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13/08/2013

L’autre pouvoir

 

                        

 

 

La récente condamnation de Berlusconi – pour fraude fiscale – par la justice italienne s’inscrit dans la longue liste des « affaires » qui empoisonnent la vie publique, en Italie comme en France. Elle n’en est pas moins importante au regard des questions qu’elle soulève pour nos démocraties. On peut tout d’abord en pointer les limites, sinon les faiblesses : cette nouvelle condamnation - à un an de prison ferme – n’enverra pas « il Cavalière » derrière les barreaux, pas plus que les précédents jugements rendus à son encontre. Tout au plus sera-t’il assigné à résidence durant ce temps, car sa fortune, sa réputation et son âge jouent forcément en sa faveur. Certes, on peut trouver scandaleuse une justice à deux vitesses qui, tout en les condamnant, ne sanctionne pas trop lourdement les puissants. Constatons quand même que la justice est passée, qu’elle est encore vivace dans nos pays et que cela reste la preuve de son indépendance vis-à-vis du pouvoir politique. Précisément elle constitue, vis-à-vis de celui-ci,  un contre-pouvoir qui est encore le plus sûr garant des valeurs républicaines et des libertés citoyennes. C’est parce qu’il y a, dans nos pays, une justice indépendante, une justice qui n’est pas à la botte du politique – comme dans les états totalitaires – qu’aucun gouvernement ne peut avoir les pleins pouvoirs et les exercer à son profit. Cette situation inscrite dans notre constitution (en France, le président de la république est, de fait, le garant de l’indépendance de la justice) n’en agace pas moins nos dirigeants, quelquefois. Parvenus au pouvoir, ils voudraient avoir les coudées plus franches et ne pas être astreints à rendre toujours des comptes sur leur usage de l’argent public. D’où des pressions vis-à-vis des juges et des tentatives de modifier les fondements de la justice présentées comme des réformes.  Il suffit de se rappeler des affrontements avec la magistrature qui ont marqué le début du quinquennat de Nicolas Sarkozy, notamment la polémique sur la suppression des juges d’instruction. Pensait-il alors qu’il pourrait un jour se retrouver face à eux ? La grande peur des hommes politiques français, tous partis confondus, c’est une opération judiciaire comparable à celle de « Mani pulite », voici une vingtaine d’années, de l’autre côté des Alpes. C’est aussi, en ce domaine, la supériorité de l’Italie sur la France.

 

 

                     Bruno DA CAPO

14/12/2012

Dès que l’argent règle le Droit...

 


Drôle de justice que la justice américaine ! L’affaire DSK a fini par trouver son épilogue. Mais quel épilogue ? Mi-figue, mi- raison. Les avocats des deux parties ont trouvé un accord, nous dit-on, qui se chiffre en millions... Avec l’argent, on peut donc laver son honneur ou en tout cas mettre un terme aux poursuites dont on est l’objet... Le doute subsiste évidemment puisque les deux parties toujours ont décidé qu’il n’y aura pas de procès. Il est vrai qu’aucune preuve (c’est en tout cas ce qu’on nous dit) n’est là pour inculper l’éventuel coupable... La victime présumée, elle, en acceptant l’accord passé peut inciter toute personne qui a suivi l’affaire à reconsidérer sa plainte et à se demander si elle fut bien victime... Rien n’est donc sain dans cette affaire. Dès que l’argent règle le Droit, on peut dire à tout coup qu’on se moque bien de la Justice. Etranges pratiques judiciaires américaines qui consistent avant tout à trouver un terrain d’entente entre les parties, et non à dire, chercher vraiment la vérité sur une affaire qui défraya toutes les gazettes du monde occidental. On peut imaginer que l’avenir de notre femme de chambre va s’en trouver changé et bonifié. Pour DSK, son avenir est derrière lui et quelles que soient les conférences qu’il donnera, son nom restera à jamais entaché par cette étrange affaire. Je ne peux m’empêcher de penser à ce Journal d’une femme de chambre d’Octave Mirbeau que DSK devrait relire et avec lui, bien sûr, tous ses (anciens ?) amis, je veux parler des socialistes... pardon des socio-démocrates qui ne savent plus ce qu’est la lutte des classes.

 

                                                              Yves CARCHON

26/07/2012

Bruissements (8)

 

 


 

Heures sup : parmi toutes les mesures prises durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, la loi de défiscalisation des heures supplémentaires était sans doute la plus emblématique  de sa politique  économique. Elle  complétait son fameux slogan de campagne « travailler plus pour gagner plus » et devait, selon lui, permettre aux travailleurs les plus volontaires d’augmenter leur niveau de vie : même Jean-François Copé en aurait bénéficié, ce qui est tout dire. Mais outre que ces heures supplémentaires furent assez chichement distribuées aux salariés, elles  ne favorisèrent pas l’embauche de chômeurs. On estime ainsi à 300 000 le nombre d’emplois qui n’ont pas été créés durant cette période. Comme la loi sur la TVA sociale, abrogée un peu plus tard, l’Assemblée Nationale est donc revenue sur cette mesure phare du précédent gouvernement,  lors d’une séance particulièrement houleuse, le 16 juillet dernier, votant sa suppression  à 89 voix pour contre 64 voix contre. Dès le 1er septembre prochain, les exonérations de cotisations patronales et salariales sur les heures supplémentaires seront donc supprimées. Seules les entreprises de moins de 20 salariés pourront continuer à bénéficier des exonérations de charges patronales, aidées par l’Etat à hauteur de 350 millions d’euros. Si l’Etat devrait ainsi réaliser un bénéfice de plus de 4 milliards d’euros, on ne sait pas encore dans quelles  proportions tout cela va profiter aux travailleurs. On attend impatiemment la suite de ce programme.

