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09/12/2016

Bruissements (69)

 

 

Hollande : « Aujourd’hui, je suis conscient des risques que ferait courir ma démarche – la mienne – qui ne rassemblerait pas largement autour d’elle. Aussi, j’ai décidé de ne pas être candidat à l’élection présidentielle. ». C’est par ces mots que François Hollande, plus grave que jamais, a conclu son allocution télévisée, jeudi 1er  décembre, sur le perron de l’Elysée. Aussitôt l’information a tété reprise, durant toute la soirée, sur presque toutes les chaînes. Certes, on attendait sa décision, mais ce n’était pas celle-là. Pensez donc ! Une première dans l’histoire de la 5eme République, où tous les présidents en exercice ont brigué un second mandat. Elle n’a pas fait que des déçus autour de lui. Manuel Valls a pu se déclarer, quelques jours plus tard, candidat aux primaires de la Gauche (la tâche sera très rude pour lui). Et Bernard Cazeneuve s’est ainsi retrouvé  promu premier ministre pour les cinq derniers mois de ce quinquennat agité. N’en doutons pas : Hollande a fait le bon choix. Il a su, avec humilité et lucidité, opérer une sortie magistrale. De quoi faire taire autour de lui les critiques tous azimuts et rehausser sa cote de popularité auprès des Français. Libéré des pressions de la compétition, il va pouvoir ainsi assumer pleinement son rôle de président, se consacrer à ses fonctions régaliennes et jouer, çà et là, les arbitres inspirés. Peut-être même le verra-t’on réaliser quelques promesses jusque là non tenues (comme la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim) ? Bref, de quoi se faire regretter par tous ceux qui l’ont vilipendé depuis quatre ans. Car ce qui s’annonce à l’horizon est autrement plus inquiétant que le bilan qu’il va laisser.

 

Abou Dhabi : Dès le lendemain de son annonce si commentée, le président s’envolait pour la capitale des Emirats Arabes unis, où était inauguré le Louvre d’Abou Dhabi en présence de son concepteur, l’architecte Jean Nouvel. Un grand musée européen en terre arabe : voilà une bonne nouvelle et pas seulement sous l’angle diplomatique. Car sa seule concession va rapporter quatre cents millions d’euros au musée parisien éponyme sur les trente années à venir. Un autre projet d’importance attendait aussi François Hollande à Abou Dhabi, puisque une grande conférence sur le patrimoine mondial y était organisée. Conscients des menaces que font peser les guerres et le terrorisme sur les trésors de l’humanité, une quarantaine d’états et d’institutions privées se sont engagés à créer un fonds financier et un réseau de refuges dont le siège sera à Genève. Il s’agit de réunir au moins cent millions de dollars (dont trente seront versés par la France) pour financer des actions de prévention et de restauration. Dès 2017, une nouvelle conférence internationale devrait faire le point sur l’avancée de ce beau et nécessaire projet. C’est ce qu’on appelle, François, faire d’une pierre deux coups. Il y a eu certainement des voyages présidentiels moins agréables que celui-là.

 

Elections : des élections, il n’y en pas, bien sûr, qu’en France. Dimanche dernier, on votait en Europe et c’étaient deux moments très attendus. Le référendum italien, tout d’abord. Dix neuf millions d’électeurs se sont finalement prononcés contre le projet de réforme de la constitution proposé par Matteo Renzi. Tout comme David Cameron après son échec du Brexit, le jeune président du conseil italien a donc remis sa démission au président de la république Sergio Mattarella. Une nouvelle avancée du populisme anti-européen en Italie mais surtout un désaveu personnel pour Renzi qui était, ces temps-ci, un peu trop sûr de lui. (Tiens, tiens, ça ne vous rappelle rien ?). Les choses se sont mieux passées en Autriche pour le candidat écologiste Alexander Van Der Bellen qui s’est largement imposé  - 54% - sur son adversaire, le représentant de l’extrême-droite Norbert Hofer (c’est Marine qui doit être déçue). Il devient ainsi le nouveau président de la république autrichienne - au grand soulagement de Bruxelles. Rappelons que cette élection, qui s’était déroulée une première fois en mai dernier, avait été annulée pour vice de forme. Il n’y a pas que de mauvaises nouvelles pour l’Europe.

 

Commune : dans l’histoire nationale la Commune de Paris reste un grand moment révolutionnaire. Surgie après la défaite de la France contre la Prusse en 1870, elle devait jeter les bases d’un état social avant la lettre puis être impitoyablement réprimée par Thiers et les versaillais en mai 1871. On estime à vingt mille morts le nombre de leurs victimes, et c’est sans compter les  milliers de condamnés à la déportation qui suivirent. Cependant, une loi générale d’amnistie pour tous les communards devait être votée en 1880 par la Troisième République naissante. Ce n’était sans doute pas suffisant pour Patrick Bloche, le président (PS) de la commission des affaires culturelles,  puiqu’il a cru bon de faire mettre aux votes un texte réhabilitant toutes les victimes de la Commune. Celui-ci a été adopté à la majorité par l’Assemblée Nationale, mardi 29 novembre. Il n’a pourtant pas fait l’unanimité dans les rangs de la Droite. Ce qui est une preuve que, même cent quarante cinq ans après ces évènements, les lignes politiques n’ont pas beaucoup bougé dans ce pays. Mais on peut aussi penser que les députés réfractaires n’ont pas voulu avaliser l’instrumentalisation politique du passé par le présent.

