08/10/2012
Roselyne Bachelot ou le troisième âge heureux
On savait depuis longtemps que le show-biz – et le cinéma en particulier – était une passerelle vers la vie politique. En ce domaine, l’exemple le plus célèbre restera sans doute Ronald Reagan, acteur de série B qui parvint, à force d’accointances douteuses, à se faire élire gouverneur de Californie puis président des Etats-Unis. Mais ce que l’on n’avait pas encore envisagé, du moins en France, c’est que des responsabilités politiques puissent amener à faire de la télé. En l’occurrence, c’est encore une fois Roselyne Bachelot qui crée la surprise de cette rentrée, puisque l’ex-ministre de la santé de Nicolas Sarkozy s’est reconvertie en co-animatrice d’un talk-show, le Grand 8, sur D 8 – une filiale de Canal Plus. En compagnie, notamment, de Laurence Ferrari et d’Audrey Pulvar*, elle y commentera cette spécialité française qu’est l’air du temps. Une tribune idéale - et parfaitement consensuelle - pour débiter ses poncifs féministes sur la parité en politique ou la lutte contre la prostitution. Interrogé à la radio sur le salaire accompagnant ses premiers pas dans le journalisme, elle a reconnu, même à demi-mots, qu’il serait plus confortable que son traitement de ministre (on parle de 20 000 euros mensuels). Voilà de quoi améliorer sa modeste retraite de ministre et de parlementaire qu’à près de 66 ans, elle doit logiquement toucher à présent.
Dans l’actuel contexte politique et social, cette situation est choquante à plus d’un égard. D’abord parce l’activité politique et l’activité journalistique sont théoriquement inconciliables : on ne peut pas être juge et parti. Et Roselyne Bachelot, membre de la commission Jospin pour la moralisation de la vie publique, devrait le savoir mieux que personne. Perçoit-elle des indemnités pour sa participation à ce groupe de « sages » dont l’un des objets de réflexion est – quelle dérision ! – le non cumul des mandats ? L’intéressée s’en défend bec et ongles, allant même jusqu’à porter plainte contre x pour diffamation. Or, sachant ce qui était versé naguère à d’autres personnalités (comme Christine Boutin) membres, elles aussi, d’autres commissions de réflexion, on peut sincèrement en douter. Quoiqu’il en soit, Roselyne Bachelot continue, même par la bande, à faire de la politique. Mais cette situation contradictoire ne semble pas la déranger le moins du monde. Elle est pas belle la vie, Roselyne ?
Cette auto-complaisance qui confine au cynisme est une insulte pour des millions de Français, jeunes et vieux, qui peinent à « joindre les deux bouts », ou désespérant de trouver un jour un emploi à la mesure de leurs qualifications. Elle jette, de surcroît, une ombre inquiétante sur un gouvernement de gauche dont le moins qu’on puisse attendre est qu’il mette un frein à ce mercato politico-médiatique. La reconversion de madame Bachelot ne fait qu’avaliser l’idée populaire d’une connivence généralisée entre les élites de la politique et du show-biz. A travers elle, c’est la politique, au sens noble du terme, qui est un peu plus décrédibilisée. A quand Rachida Dati dans « Faites entrer l’accusé » ? Ou François Baroin dans « Capital » ?
Erik PANIZZA
*Du reste, on ne peut ici que « brocarder » Audrey Pulvar qui devrait, en tant que compagne d’un ministre en exercice, mettre entre parenthèses sa carrière de journaliste. Alors même qu’elle cumule, elle aussi, les fonctions de chroniqueuse à la télé et de rédactrice en chef d’un magazine artistique. Vous avez dit « déontologie » ?
