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06/06/2011

La Porte du Soleil



Quelque chose se profile sur la grande place de la Puerta del Sol à Madrid. Un mouvement embryonnaire né d’un ras-le-bol social. Des groupes d’hommes et de femmes, jeunes pour la plupart, semblent redécouvrir les saines vertus de l’agora antique. Ce sont, pour la plupart, des citoyens et citoyennes victimes de la crise espagnole qui manifestent et interpellent le pouvoir politique en soulevant le voile sur la réalité sociale de leurs pays. Ils ne sont pas organisés, se rassemblent chaque jour, ne sont d’aucun parti, ni d’aucune obédience. Ils mettent en forme pour ainsi dire le pourquoi du malaise qui les ronge. On peut gager, comme au bon temps des Etats Généraux, qu’ils ouvriront bientôt ce qu’à l’époque on appela : cahiers de doléances. On peut penser aussi que ce malaise qui les pousse à agir n’est pas uniquement social. C’est le rapport entre pouvoir et citoyens qui pose problème. Cet exercice direct de la démocratie est à mon sens le meilleur. Nous ferions bien de nous en inspirer. Il y a deux jours, une affichette sur les murs toulousains, signée les Indignés, nous invitait à investir la place du Capitole à dix-neuf heures. Depuis, des rassemblements d’Indignés ont lieu à Paris, à Lisbonne, à Barcelone et à Athènes. Ce qui est sûr, en Espagne comme ailleurs, c’est que la représentation démocratique est mise en cause et que les peuples ne se reconnaissent plus dans les élites qui les dirigent. L’Europe et tous ses dirigeants, même s’ils sont élus, semblent coupés de la base. Mais l’Europe a bon dos. C’est bien dans notre pratique démocratique qu’il faut revoir les choses au risque de faire le lit des populismes qui gagnent du terrain. « Il faut vivre indigné » clamait Emile Zola. Stephan Essel et son petit ouvrage a repris la formule. Il semblerait qu’ils aient fait des petits. Tant mieux ! Comme on chantait dans Hair jadis : « Laissons, laissons/Entrer le soleil ! », la Porte du Soleil paraît toute indiquée pour lancer ce programme !

                                 

                                               Yves CARCHON

03/06/2011

La Boîte de Pandore






A-t-il fallu que le puritanisme d’outre-Atlantique soulève le lièvre DSK pour que  la boîte de Pandore s’ouvre brutalement sur les coulisses peu ragoûtantes de notre monde politique bien franchouillard ? On pourrait le penser. Qu’une femme de chambre, par son courage, ait osé porter plainte renvoie à l’évidence une pâle image de soi à celles qui, harcelées voire agressées chez nous, ont eu peur de le faire. C’est le cas d’une des victimes supposées dans l’affaire Tron qui, dans une interview, affirme que ce qui s’est passé au Sofitel de New York a pour beaucoup libéré sa parole. Du coup, des femmes journalistes et surtout nos élues ont témoigné du machisme ordinaire et grossier, pour ne pas dire de la goujaterie de leurs homologues masculins dans l’enceinte même de l’Assemblée et du Sénat. Triste retour de manivelle, triste constat pour ma génération qui a accompagné et appuyé le mouvement féministe, mais ce cruel constat a au moins le mérite de démontrer (s’il en était besoin) que le sexisme a cours au plus haut sommet de l’Etat et qu’il serait grand temps d’y remédier. On sait depuis longtemps que sexe et politique ont de tous temps entretenu des liens pervers. On sait aussi qu’il est de bon aloi en France d’en minimiser l’accointance. Jusqu’à quel point ? Tant qu’il s’agit d’affaires d’alcôve, d’échangisme, de fréquentations assidues chez les Dames de l’art, je n’y vois pas problème. Quand il s’agit, comme Luc Ferry l’affirme, d’actes pédophiliques qui auraient été perpétrés par un ministre de la République à Marrakech, voilà qui n’est plus admissible. Le libre-échangisme entre adultes consentants ne tombe pas sous le coup de la loi, dont acte. Mais la pédophilie est condamnée pénalement et celui qui s’y livre – puissant ou non – encourt une lourde peine. Ce qui est gravissime dans l’affaire Ferry, c’est que le philosophe nous dit que le pitoyable ministre a manifestement été couvert par le pouvoir en place et qu’à ce titre ce pouvoir est lui aussi coupable d’avoir tu l’acte condamnable. S’il s’avérait dans les jours à venir que les choses se confirment et que des preuves, des témoignages soient apportés (pourquoi diable Ferry se serait-il lancé dans cette galère ?), il y a fort à parier que nous ayons affaire à une affaire d’Etat. Du Sofitel et en passant par de curieuses séances de réflexologie, nous voilà arrivés à ce qui a tout lieu de bousculer la donne des présidentielles en 2012 : un PS grandement sonné par le cas DSK, l’UMP et le gouvernement franchement écornés par les pratiques du ministre Tron, l’exécutif carbonisé si cette affaire Ferry prend son essor. Autrement dit, autant de bulletins de vote portés sur un plateau d’argent pour le FN !