 

Erik PANIZZA

25/11/2016

Bruissements (68)

 

 

 

 

Fillon : personne ne l’avait vu venir, un peu comme dans la fable de La Fontaine, « Les voleurs et l’âne». Le troisième homme, c’était donc lui. Occulté par le duel Sarkozy-Juppé, objet de tous les commentaires depuis des mois. Mais les électeurs ont, une fois de plus, fait mentir les sondeurs et, au terme d’un premier tour très suivi, François Fillon est devenu le grand gagnant de cette primaire de la Droite avec 44,1% des suffrages exprimés. Il s’est imposé, dimanche dernier,  loin devant Alain Juppé (28,6%) et surtout Nicolas Sarkozy (20,7%) dont l’élimination pourrait bien marquer la fin de sa carrière politique. Presqu’aussitôt – c’est beau les convictions – la plupart des  dirigeants  des Républicains ont prêté allégeance à ce chef imprévu. Le second tour aura bien lieu dimanche prochain, mais avec le report des voix de Sarkozy sur son ancien premier ministre, on voit mal comment Alain Juppé pourrait renverser le cours des choses en sa faveur. Reste que, pour la plupart des Français, le programme hyper-libéral de François Fillon n’est pas une bonne nouvelle : retour aux 39 heures, suppression de 500 000 emplois de fonctionnaires, relèvement de la TVA de deux points, suppression de l’impôt sur la fortune, etc…Pour peu il ferait passer celui de son adversaire pour une resucée socialiste. Au moins sa ligne politique est sans ambiguïté et la Gauche sait à quoi s’en tenir avec lui s’il devenait le candidat de la Droite à la prochaine présidentielle.

 

Hollande : peu de chefs d’état ont été aussi contestés et caricaturés que François Hollande. A vrai dire ce travail de sape a commencé quand il n’était encore que candidat – et ses compagnons du PS n’ont pas été les derniers à le ridiculiser. Il est vrai aussi que, devenu président, Hollande a maintes fois donné des verges pour se faire battre: il suffit de rappeler ici la pitoyable affaire Léonarda. Est-ce par un sursaut de sympathie pour le chef humilié ou simplement par conviction républicaine qu’un collectif de personnalité des arts et du spectacle (parmi lesquelles Catherine Deneuve, Juliette Binoche et Denis Podalydès) s’est publiquement élevé contre le « Hollande bashing », arguant que tout n’avait pas été négatif dans son quinquennat – certes – et que, de toutes les façons, il fallait respecter la fonction présidentielle. On sait que les artistes se cherchent périodiquement des causes à défendre, même si, par le passé, ils ont été moins conservateurs. Cette déclaration a surpris tout le monde, à commencer par Jean-François Cambadélis, premier secrétaire du PS, même s’il a vite saisi cette aubaine. On ne sait pas encore si cet élan pro-présidentiel s’avèrera providentiel pour le président-candidat. Au fait, n’y a-t-il pas un mot en Français pour signifier la même chose que « bashing » ?

 

 

Merkel : une, au moins, que rien n’arrête, c’est bien Angela Merkel. A 65 ans et après onze années passées à la tête du plus puissant état d’Europe, la chancelière allemande a annoncé son intention de briguer un quatrième mandat consécutif, l’année prochaine. Une candidature stratégique car ainsi « Mutter » entend bien barrer la route au populisme grandissant outre-Rhin ; et aussi redorer le blason de son parti, la CDU. Si elle était élue une nouvelle fois, elle égalerait ainsi le record détenu par son ancien mentor Helmut Kohl : seize ans, entre 1982 et 1998.

 

Tabac : après les prostituées, ce sont les buralistes qui sont maintenant dans le collimateur de l’état français. Il est vrai que leur profession est autrement plus dangereuse pour la santé. Avec 80 000 décès par an, le tabac reste l’une des principales causes de mortalité en France. Ce qui n’empêche pas un tiers de nos concitoyens – dont beaucoup de jeunes - de continuer à fumer. Avec la création du paquet neutre, distribué depuis le 21 novembre, Marisol Touraine espère bien faire baisser un peu leur nombre. Partant du principe que le design et la marque des cigarettes sont de puissants incitateurs  à leur consommation, on a misé ici sur la laideur du produit. Les  emballages sont noirs et vert de gris, le nom des marques y est caché et des images d’organes malades accompagnent le sempiternel rappel que « fumer tue ». Pas de quoi se la jouer cool, en effet, même si le prix du paquet reste  bloqué autour de 7 euros. Une dépense encore trop faible, pas assez prohibitive pour les fumeurs, selon les experts. Et de rappeler qu’en Australie, pays-phare de cette expérience, le paquet coûte l’équivalent de 16 euros. Il n’empêche : dès le 1er janvier prochain, tous les paquets traditionnels devraient disparaître des circuits de ventes. Toute l’industrie du tabac est évidemment vent debout contre cette mesure. Mais on aurait tort, pour la santé publique, de l’abandonner, comme d’autres avant elle.