 

Justice: au chapitre de l'abolition des privilèges républicains, un autre proposition de François Hollande vise la Cour de Justice de la République et sa possible suppression d'ici la fin de son quinquennat. Cette juridiction exceptionnelle - qui, autrefois, jugeait le crime de haute trahison - concerne présentement les manquements des ministres durant l'exercice de leurs fonctions. Elle est composée de 3 magistrats, 6 députés et 6 sénateurs. Mais voilà, les procédures seraient trop longues, trop clémentes et, comme on s'en doute un peu, entachées de partialité. Un vieil habitué de cette vénérable institution comme Charles Pasqua en sait sûrement quelque chose. Les ministres redeviendraient ainsi des justiciables comme les autres. L'idée n'est pas pour déplaire à l'actuelle majorité et, en particulier, à Noël Mamère. Elle suscite davantage de réticences dans les rangs de l'opposition. Il faut dire qu'Eric Woerth, avec l'affaire de l'hippodrome de Vincennes, et Christine Lagarde avec l'affaire Tapie, pourraient en faire prochainement les frais.

 

Vel d'Hiv: lors de son discours, dimancher dernier, pour la commémoration des 70 ans de la grande rafle du Vel d'hiv, François Hollande a rappelé l'entière responsabilité de la France dans ce qui restera l'un des sommets de l'antisémitisme durant l'Occupation. Ce disant, il ne faisait que s'inscrire dans la mouvance de Jacques Chirac qui, le premier en 1995, avait fait acte de contrition nationale. Les critiques, évidemment, n'ont pas manqué de fuser tant dans son camp, avec Chevènement qui soulignait à juste titre le poids des consignes nazies dans cette affaire, que dans l'opposition où l'on prend à la moindre occasion la pause gaulliste. Le pompeux Henri Guaino y est allé de sa tirade indignée, disant ne pas se reconnaitre dans cette France de "vichystes apeurés". Outre qu'on ne lui demandait pas son avis, il est toujours facile de se déclarer potentiellement résistant quand on n'a pas, comme lui, été confronté à ces affres de l'Histoire. Reste que l'imaginaire des deux Frances a la vie dure. Et que chacune prétend à la Vérité exclusive.

 

Damas: d'ailleurs, il y a bien longtemps que l'héroisme a déserté notre territoire pour aller s'illustrer dans d'autres contrées. Comme en Syrie, par exemple, où les forces de libération progressent, malgré de faibles moyens militaires et une répression féroce - plus de 15 000 morts depuis le début de la guerre civile. Beaucoup de Syriens cherchent à gagner la Turquie et les désertions des militaires sont quasi quotidiennes à présent. Un peu partout, les bombardements et les combats s'intensifient. Loin de se limiter à Homs et à Alep, ils touchent maintenant Damas, centre névralgique du pouvoir. Les dirigeants du parti Bass, Bachar El Assad en tête, savent maintenant qu'ils ne sont plus à l'abri depuis qu'un attentat a tué quatre des leurs, mercredi 18 juillet. Parmi eux se trouvait le sanguinaire Daouh Rajah, ministre de la Défense et c'est, en soi, tout un symbole. On parle d'une piste turque, mais Assad n'a pas que des ennemis dans ce pays. L'Arabie Saoudite et le Qatar, en particulier, verraient d'un oeil plutôt favorable son élimination. Car il faudra, un jour ou l'autre, qu'il réponde des crimes commis contre son peuple. Et que ses protecteurs sur la scène internationale, à commencer par la Chine et la Russie, fassent, eux aussi, leur chemin de Damas. 

 

J.O: décidément, l'Angleterre entend rester, durant toute cette année 2012, sous les feux de l'actualité.Après le jubilé de la reine en mai et la victoire, dimanche dernier, de Bradley Wiggins dans le Tour de France, ce sont les Jeux Olympiques qui vont maintenant mettre Londres à l'honneur. Pour accueillir les 10 490 athlètes qui vont concourir dans 302 épreuves et 26 disciplines sportives, le budget du comité d'organisation atteint maintenant 9,3 milliards de livres (11,6 milliards d'euros). C'est peu au regard des 42 milliards d'euros dépensés par la Chine en 2008, mais c'est quand même quatre fois plus que les estimations de 2005. Les Britanniques ont vu grand en émettant 11 millions de billets d'entrée (dont 6,6 millions seulement pour eux-mêmes) quand seulement 2 millions de visiteurs sont attendus. Ils auront sans doute du mal pour se loger à bon prix mais pas pour se restaurer. Toujours à l'affut des bons coups, Mac Donalds a installé, sur le site olympique même, le plus grand de ses restaurants dans le monde. Il compte ainsi vendre 50 000 Big Macs, 180 000 portions de frites et 30 000 milkshakes. Pas très diététique, tout ça. Mais au pays du libre échange, il ne faut pas s'en étonner, même dans ce cadre-ci. 

                                              


                                 Erik PANIZZA