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20/11/2014

Bruissements (43)

 

 

G20 : un coup de froid passait sur Brisbane (Australie), lors du G20 qui s’y tenait le week-end dernier. Un froid sibérien sans doute amené par le jet privé de Vladimir Poutine. Car cette réunion des représentants des 20 pays les plus riches du monde ne peut éviter ni les affinités personnelles ni les inimitiés engendrées par la situation internationale. Pour François Hollande, qui devait s’entretenir personnellement avec le président russe, ce fut sûrement pas un moment de tout repos. En jeu la livraison – ou la suspension – des deux frégates porte-hélicoptères Mistral commandées par la Russie à la France. Faut-il honorer un contrat passé avec un pays qui bafoue ouvertement le droit des états à disposer d’eux-mêmes et encaisser ainsi un juteux bénéfice ? Ou, au contraire, résister aux pressions et risquer une pénalité conséquente (un milliard d’euros) pour rester fidèle à ses valeurs et engagements. La réponse, qui paraît simple, ne l’est pas dans les faits et Hollande va prendre encore le temps de la réflexion. Du coup, Poutine est reparti vers Moscou avant la fin du sommet. Au motif qu’il devait, comme un bon petit employé, être dès lundi matin dans son bureau du Kremlin. Ben, voyons…

 

Sivens : la mort de Rémi Fraisse, le 26 octobre dernier à Sivens (Tarn) n’en finit pas – à juste titre – de provoquer des remous dans l’opinion publique française. Un peu partout, les manifestations se succèdent, tant pour honorer la mémoire du jeune militant écologiste de 21 ans que pour reprocher au pouvoir sa brutalité face à tous ceux qui s’opposaient au projet de barrage. On sait à présent que les gendarmes, conscient d’avoir fait une « bavure », ont retenu sciemment l’information le plus longtemps possible. Et que depuis, Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur, tente comme il peut de sauver les apparences. Difficile de croire que, lui non plus, ne savait pas…Du coup, on a retiré les grenades offensives de l’arsenal des forces de l’ordre. Il faut toujours au moins un sacrifié pour que les pouvoirs publics réagissent. Mais le mal est fait et les méthodes peu démocratiques employées dans cette affaire risquent d’entacher durablement la gouvernance socialiste. Une de plus, me direz-vous… 

 

Clowns : on a beaucoup glosé, fin octobre, sur le phénomène des clowns agresseurs. Peut-être n’était-il dicté que par la présence d’une fête comme Halloween – qui est devenue un second Carnaval pour les jeunes Français. En tous les cas, des actes graves ont été commis et leurs auteurs, dûment démasqués, devront en répondre à la justice. Etrange époque qui inverse les figures de l’innocence et du mal, de la candeur et de la cruauté. Qui fait descendre dans la rue les fantasmes des écrivains et des cinéastes pour donner libre-cours à ses pulsions les plus violentes.

 

Aides sociales : dans l’Europe des 28, aucun problème pour circuler et s’installer dans le pays de son choix, à condition d’avoir les moyens pour ça. Aucun problème pour placer librement son argent en Autriche ou en Belgique quand on est français ou Allemand. Mais les pauvres, c’est différent : qu’ils restent dans leurs pays respectifs. On a les nôtres, merci. C’est ce que dit en substance un récent jugement de la Cour  de Justice Européenne lorsqu’il déclare que les états n’ont aucune obligation de verser des aides sociales à des ressortissants étrangers qui sont sans emploi ni ressources. Sans emploi et peu désireux d’en trouver, pour préciser les choses. Une décision qui apporte de l’eau au moulin de tous ceux qui, dans notre pays, ne songent qu’à rogner les allocations chômage et autres aides familiales. Certes, il y a eu là aussi des abus. Mais que représentent-ils par rapport aux abus commis par les riches en matière de domiciliation fictive et d’évasion fiscale ? Selon que vous serez puissant ou misérable…

 

