04/01/2006
De l’incivisme routier
Imagine-t’on le choc émotionnel qui résulte du passage à vive allure d’un véhicule de 15 tonnes juste à côté de vous ? Une expérience guère enviable mais que plus d’un d’entre nous a faite à son corps défendant. En l’occurrence, ce samedi 15 octobre 2005 vers midi , c’est Zoubida B. qui l’ a vécue aux abords de la gare Saint-Charles. Un car de la société de transports Marseille-Marignane descendait vers le boulevard Voltaire. Il roulait déjà vite et largement en dehors de sa voie (la circulation est ici à double-sens). Le trottoir étant trop étroit pour que deux personnes puissent marcher côte à côte, la jeune femme avait dû descendre et cheminer dans le caniveau. Le car arrivait dans son dos. Pensez-vous que le chauffeur ait klaxonné pour lui signifier son passage ? Point du tout ! Sans ralentir, il l’a frôlé silencieusement comme si la chaussée lui appartenait, comme si les piétons devaient l’anticiper et n’avaient aucun droit face à ce colosse à moteur. Revenue de son émotion, Zoubida a voulu relater sa mésaventure à un responsable de la compagnie routière. Mais, contre toute attente, la caissière a couvert l’infraction du chauffeur et a refusé de lui communiquer le nom et le téléphone d’une personne ayant autorité dans la maison. Après tout, elle n’avait pas eu d’accident corporel : qu’importe le choc psychologique ! A l’incivisme quasi-criminel du premier est venu ainsi s’ajouter le corporatisme borné et le mutisme coupable de la seconde. C’est beaucoup pour une seule matinée. Face à ces attitudes ouvertement méprisantes, quel recours reste-t’il aux usagers lésés ?
C’est une anecdote parmi cent autres sur ces comportements – rarement sanctionnés – qui sapent les bases du vivre-ensemble et généralisent la méfiance. A Marseille, le chapitre de la conduite est particulièrement épineux. Les pires instincts s’y révèlent. On ne compte plus les automobilistes qui ne s’arrêtent jamais à un passage piétons, voire qui brûlent allègrement les feux-rouges ou roulent à fond la caisse dans les couloirs réservés aux bus. Parlons justement des chauffeurs de bus si prompts à se mettre en grève à la moindre incartade. Eux non plus ne respectent guère les raies blanches piétonnières ; et combien passent sans ralentir devant les arrêts sensément desservis, ne laissant pas toujours aux gens le temps de les héler pour monter ? On croirait parfois qu’être derrière un volant rend dominateur, ou même sadique, le citoyen lambda. Quant aux motards, beaucoup roulent maintenant sur les trottoirs pour gagner un peu de temps, insultant sans vergogne celui qui leur rappelle que leur place est sur la chaussée.
Alors, face à ce déchaînement d’incivisme et de brûtalité qui rend la vie quotidienne de plus en plus pénible, il ne reste plus qu’à prendre les armes ou la plume. Et crier !
Clark KENT
11:35 Publié dans Numéro 1 | Lien permanent | Commentaires (0)
Un nouveau Tramway à Marseille : pour quoi faire ?
