un panel de  propositions, sans doute moins discriminatoires  mais propres à rassurer les électeurs.

Peu à peu, son adversaire perdait du terrain, s’enfermait dans ses contradictions. Son image de mère protectrice de la nation se craquelait, laissant apparaître son penchant au cynisme et à la brutalité. Elle multipliait les digressions, éludant les questions pourtant pertinentes sur son programme, n’hésitant pas à user de basses insinuations financières, partant dans des rires glaçants pour cacher sa faiblesse dialectique et ainsi tenter de renverser la vapeur. Et chacun pouvait mesurer le caractère profondément clivant de sa candidature, tant pour les Français entre eux que pour la France vis-à-vis du reste de l’Europe. Car la France qu’elle prétend aimer est figée sur son passé, fut-il prestigieux, volontairement isolée des réalités du monde moderne. A l’inverse, la vision de la France portée par Emmanuel Macron est dynamique et, sans renier pour autant son histoire, inscrite de plain-pied dans le concert des nations libres. Il est manifestement plus à l’aise qu’elle sur les questions internationales. Certes, on peut le critiquer sur son programme social un peu trop libéral, tout comme, d’ailleurs, sur les volets de la culture et de l’environnement (il est symptomatique qu’aucun des deux n’en ait parlé au cours de ce débat). Mais, sous un angle plus personnel, il a largement démontré qu’il avait les qualités intellectuelles et le caractère nécessaires pour assumer la charge à laquelle il prétend. A l’issue de cette ultime confrontation, l’avantage est certainement dans son camp. Reste maintenant à savoir si les Français actuels ont suffisamment de bon sens pour se détourner des fariboles passéistes, aussi flatteuses soient-elles.  

 

Jacques LUCCHESI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

28/04/2017

    Un premier tour très attendu

           

 

  Ce ne fut pas un raz-de-marée vers les urnes mais quand même une très honnête participation, avec 77% de votants. Dimanche soir, vers 20 heures, la tension était à son comble devant les écrans de télé. Allions-nous avoir le scénario catastrophe d’un deuxième tour Fillon-Le Pen ? Eh bien non ! Le pire fut évité puisque ce fut le portrait d’Emmanuel Macron qui s’afficha à côté de celui de la présidente du FN. Il arrivait même en tête des suffrages exprimés avec 23,5%, contre 21,5% à sa concurrente immédiate (ces chiffres devaient, par la suite, légèrement évoluer). Derrière eux, on découvrait que Fillon et Mélenchon étaient ironiquement à égalité, avec 19,5% - même si, plus tard, Fillon devait atteindre la troisième marche. Bien formatés par les médias, les électeurs n’ont pas fait mentir les sondages qui, depuis plusieurs semaines, plaçaient en tête ces quatre-là. Néanmoins, la déception était sensible, tant dans le camp des Républicains, avec un candidat qui assumait pleinement sa défaite, que dans les rangs du Front de Gauche, puisque leur leader, contrairement à 2012, préférait ne donner aucune consigne de vote au second tour. Quant au PS, avec les petits 6,2% réalisés par Benoît Hamon, on se préparait d’ores et déjà à entrer dans une zone de turbulences. Bref : la révolution dans le paysage politique français était en marche…

Lors de son allocution devant les militants réunis dans son QG de campagne, porte de Versailles, Emmanuel Macron est apparu grave et confiant à la fois, déjà moulé dans son rôle présidentiel. Il est vrai qu’il bénéficie d’une dynamique exceptionnelle depuis un an, engrangeant des soutiens et des appels en sa faveur de tous côtés, ou presque, pour le second tour. Même si les sondages le donnent vainqueur à 62%, il aurait cependant tort de croire que cette élection est gagnée d’avance. Car il est loin de faire l’unanimité dans l’électorat populaire et l’alliance républicaine contre le Front National n’a plus la détermination qu’elle avait en 2002. Il va devoir plus que jamais aller à la rencontre des Français, face à une Marine Le Pen qui laboure depuis plus longtemps que lui le pré carré du patriotisme. Dans ce pays aux divisions de plus en plus accentuées, s’achemine t’on, après le Brexit anglais et l’élection de Donald Trump aux USA, vers un troisième grand moment populiste ? On ne peut pas complètement écarter cette inquiétante possibilité. Du reste, même si elle échoue devant les marches de l’Elysée au soir du 7 mai prochain, Marine Le Pen aura quand même remporté son pari : rendre son parti acceptable pour des millions de Français moyens.  

 

                           Jacques LUCCHESI