19:07 Publié dans numéro 10 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bachelot, d 8, talk-show, pulvar
02/10/2012
Parias
Les Roms seraient-ils devenus en France les nouveaux parias, ces indésirables absolus ? Que faire de cette ethnie fondamentalement nomade et réfractaire à toute intégration ? La Gauche, comme la Droite précédemment, continue à les déloger et les expulser. Partout où ils s’installent, les riverains ne tardent pas à les accuser de tous les maux : mais quelle est la part du vrai et du faux dans leurs accusations ? Progressivement, ils deviennent les nouveaux bouc-émissaires d’une société en perte de repères. Ce qui s’est passé à Marseille, jeudi 27 septembre, confirme cet inquiétant processus. Là, ce sont les résidents d’une cité des quartiers nord qui ont pris la décision - avec l’assentiment tacite de la police – de chasser quelques dizaines de Roms avant d’incendier leur campement. Par chance, la violence a été contenue et les dégâts n’ont été que matériels. Mais cette action - que d’aucuns mettent sur le compte de l’exaspération - en dit long sur le climat social qui règne actuellement dans cette ville. Comment, en effet, réfuter l’opinion de Jean-Claude Gaudin quand il met en avant l’illégalité d’une telle initiative ? Le retour au système des milices marque indéniablement une régression de l’état de droit. Le problème n’est pas nouveau ici ; c’est même au nom de ce désengagement que d’autres, comme Samia Ghali, justifient ces bouffées de colère. D’autre part, cette affaire nous rappelle que les pauvres sont toujours les premières victimes des pauvres. Face aux Roms, les habitants (d’origine maghrébine pour la plupart) oublient volontiers les attitudes de rejet qu’eux et leurs familles ont pu essuyer en des temps pas si lointains. Ainsi ils reproduisent sur d’autres « étrangers » les mêmes manifestations d’ostracisme qu’ils reprochaient naguère à la société française. Car il y a toujours plus pauvre que soi, il y a toujours un être complètement démuni et sans droits qui menace de tirer vers le bas ceux dont le niveau de vie est en voie d’amélioration. Ce degré zéro de la misère, c’est le Rom qui l’incarne aujourd’hui. Il faut prendre très au sérieux le caractère socialement indéfini dont il est porteur ; car rien n’est plus anxiogène pour les populations fraîchement intégrées qui peinent à trouver dignité et reconnaissance dans ce pays.
Bruno DA CAPO
19:50 Publié dans numéro 10 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roms, parias, milices, gaudin
28/09/2012
Comment être hollandais ?
La crise est toujours là ! Plutôt que de parler de crise, peut-être vaudrait-il mieux parler de longue maladie. On a changé de médecin pour remédier aux maux qu’un autre médecin n’avait soignés qu’à coups de purges et de saignées diverses. Un Diafoirus qui avait mis les Français sur la paille, excepté ses amis qui avaient engraissé... Hollande, lui, fait dans la médecine douce, ou peut-être même dans l’homéopathie. Il sait que les Français sont tous hypertendus. A priori, c’est d’origine nerveuse puisqu’ils connaissent les vaches maigres depuis longtemps... Donc, pas de prescriptions hâtives. Surtout, pas de régime drastique qui pourrait stopper la croissance (du malade) et donc son appétit (qui se traduit par la consommation). Pas non plus de réformes miracles. On en parle, ça oui ! Ne brusquons pas les choses ! Il est urgent d'attendre ! On attend la réforme fiscale, la loi sur le mariage homo et sur le vote des émigrés... On semble beaucoup attendre de remèdes à venir qui ne disent pas encore leur nom... En attendant, on est toujours aussi patraque, on se méfie du lendemain. L’Europe ? Angela se défie de François comme d’un médecin douteux... Les Européens même se défient de l’Europe... Pour l’International, on prépare un repli stratégique des montagnes afghanes, sans - si possible - trop d'effusion de sang. Mais avec le Mali, on frôle le coup de sang ! La fièvre monte dans les états-majors ! Sans parler de cette guerre israélo-iranienne dont plus personne ne parle, qui semble programmée si, par malheur, le candidat républicain l’emporte sur Obama... Hollande, homme de l’art, sait tout cela mieux que personne. Voilà pourquoi il met des gants pour nous parler, avant d’en porter d’autres pour bientôt, mais cette fois-là qui seraient en latex afin de procéder à une opération chirurgicale.
Yves CARCHON
15:28 Publié dans numéro 10 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : hollande, diafoirus, médecine douce