21/03/2012
Sous le choc
Le carnage perpétré dans l’école juive de Toulouse a comme réveillé les vieilles peurs. Après trois militaires flingués par l’homme au scooter noir, trois jeunes enfants qui n’avaient d’autre tort que d’aller à l’école. Aujourd’hui, à l’heure où j’écris, l’auteur présumé de ces actes déments serait débusqué et cerné. Il se proclamerait disciple d’Al Qaïda. Ancien militaire en Afghanistan, il aurait des comptes à régler avec les exactions commises par les Israéliens sur des enfants palestiniens. Retranché dans un pavillon, il ne veut pas se rendre. On peut penser, s’il est vraiment endoctriné, qu’il tentera le tout pour le tout pour mourir en martyr car le suicide est interdit chez tous les Musulmans et donc chez tous les islamistes. La tension est palpable. Les corps des jeunes enfants rapatriés en Israël, l’inhumation des corps de nos soldats à Montauban aujourd’hui même. Et une campagne électorale en rade, au moins pour deux, trois jours. Oui, mais après ? Le thème de l’insécurité risque de revenir en force dans la campagne. On peut déjà parier qu’il sera savamment exploité par Marine Le Pen et une partie de l’UMP. Sarkozy osera-t-il monter ce cheval de bataille ? Un autre thème, celui de la nécessité de la présence de nos soldats sur le sol afghan, ne manquera sans doute pas d’encombrer nos journaux. Avec un arrière-fond violent, brutal, irraisonné qui donnera une teinte rouge sang à nos débats.
Yves CARCHON
14:28 Publié dans numéro 9 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : toulouse, montauban, israël, martyr
19/03/2012
Variations sur le mot « race »
Réunion plutôt houleuse, mardi 13 mars, sur le plateau de « Ce soir ou jamais », l’émission hebdomadaire de Frédéric Taddéi. L’animateur y recevait, entre autres invités, l’ex footballeur Lilian Thuram et la journaliste Elisabeth Lévy pour commenter une récente affirmation de François Hollande – selon laquelle le mot « race » doit disparaître de notre Constitution. La directrice de « Causeur », on le sait, est prompte à la répartie: c’est même ce que l’on apprécie chez elle. Mais prendre à la lettre la proposition – manifestement au second degré – du candidat socialiste montre, une fois de plus, que l’on a souvent les défauts de ses qualités ; et que la parole, chez elle, est plus rapide que la pensée. Car qui pourrait vouloir, rationnellement, supprimer du lexique un mot aussi fondamental que le mot « race » ? Qui pourrait d’ailleurs croire qu’en le supprimant, on pourrait supprimer avec lui le racisme ? Face à elle, l’auteur de « Mes étoiles noires » s’efforçait de camper sur sa position angélique. Selon Lilian Thuram, il n’y aurait tout simplement pas de races chez les hommes, ou plutôt il n’y en aurait qu’une : la race humaine. Si Elisabeth Lévy avait beau jeu de le tacler sur sa double postulation – ses références à la négritude et sa croisade anti-raciste -, il est quand même affligeant qu’elle ait pu, soumise à la question par son interlocuteur, entériner une thèse aussi ingénue. Dire qu’il n’y a « que la race humaine » relève, en soi, d’une confusion entre race et espèce. Quiconque s’est penché sur ce sujet avec un minimum d’ exigence scientifique sait qu’il y a trois groupes humains : la race jaune ou mongoloïde, la race noire ou africanoïde et la race blanche ou circo-caucasienne. Pas question ici de confondre race et ethnie ou de nier la part immémoriale du métissage dans cette approche de l’humanité. Il n’y a pas de race pure, c’est entendu, mais il y a néanmoins des différences (biologiques, morphologiques) qui font que l’ont peut parler sans fausse honte de « race » à propos de ces trois principaux groupes humains. Le racisme consiste – c’est sa mauvaise foi profonde – à les hiérarchiser, au bénéfice bien entendu de la race blanche. Aucun esprit éduqué ne doit logiquement céder à cette tentation. Mais aucun esprit éduqué ne doit, non plus, avaliser ce catéchisme abêtissant du « politiquement correct » qui ne sert, finalement, qu’à donner du grain à moudre aux ennemis de la démocratie.