Voilà maintenant prés de deux ans que le cœur de Marseille est devenu un chantier permanent. Les arbres disparaissent ou pourrissent sur place. Les trottoires rétrécissent et se chargent de gravats. En revanche, les grillages et les baraquements pullulent un peu partout, rendant la vie infernale au automobilistes et encore plus au piétons qui sont, où qu’ils aillent, les plus exposés à toutes les nuisances. Ces désagréments quotidiens, nous les devons à la volonté de nos édiles qui ont décidé en petit comité d’offrir aux Marseillais une nouvelle ligne de tramway. En soi, le projet est louable. Le tramway ne pollue pas ; il est un moyen de transport adapté à une ville soucieuse de son environnement. En plus, il fleure bon la nostalgie, ravivant chez les plus anciens le souvenir d’une ville où la vie était naturellement plus douce qu’aujourd’hui. Le hic, dans tout ça, c’est que cette nouvelle ligne va passer par des quartiers qui étaient déjà bien desservis par le métro et les bus, comme le boulevard Longchamp, la Canebière et la Joliette. C’est dire qu’elle n’avait pas une nécessité de premier ordre et qu’elle pourrait bien, au bout du compte, apparaître comme superflue. Les riverains n’auront ainsi que l’embarras du choix. Quant aux touristes – catégorie que la munipalité flatte de plus en plus - , ils pourront ainsi descendre du tramway à la station Vieux Port et grimper directement dans le petit train vers la Bonne Mère. Pendant ce temps, les habitants des quartiers nord continueront à se « satisfaire » de transports défectueux : vieux bus, horaires de passage aléatoires. Veut-on un exemple ? Pour aller, le dimanche, à la cité de la Castellane on trouve assez rapidement un bus – le 25 – au départ de la station Bougainville. L’ennui c’est qu’au retour, il faut souvent l’attendre (sous un abri démantelé) 40 minutes plutôt que les 20 prévues durant les jours fériés. Allez organiser un festival de théâtre dans ces conditions ! C’est ce que fait pourtant – avec quel enthousiasme ! – Fabrice Raina depuis deux ans. Parce qu’ici, il y a vraiment urgence à introduire et faire partager une culture vivante. Encore faut-il que les transports et l’intendance suivent. Ou alors, il n’y a plus que Zidane pour nous sauver.
Erik PANIZZA
11:30 Publié dans Numéro 1 | Lien permanent | Commentaires (0)
Le Franc-Tireur
( feuille d’opinions à parution irrégulière)
« le conflit est le père du monde »
Héraclite
Edito
Une nouvelle feuille d’opinions à Marseille, pour quoi faire ? Est-ce que les étals des kiosques et autres lieux de dépots n’abondent pas déjà en publications de toutes sortes ? Quiconque, pris sous cette avalanche de papier imprimé, aurait le désir fou de lire tout, ligne par ligne, serait menacé d’ophtalmie et d’épuisement nerveux à court terme. Donc, entre les quotidiens payants et gratuits, les revues politiques et culturelles, ou même les fanzines, que peut encore demander le peuple ?
Ces questions-là, vous pouvez croire que nous les avons longtemps retournées. Et nous sommes ainsi revenus à cette évidence que tout n’est pas dit – que tout ne peut pas être dit – dans les journaux, même avec l’aide d’Internet. Précisément, ce qui fait information, après un long processus de filtration, ne représente qu’un petit et pâle reflet de la vie du monde. Et quasiment rien de ce qui se passe dans les têtes des individus à qui sont destinées toutes ces productions verbeuses et plus ou moins consensuelles. Qui croit encore à l’objectivité de la presse ? Qui croit encore à sa liberté ? Pas nous, en tous les cas.
Les conséquences de tout cela s’imposent d’elles-mêmes. Parce que nous pensons que dans une démocratie, la majorité silencieuse n’est pas vouée à le demeurer éternellement ; parce que nous en avons marre que dans le mot « concitoyens », seule la première syllabe soit vraiment prise en compte par ceux qui nous gouvernent d’une façon ou d’une autre, nous voulons, avec le Franc-Tireur vous proposer un petit espace de libre parole. Un espace où chacun pourra lâcher en quelques lignes la bride à sa subjectivité, donner à lire et à méditer ses frustrations ou ses espérances. Un espace encore étroit comme un berceau mais qui n’aspire qu’à s’accroître et à vous faire entendre dans le débat public. Si vous croyez, comme nous, que le jeu en vaut la chandelle électrique et ses pixels. Evidemment, tout soutien financier, aussi modeste soit-il, sera le bienvenu.
A part ça, tout va bien en 2006. Nous vous la souhaitons bonne et heureuse.
Bruno DA CAPO
11:25 Publié dans Numéro 1 | Lien permanent | Commentaires (0)