Syndics : parmi les quelques mesures véritablement sociales formulées par les socialistes depuis leur accession au pouvoir, il y a sans doute la loi Duflot sur les syndics et les agences immobilières. Afin de mettre un frein aux abus scandaleux qui s’y pratiquent couramment (frais de transactions surévalués, opacité des règlements internes, obligations bafouées), la ministre du logement avait proposé en 2013 de plafonner les honoraires d’agence et de créer un organisme de contrôle national, afin de mieux protéger les droits des locataires et des co-propriétaires. Depuis, Cécile Duflot a quitté le gouvernement et on constate, là aussi, que les choses restent stationnaires. A défaut d’un grand coup de pied dans cette avide fourmilière, il suffirait  de mettre en application ses idées pour y introduire un peu plus de justice et d’équanimité. On en reparlait d’ailleurs, ces jours-ci, et c’est en soi un signal favorable. A quand le changement si attendu dans ce secteur trop protégé?

 

 

Sarkozy : Mu par son souci de se distinguer de ses concurrents à la présidence de l’UMP (Alain Juppé, Bruno Lemaire), Nicolas Sarkozy ne recule devant rien. Samedi dernier, face aux militants de Sens Commun (association dans la mouvance de la Manif pour tous), il a tout simplement proposé « une réécriture de la loi Taubira », s’il venait à être réélu président en 2017. Affirmation on ne peut plus opportuniste, puisqu’il parlait à un auditoire particulièrement droitiste. Concrètement, cela signifierait l’abrogation de la dite loi autorisant le mariage aux couples homosexuels. Quid, dans ce cas là, de tous ceux qui ont depuis convolés sous l’égide de cette loi ? Devraient-ils voir leur mariage invalidé ou ramené à un contrat d’union civile ? Ses propos ont été rapidement brocardés, y compris parmi ses soutiens les plus fidèles -  comme Nathalie Kosciusko-Morizet. Ils arrivent, de surcroît, dans un contexte où plus de deux tiers des Français sont favorables à cette loi. Espère-t’il  obtenir leurs suffrages en les divisant à qui mieux ? Ou peut-être séduire ainsi la minorité d’homosexuels qui résistent encore aux charmes du mariage ? Une « boulette » de plus à l’actif de l’ex-président, qui s’avère de plus en plus décalé et pathétique.

 

Guérini : s’il y en a un autre qui ne doute de rien, c’est bien Jean-Noël Guérini. Exclu du PS mais néanmoins réélu sénateur, le « patron » du Conseil Général a tout simplement annoncé, jeudi 13 novembre, la création de son propre parti politique, la Force du 13. D’ores et déjà, il aurait dans sa manche 22 conseillers généraux sur 29 que compte le département (des BDR) : c’est beau les amis, du moins tant qu’ils ont un intérêt personnel à vous suivre. Une manière de rappeler aux socialistes - qui l’ont honni un peu vite - qu’il faudra compter encore avec lui en mars prochain, pour les élections départementales. Ce qui a également l’avantage de repousser au second plan les « affaires » qu’il traine depuis des années maintenant. Qu’est-ce que la politique désormais, sinon une question d’alliances et de rapports d’influence ? On voudrait en rire, mais c’est pourtant triste à pleurer.

 

 

 

                   Erik PANIZZA

13:28 Publié dans numéro 13 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : g20, sivens, clowns, syndics

14/11/2014

Courage, Philae !

 

 