Bruno DA CAPO
17:44 Publié dans numéro 9 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : thuram, lévy, race, lexique
15/03/2012
Bruissements (5)
Bayonne : Nicolas Sarkozy pensait-il déguster une tranche du fameux jambon en se rendant à Bayonne, le 1er mars dernier ? Hélas pour lui, la saison était plutôt aux œufs brouillés - ceux lancés directement sur sa voiture avec force sifflets et lazzis. Il faut dire que le comité d’accueil, composé en grande partie de séparatistes basques, n’était pas, cette fois, à sa botte. Et son état-major – NKM en tête – d’accuser les socialistes d’avoir ourdi cet attentat contre sa royale personne. Comme si François Hollande avait accusé l’UMP d’avoir commandité son enfarinement à Lille, le mois d’avant. Comme si le locataire de l’Elysée, malgré ce qu’il peut déclarer, vivait depuis cinq ans une histoire d’amour sans nuages avec la France.
Adoubement : quand les soutiens manquent chez soi, pourquoi ne pas aller les chercher à l’étranger ? C’est ce qu’a fait notre cher président en appelant à la rescousse tout ce que l’Europe compte en dirigeants droitistes, d’Angela Merkel à David Cameron. Une façon de se faire adouber, par ces temps de fédéralisme européen, ou un simple aveu de faiblesse ? Seulement ces chefs de gouvernement sont aussi les représentants d’une majorité politique et, à ce titre-là, ils ne peuvent avoir le statut de sages. D’autre part, ils ne représentent pas, bien sûr, la seule politique possible en Europe. Leur prise de position en faveur de Sarkozy est parfaitement illégitime. François Hollande a eu beau jeu de rappeler que cette élection présidentielle est d’abord celle du peuple français. Et celui-ci, moins que jamais, n’a pas l’intention de se la faire confisquer par des instances extra-nationales.
Humilité : une autre astuce présidentielle est de changer, comme on dit, son fusil d’épaule. Oubliées les déclarations fracassantes et volontaristes de sa campagne de 2007 ; voici venu le temps de la repentance et de l’humilité, du moins devant les caméras. Pour peu il se ferait passer pour le protecteur des plus pauvres. Il aimerait bien apparaître aux yeux des Français comme ce président du peuple, ne songeant qu’aux intérêts de la France, sacrifiant sa vie personnelle pour elle. Le loup perd ses poils mais pas ses vices. Et les Français – peuple de sceptiques s’il en est – ne risquent guère d’être dupes de ses véritables intentions, même s’ils apprécient certainement sa performance de comédien. Sarkozy est allé jusqu’à réaffirmer que, dans le cas où il serait désavoué par les urnes, il abandonnerait la vie politique. Souhaitons qu’il tienne au moins cette promesse dans le cas – probable – où cette hypothèse se réaliserait bientôt. Pour le bien, sinon de la France, du moins des Français. Et peut-être aussi pour son bien propre….
Divisions et convergence : il y a des déclarations politiques qui ne manquent pas de saveur. C’est ainsi que ces jours-ci, quelques ténors de l’UMP ont accusé les médias d’être partisans – au profit de François Hollande. Selon eux, journaux et télés n’en n’auraient que pour le candidat socialiste (qui baisse malgré tout dans les sondages), négligeant de répercuter la seule parole qui vaille, c'est-à-dire celle de leur champion. Comme si Nicolas Sarkozy n’avait pas les moyens de se faire entendre quand il le souhaitait. Pour mieux diviser le camp de gauche, on ressort une vidéo vieille de quinze ans où Mélenchon critique Hollande. La belle affaire ! C’est mesquin et signe, à l’évidence, d’un certain désarroi à droite. Heureusement qu’il y a, au moins, une proposition qui fait l’unanimité de l’extrême gauche à l’extrême droite : celle de taxer plus lourdement les évadés fiscaux. Peut-être un début de « mélenchonisation des esprits », selon le mot goguenard du leader du Front de Gauche.
Homs : correspondante en Syrie du Figaro, Edith Bouvier n’aura pas connu la triste fin de Gilles Jacquier et de Rémi Ochlik : tant mieux ! Blessée à la jambe, la journaliste a pu, après maintes tractations, être évacuée de la ville martyre de Homs et ramenée dans notre douce France. A ceux qui se demanderaient ce qu’elle était allée faire dans cet enfer syrien, il n’y a qu’une réponse à fournir : son métier. Et si à quelque chose malheur est bon, ces victimes occidentales aideront peut-être à l’accroissement des sanctions internationales – voire à une intervention militaire – contre le boucher de Damas.
Erik PANIZZA
17:06 Publié dans numéro 9 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bayonne, adoubement, convergence, homs