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14/05/2012

La bataille d’Hénin-Beaumont

 

                

 

 

 C’est décidé ! Jean-Luc Mélenchon est donc candidat à la députation d’Hénin-Beaumont, dans la 11eme circonscription  du Pas-de-Calais. Là où les socialistes, minés par les « affaires », sont fragilisés (malgré un bon score aux présidentielles) ; là où, surtout, Marine Le Pen, conseillère municipale depuis 1998,  ne cesse de gagner du terrain. La bataille qui s’annonce sera ardue et incertaine pour le leader du Front de gauche; mais elle sera aussi l’une des plus suivies de ces prochaines législatives : n’est-ce pas le plus important pour l’ambitieux tribun de la classe ouvrière ? Car au-delà des stratégies électorales, cette candidature révèle le caractère profondément irrationnel de certains choix politiques. En cela Mélenchon est un cas d’école. Il a certainement été la « révélation » de cette  campagne présidentielle. Il a porté haut et fort les valeurs séculaires de la gauche et réinventé, le premier, les grand-messes républicaines à ciel ouvert. Son verbe riche et imagé, comme son sens du théâtre, ont séduit bien des déçus et autres brebis égarées mais ne lui ont pas permis, malgré tout, d’atteindre cette fameuse troisième place qu’il briguait ouvertement. Le troisième homme fut une femme, celle-là même qu’il avait chargée de tous les maux et transformée en symbole de sa croisade anti-droitiste. Et l’on peut supposer qu’il lui en garde rancune, qu’il aspire à une revanche. Il y a du Don Quichotte en Jean-Luc Mélenchon  ou, peut-être plus encore, du capitaine Achab prêt à toutes les aventures pour traquer sa Moby-Dick, la légendaire baleine blanche. Son combat obsessionnel relève de la rivalité mimétique chère à René Girard. Tout comme Mélenchon, en effet, Marine Le Pen se veut la candidate de l’anti-système et des exclus de la république. Elle souhaite  la dissolution de la droite traditionnelle, comme il désire, malgré ses récentes concessions à la réalité,  l’échec de la gauche emmenée par François Hollande. C’est la condition nécessaire pour que l’un et l’autre – l’un est l’autre – deviennent, chacun sur leur bord respectif, les premiers violons de la vie politique française. Alors, dans l’attente de ce grand soir - peu probable -, autant commencer par ferrailler avec l’ultime adversaire et poursuivre la reconquête des opprimés sur ses terres mêmes. Pour Mélenchon, Hénin-Beaumont pourrait être le laboratoire d’une gauche unifiée sous sa férule. On verra, après, d’en découdre avec le frère ennemi. Qu’il gagne ou qu’il perde, ce sera forcément avec panache et les caméras seront là pour enregistrer ses outrances et ses bons mots. The show must go on.     

 

 

                               Bruno DA CAPO

07/05/2012

Chronique d'une victoire annoncée

 


 

 

On murmurait son nom dès dimanche après-midi dans les coulisses. Toutefois, il fallait quand même attendre 20 heures pour que son portrait et son nom s'affichent sur toutes les chaînes de télévision. François Hollande a donc remporté cette élection présidentielle avec 51,70% des voix. Il devient ainsi, à 57 ans, le 7eme président de la République (et le 24eme depuis la fondation de celle-ci). Avec lui, la Gauche revient au pouvoir par la grande porte, ce qui ne lui était plus arrivé depuis 1988. Si ses électeurs laissaient libre-cours à leur joie du côté de la Bastille, le ton de ses lieutenants – Manuel Valls et Jean-Marc Ayraud en tête – était en revanche plus pondéré sur les plateaux de télé. Pas d'arrogance dans le triomphe: il ne fallait pas refaire les erreurs du camp adverse en 2007, respecter aussi la déception de tous ceux qui ont soutenu jusqu'au bout Nicolas Sarkozy. A la Mutualité, le discours du président désavoué fut d'ailleurs d'une rare humilité, face à des militants oscillant entre la tristesse et la colère: mais le fair-play est encore la meilleur façon de sauver la face. Va-t'il se retirer de la vie politique, comme il l'a annoncé en cours de campagne? Comment l'UMP va faire face, au cours des prochaines semaines, à cette crise majeure? Ce sont des questions qui ne manqueront pas de revenir dans l'actualité de ces prochaines semaines. Quant au vainqueur du jour, c'est à Tulle, dans son fief corrézien, qu'il fit sa première déclaration présidentielle vers 21H30. Là, face à un public de fidèles, il ne dérogea pas au caractère rassembleur de sa campagne, réaffirmant son respect pour son adversaire et sa gratitude à ses électeurs, insistant sur sa volonté de faire avancer l'égalité tout en repoussant l'austérité, rappelant surtout son engagement en faveur de la justice et de la jeunesse. De belles paroles qui seront rapidement jugées à l'aune de ses actes. Car pour Hollande, les choses sérieuses ne font que commencer et il aura bien vite à prendre, dans le cadre de son programme, des décisions qui ne seront guère consensuelles – comme l'augmentation de 25% de la prochaine allocation scolaire de rentrée. Il ne faut pas, non plus, minorer les élections législatives en juin prochain, même si la majorité qui s'en dégagera devrait lui être favorable. Oui, les défis sont, pour lui, nombreux et ses faux-pas sont attendus, y compris dans son propre camp. Bonne chance quand même, monsieur le Président.

 

                                                  Bruno DA CAPO

04/05/2012

La mouche du coche et le renard

 


 

 

 

A ce qu’on dit et avec la délicatesse qu’on lui connaît bien, Sarkozy rêvait « d’exploser » Hollande. Mais il est tombé sur un bec : affûté, acéré, piquant ici et là, tout en gardant un calme presque olympien.  La mouche du coche a sorti toute sa panoplie de caïd de banlieue, traitant Hollande de « menteur » et de « petit calomniateur ». Du raffiné, comme on peut voir. Il a même glissé à la fin du débat le nom de DSK comme argument suprême, n’en ayant plus apparemment. Dommage pour lui ! A mon sens, c’est là qu’il a réellement perdu pied et donc perdu tout court. Manque de sang-froid, pugnacité de roquet mal élevé, comment croire qu’il aurait la carrure de futur président ? Car les limites de l’exercice étaient bien là pour lui : candidat, ses vieux démons de sale gosse reprenaient le dessus. Or, ce débat n’était pas tant de confronter les deux projets que de montrer qui, des deux débatteurs, avait réellement une stature présidentiable. Hollande, par sa présence calme et sa tenue, a su gagner en force et en autorité. Sa longue tirade sur le « si j’étais président » fut le moment de la rencontre. La nervosité de Sarkozy, son extrême tension finissaient par lasser. Cela dit, l’avalanche de chiffres m’a un peu saturé d’autant qu’on peut les faire parler comme on l’entend, ces chiffres ! Aux toutes dernières nouvelles on annonce un ralliement de Bayrou à Hollande, même s’il ne donne pas de consignes de vote. Sarkozy risque de manquer de voix FN puisque Marine – cette fois, c’est sûr - votera blanc. Il reste néanmoins 10% d’indécis, ce qui peut renverser la donne... On peut penser qu’Hollande l’emportera mais peut-être pas avec autant d’écart qu’on croit... Laissons les urnes parler et attendons dimanche soir 20 heures !


                                         Yves CARCHON