Yves CARCHON

17:44 Publié dans numéro 20 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : puritanisme, tron, ferry, fn

19/05/2011

Dominique Strauss-Kahn : dans l’œil du cyclone


 

 

 

 Il y avait eu, voici dix jours, l’affaire de la Porsche puis celle des costumes à 35 000 $. Rien de particulièrement exemplaire pour un probable candidat socialiste à la présidentielle de 2012 ; rien de particulièrement compromettant, non plus. Avec l’inculpation pour tentative de viol qui pèse sur DSK depuis dimanche dernier, on est dans un tout autre registre de gravité. La nouvelle, avec les images accablantes de son arrestation, ont fait l’effet d’un séisme dans la classe politique française. Au point que beaucoup ont parlé de complot pour abattre médiatiquement une personnalité devenue trop menaçante pour l’actuel gouvernement. Comment, en effet, imaginer que le tout puissant directeur du FMI, challenger préféré des Français face à Nicolas Sarkozy en 2012, puisse se comporter comme un satyre avec une femme de chambre dans un hôtel new-yorkais ? Comment un homme de cette envergure pourrait-il oublier, ne fut-ce qu’un instant, ses responsabilités vis-à-vis de la planète ? Ces questions-là ne peuvent pas être occultées et la plupart des politiques interrogés, de quelque bord qu’ils se situent, ont préféré garder une réserve de bon aloi, respectant la présomption d’innocence dont DSK bénéficie avant que l’enquête n’ait confirmé ou non  les faits qui lui sont reprochés. L’ennui, c’est que même avec la meilleure volonté du monde, on voit mal, quand on remonte le fil des évènements, où la supposée machination a pu s’ancrer dans cette pitoyable histoire. Que d’autre part on retrouve, dans le parcours de DSK, des agissements étonnamment proches de ceux qui l’accablent aujourd’hui. Aurait-on  à faire avec lui à un nouveau Docteur Jekyll nourrissant secrètement un Mister Hyde particulièrement incontrôlable en présence d’une femme, ce dernier tirant vers le bas les hautes facultés du premier? Les psychanalystes se pencheront certainement sur la personnalité de  DSK et sur son parcours en clair-obscur. Quoiqu’il en soit, et quand bien même il sortirait blanchi de cette troublante affaire, il y a gros à parier qu’il devra malgré tout abandonner les fonctions qu’il exerce depuis 2007 (ce qu’il a fait depuis sans cesser de clamer son innocence du fond de sa cellule) ; qu’à l’échelon hexagonal, sa carrière politique est définitivement ruinée. La roche Tarpéienne jouxte toujours le Capitole.  Dominique Strauss-Kahn ou la marche triomphale au désastre.

 

                                          Erik PANIZZA   

14:03 Publié dans numéro 20 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dsk, viol, fmi, désastre