Dans la souvent triste actualité de chaque jour, les occasions d’ouvrir une part du rêve sont assez rares  pour ne pas saluer l’exploit de la mission Rosetta. A plus d’un titre, elle semble redonner à notre humanité génie, panache, surpassement perdus. Tant mieux ! Nous voilà tous rivés à nos écrans comme il y a bien longtemps quand l’un de nous posait le pied sur le sol de la Lune, mais cette fois-là pour suivre avec émotion Philae, le fragile enfant de Rosetta se poser sur la comète Tchouri. Notre grand-père Jules Verne n’est pas très loin, ni Asimov, ni le Kubrick de 2001, odyssée de l’espace. Mais là, nous vivons en direct l’accomplissement d’une aventure humaine commencée il y a plus de vingt ans. Philae s’est posé nous dit-on de guingois. Et alors ? On nous confirme qu’il n’a pas pu se cramponner mais a rebondi plusieurs fois comme sur un trampoline sur le sol de Tchouri, avant de se poser légèrement penché... Néanmoins, il pourra prendre les photos attendues, en attendant de récupérer quelques échantillons de la comète qui contiendrait l’ADN de notre humanité. On comprendra que de tels enjeux écrasent pour une fois notre actualité politicienne, que devant cette mission Rosetta nous nous sentons tous bien petits, que les Jouyet, Fillon, Hollande, Sarkozy... nous paraissent plus légers encore que notre nouvelle icône Philae. Certes, notre Président dit s’être cramponné depuis son accession au pouvoir. On veut le croire. Mais désormais on aimerait qu’il nous adresse des photos moins floues, que les prélèvements prévus par son gouvernement ne soient pas des impôts !

                   

                         Yves CARCHON

 

 

31/10/2014

La Gauche passéiste

 

                       

 

 

  En politique, il ya des expressions qui font mouche, des expressions appelées à faire trace dans la mémoire collective. Celle de « Gauche passéiste », prononcée par Manuel Valls devant la presse voici huit jours, est sans doute de celles-là. Elle tombe dans un contexte d’opposition intérieure rarement atteinte sous la Veme République. Une fronde de députés socialiste (avec, parmi eux, d’anciens ministres de Hollande) et une figure historique du PS, Martine Aubry, ne cessent de dénoncer le virage social-libéral pris par la politique de l’actuel premier ministre. Auraient-ils tort ? Sûrement pas de là où ils parlent, c'est-à-dire d’une position ancrée dans la tradition socialiste, où l’on a toujours accordé plus d’intérêt à l’amélioration du sort des classes populaires qu’à celui des patrons. Où la fiscalité n’est pas synonyme de pression mais de redistribution. Si ce n’est pas la Gauche qui porte ces exigences-là, quelle autre formation politique le fera ? Mais Manuel Valls, tout à sa mission réformatrice, n’a cure de ces objections. Depuis longtemps il n’entend plus les soupirs exaspérés de tous ces Français qui ont porté son camp politique au pouvoir, en 2012. Et pourquoi l’ont-ils plébiscité ? Parce que, précisément, ils croyaient aux valeurs de la Gauche dénoncées aujourd’hui comme « passéistes » par celui-là même qui devrait en être le garant. Cette Gauche-là, c’est celle de Jaurès, de Blum, de Mendès-France, de Mitterrand. C’est celle qui a permis les réformes dont le plus grand nombre profite encore aujourd’hui (les congés payés, l’abaissement du temps hebdomadaire de travail, le RMI). Des réformes véritablement de gauche, aux antipodes de celles que préconise l’actuel chef du gouvernement. Pense-t’il sincèrement favoriser l’émancipation de l’individu en le soumettant à la flexibilité patronale ? En donnant aux patrons une visibilité et des prérogatives qu’ils n’ont  même pas eus sous les trois derniers gouvernements de droite ? Croit-il que la transition énergétique soit une mesure spécifiquement de gauche, quand tous les dirigeants politiques du moment sont sommés de s’en préoccuper urgemment ? Il est possible qu’un gouvernement de gauche ne soit pas, à l’heure actuelle, le plus adapté pour mener une politique de sortie de crise. Mais ce n’est pas pour autant qu’un tel gouvernement doive copier les solutions proposées par la Droite, car il n’a pas été élu pour ça. Il y a des valeurs qui constituent l’identité profonde d’un parti et qu’on ne peut pas rayer en quelques coups de plume au nom du pragmatisme, voire du progressisme. C’est une question de fidélité, pas une crispation idéologique. Quoique venu de la Gauche, Manuel Valls – avec le soutien bienveillant de François Hollande – ne cesse de trahir ces valeurs-là. Le temps n’est pas loin où ils en paieront le prix. Car mieux vaut encore une Gauche passéiste qu’une Gauche dévoyée.

 

                              Bruno DA CAPO