 

Erik PANIZZA    

21/10/2016

Bruissements (67)

 

 

 

Hollande : l’affaire de l’insulte à la magistrature restera sans doute comme l’une des plus lamentables du quinquennat Hollande (qui n’en manque pas). Voilà un président - au plus bas dans les sondages -  qui entreprend, moins d’un an avant la fin de son mandat, de se raconter complaisamment à des journalistes toujours avides de confidences. Et qui en vient à leur dire ce qu’il a sur le cœur, évidemment. Si jamais un livre a été bien nommé, c’est bien ce « Un président ne devrait jamais dire ça ». Si jamais un livre vient trop tôt, aussi, c’est bien celui-là. Car si on peut imaginer qu’un ex-président exprime sa rancœur vis-à-vis de son entourage politique, voire envers les institutions, on ne le comprend pas de la part d’un président encore en exercice, candidat potentiel à sa propre succession. Taxer de lâcheté la magistrature n’est pas qu’une parole primesautière, c’est aussi un manque absolu de tact politique vis-à-vis d’un grand corps d’état qui a déjà été diffamé par Sarkozy lorsqu’il était à l’Elysée et qui est, en grande partie, acquis à la Gauche. On sait, d’autre part, que les magistrats peuvent être impitoyables avec des hommes politiques qui leur prêtent un peu trop le flanc. Depuis Hollande a essayé de justifier ses propos dans une lettre publique, osant même dire que ce n’était pas là le fond de sa pensée. Pitoyables attitudes que la palinodie et l’excuse lorsqu’elles viennent d’un chef d’état. Après avoir encaissé le choc, les magistrats se sont un peu apaisés, mais ils n’en pensent pas moins. Dans l’entourage du président, beaucoup ont été interloqués par ce comportement d’échec. En langage populaire, cela s’appelle scier la branche sur laquelle on est assis. Ou se tirer une balle dans le pied.

 

Royal : Un dérapage en entraine souvent un autre. Lundi dernier, c’est Ségolène Royal qui a ouvertement critiqué la poursuite des travaux de construction de l’aéroport de Notre Dame des Landes. En exprimant son désaccord vis-à-vis  d’un projet entériné par le gouvernement auquel elle participe, elle sort de son devoir de réserve. Il est vrai que ce n’est pas la première fois que la ministre de l’écologie se trouve en contradiction avec le chef de l’exécutif, lui qui ne s’est pas privé de retoquer ses mesures en faveur de l’environnement. Y aurait-il une visée électorale derrière ses propos ? Dans ce cas, nous le saurons assez vite.

 

Manif : il y avait quelques temps qu’ils n’avaient pas fait parler d’eux, les coincés et les bourges de la manif pour tous. Dimanche dernier, à Paris, ils ont rompu le silence, revenant avec insistance sur leur rejet de ces nouvelles formes de maternité que sont la PMA et la GPA. Dans leur collimateur les nombreux couples gays qui y recourent de plus en plus. Belle leçon d’intolérance. Certes, ces pratiques peuvent choquer des consciences enracinées dans le confort d’une tradition. Mais comment ne pas voir qu’elles sont portées par un mouvement irréversible ? Que la vie, avec ses joies et ses souffrances, n’en continuera pas moins pour ceux qui naitront avec deux pères ou deux mères ? Et ce ne sont pas quelques défilés protestataires qui empêcheront cette évolution sociétale : même avec le soutien de politiciens aussi influents que Nicolas Dupont-Aignant ou Jean-Frédéric Poisson. 

 

Police : La récente affaire de Viry-Châtillon (Essonne) et le quasi-lynchage de deux  policiers en patrouille par une bande de dealers a fait éclater un malaise déjà sensible dans la police française. Depuis, les policiers manifestent, de jour comme de nuit, à Paris comme en province, criant à tous leur ras-le-bol, semblables aux représentants des autres corporations qu’ils surveillaient encore naguère. Ils en ont marre de la surcharge de travail entrainée par l’état d’urgence, marre d’être pris pour cibles au sens propre comme au figuré, marre du laxisme de la justice vis-à-vis des criminels, marre du manque de soutien de leur ministre de tutelle. Que veulent-ils en retour ? Plus de moyens et d’effectifs pour accomplir leurs missions, plus de souplesse juridique dans le port et l’usage de leurs armes aussi (il y a de la bavure dans l’air). Du coup, ils intéressent les formations politiques qui cherchent à se rapprocher d’eux et à instrumentaliser leur colère. D’ores et déjà, l’état a débloqué un milliard d’euros supplémentaire pour la sécurité. L’époque des suppressions massives de postes chères à Sarkozy est bel et bien révolue dans ce secteur. Aucun président, en 2017, ne pourra plus faire d’économies sur leur dos.

 

 

Erik PANIZZA

15:24 Publié dans numéro 16 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : hollande, royal, manif, police