18/12/2012
Newtown : les larmes d’Obama
L’Amérique encore et toujours... Pour nous Européens, ce fut longtemps un mythe, la terre où les émigrants en grand nombre cherchaient l’Eldorado. Les westerns nous ont raconté leur héroïque geste, leur installation dans des sites grandioses et pas toujours très accueillants... N’empêche : nous en avons rêvé. Evidemment, en cette préhistoire américaine, la Loi et l’Ordre ne pouvaient réellement triompher sans colts ou winchesters... Aujourd’hui, porter une arme aux USA est non seulement un droit mais un devoir. Le principe est inscrit (à jamais ?) dans le marbre impavide de la Constitution américaine. De plus, une arme dans de nombreux Etats est garante de sa propre sécurité, celle de sa famille, de son village, de sa ville. Elle constitue pour ainsi dire un membre supplémentaire dans le corpus américain. Légiférer contre le port d’armes en Amérique, c’est un peu comme si en France on s’attaquait à la liberté de pensée... Nos frères américains sont arrimés à leur panoplie d’armes comme nous sommes attachés presque intrinsèquement à devoir dire ce que l’on pense. Difficile donc pour Obama de réduire la vente d’armes ou en tout cas de l’encadrer avec des règles plus contraignantes. Le moment semble pourtant choisi après la tragédie de Newtown. De voir toutes ces images de gosses qui souriaient encore il y a peu sur leurs photos de classe glace le sang. Obama, il le sait, ne peut plus s’en tenir à exprimer uniquement sa compassion envers ces si petites et si nombreuses victimes. Il lui faut faire bien plus. Le pourra-t-il ? On sait que le lobby des armes finance le parti républicain et qu’à ce titre le Président américain se heurtera à une puissante opposition. Pour son deuxième mandat, ce serait un fleuron à mettre à son actif. Mais aura-t-il l’appui qui lui est nécessaire pour accomplir pareil travail d’Hercule, y compris parmi ses amis démocrates qui se disent être progressistes ?
Yves CARCHON
19:18 Publié dans numéro 10 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : newtown, amérique, victimes, lobby des armes
14/12/2012
Dès que l’argent règle le Droit...
Drôle de justice que la justice américaine ! L’affaire DSK a fini par trouver son épilogue. Mais quel épilogue ? Mi-figue, mi- raison. Les avocats des deux parties ont trouvé un accord, nous dit-on, qui se chiffre en millions... Avec l’argent, on peut donc laver son honneur ou en tout cas mettre un terme aux poursuites dont on est l’objet... Le doute subsiste évidemment puisque les deux parties toujours ont décidé qu’il n’y aura pas de procès. Il est vrai qu’aucune preuve (c’est en tout cas ce qu’on nous dit) n’est là pour inculper l’éventuel coupable... La victime présumée, elle, en acceptant l’accord passé peut inciter toute personne qui a suivi l’affaire à reconsidérer sa plainte et à se demander si elle fut bien victime... Rien n’est donc sain dans cette affaire. Dès que l’argent règle le Droit, on peut dire à tout coup qu’on se moque bien de la Justice. Etranges pratiques judiciaires américaines qui consistent avant tout à trouver un terrain d’entente entre les parties, et non à dire, chercher vraiment la vérité sur une affaire qui défraya toutes les gazettes du monde occidental. On peut imaginer que l’avenir de notre femme de chambre va s’en trouver changé et bonifié. Pour DSK, son avenir est derrière lui et quelles que soient les conférences qu’il donnera, son nom restera à jamais entaché par cette étrange affaire. Je ne peux m’empêcher de penser à ce Journal d’une femme de chambre d’Octave Mirbeau que DSK devrait relire et avec lui, bien sûr, tous ses (anciens ?) amis, je veux parler des socialistes... pardon des socio-démocrates qui ne savent plus ce qu’est la lutte des classes.
Yves CARCHON
14:30 Publié dans numéro 10 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : justice, dsk, femme de chambre, mirbeau
10/12/2012
Faux héros
Le 14 octobre dernier, l’Autrichien Félix Baumgartner réalisait un saut en parachute de 39 000 mètres – dont 36 000 en chute libre -, devenant ainsi le premier homme à avoir franchi le mur du son. Plus récemment, le 2 novembre, le Français Pierre-Michael Micaletti a pédalé sur un vélo d’entrainement 48 heures sans dormir. L’un et l’autre ont, bien sûr, leur place désormais dans le célébrissime Guinness Book », le livre des records.
Ces records-là – on pourrait en citer bien d’autres – trahissent néanmoins un certain malaise. Ils sont caractéristiques d’une époque qui s’ennuie dans son confort matériel. Depuis près de soixante-dix ans, il n’y a plus de grande guerre sur notre continent - et qui pourrait le regretter ? Mais il n’y a plus ainsi, pour de nombreux jeunes gens, des occasions réelles de mettre à l’épreuve leur courage et leur force. Alors, certains s’inventent des défis qui visent tous à repousser les limites de l’humain et s’activent à le faire savoir. Leurs motivations sont prétendument scientifiques, mais elles cachent mal le désir de porter leur nom au pinacle. Car ces défis sensationnels, quoiqu’on en dise, ne servent pas la cause de la science – sinon celle, pataphysicienne, des exceptions. La vie, en effet, ne pousse personne à de pareilles extrémités. Elle n’exige pas de telles performances, de telles hauteurs pour se développer et se perpétuer. Non, ces défis n’apportent rien à l’humanité (à laquelle appartiennent malgré tout ces « surhommes »), sinon qu’un peu de rêve médiatique. Bref, ils ne font ni progresser la science ni reculer la misère et, en cela, ils ne relèvent pas de l’héroïsme mais bien d’une forme de pathologie mentale. Car l’héroïsme, qui est oubli de soi dans une action périlleuse, s’accomplit toujours au bénéfice des autres. De surcroît l’héroïsme, réaction circonstancielle dans une situation de péril ou d’urgence, n’est heureusement pas programmable. On devient un héros presque malgré soi. De vrais héros, il y en a en encore dans notre monde, en Egypte, en Syrie, en Iran ou en Palestine ; des hommes et des femmes qui agissent anonymement pour leur peuple, mettant chaque jour ou presque leur existence en péril. Mais il y a bien peu de chances que leurs noms et leurs visages fassent un jour la une des médias. Dont la perversion est sans doute d’accorder tant d’importance à quelques égos hypertrophiés, quand ils ne mériteraient que l’indifférence générale.
Jacques LUCCHESI
15:05 Publié dans numéro 10 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chute libre, baumgartner, micaletti, héroïsme