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28/06/2013

Affaire Tapie : vers la fin du feuilleton ?

 

      

 

 Bernard Tapie, c’est l’histoire d’une énergie dont il est momentanément le nom. C’est l’histoire d’un joueur aux ambitions insatiables, toujours changeantes : chanteur, homme d’affaires, dirigeant d’un club de football, homme politique, comédien, animateur…Les Français vivent maintenant depuis plus de trente ans avec cette personnalité provocante qui se joue de tous les codes. Ils suivent l’évolution de sa vie publique comme un feuilleton à rebondissements, avec la fascination que le peuple porte à ceux qui osent défier les normes. Vie pour le moins sinusoïdale, où l’abime n’est jamais loin du sommet.

Sa dernière affaire en date l’illustre assez parfaitement ; elle pourrait bien mettre un frein sérieux à la volonté de puissance de ce corsaire de la république (qui, depuis, a fait main basse sur la presse quotidienne de la PACA). Car sa richesse retrouvée, voici cinq ans, repose – plus personne n’en doute à présent – sur un nouveau coup de poker ; l’une de ces décisions politiques scandaleuses qui contribuent à ébranler un peu plus la confiance, déjà bien fissurée, entre le citoyen et l’état. Imagine-t’on ce que représente, pour tant de gens qui peinent à joindre les deux bouts dans ce pays, l’octroi de 403 millions d’euros de dédommagements à un particulier, fut-il Bernard Tapie ? Que signifie un préjudice moral estimé à 45 millions d’euros quand la justice française n’en accorde que le centième, ou guère plus, à des innocents qui ont purgé de longues peines de prison? On comprend bien, dans cette nouvelle loterie nationale, que les dés sont étrangement pipés. Pour continuer de filer la métaphore, cette affaire évoque le jeu bien connu des dominos, chaque pièce entrainant la suivante dans sa chute.  Il y a d’abord eu Christine Lagarde, entendue par les juges en qualité de témoin assisté, pour la procédure exceptionnelle d’arbitrage qu’elle a avalisée lorsqu’elle était ministre des finances. La justice a eu moins d’égards avec Pierre Estoup – l’un des trois arbitres avec Pierre Mazeaud et Jean-Denis Bredin -, mis directement en examen malgré son grand âge (87 ans). Mise en examen aussi pour Jean-François Rocchi, ex président du CDR et Stéphane Richard, alors directeur de cabinet de Christine Lagarde et actuel PDG d’Orange. L’enquête devait forcément remonter jusqu’à Bernard Tapie lui-même, mis en examen, mais dans un cadre hospitalier, depuis lundi dernier. Au terme des quatre jours d’audition réglementaires, il est ressorti libre ce matin, quoique la justice n’en ait pas encore fini avec lui. La dernière pièce du jeu pourrait bien être Nicolas Sarkozy, déjà impliqué dans d’autres affaires non moins douteuses et qui devrait, dans ce cas, s’expliquer sur les rapports qu’il entretenait avec Bernard Tapie, alors fréquemment invité à l’Elysée. Selon toute vraisemblance, la procédure  d’arbitrage de 2008 risque d’être annulée par l’actuel gouvernement et Tapie sommé de rembourser le pactole empoché. Reste qu’une nouvelle procédure pourrait être alors engagée par l’homme d’affaires avec, à la clé, des prétentions financières encore plus exorbitantes.

                           

                                         Bruno DA CAPO                               

15:34 Publié dans 11 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : tapie, lagarde, arbitrage, pactole

18/06/2013

Bruissements (22)

 


 

Retraites : la question des retraites est actuellement le sujet politique le plus préoccupant en France. Et quoi de plus normal puisque tous les Français, de près ou de loin, sont concernés. Il n’a pas pesé pour rien dans la défaite de Sarkozy, l’an dernier, et le peuple de gauche, dans sa majorité, attendait de François Hollande une révision ferme de la loi Fillon (novembre 2010). Or, force est de constater que celui-ci tergiverse sur ce dossier et, finalement, tente de poursuivre avec des aménagements les réformes entreprises par son prédécesseur. Au motif que la durée moyenne de la vie s’est notoirement allongée, il voudrait ainsi porter la durée des cotisations-retraites de 40 à 42 ans, voire 44 ans. On voit sans effort de calcul à quoi peuvent s’attendre les jeunes – et ils sont nombreux – qui prennent leur premier emploi à 26 ou à 28 ans, aujourd’hui. Doit-on accepter de travailler jusqu’à 70 ans parce que l’on peut espérer vivre jusqu’à 85 ans – d’ailleurs dans quelles conditions - ? N’y a-t-il pas une limite naturelle, aujourd’hui comme demain, où le corps humain ne peut plus fournir d’efforts soutenus et réguliers ? Comme le disait avec pertinence le leader du Front de Gauche, si les gens vivent plus vieux, c’est aussi parce qu’ils travaillent moins. Vieille rengaine qui a, au moins, le mérite de pointer la régression sociale là où l’on parle d’ajustement à la réalité. La volonté de faire porter une partie du poids des réformes sur les actuels retraités n’est pas moins contestable. Pour certains, il n’est pas acceptable que les retraités vivent mieux, aient plus d’avoir que les jeunes ménages. Et d’entonner le refrain galvaudé de la solidarité intergénérationnelle. Mais se sont-ils demandé comment ont vécu les actifs d’hier pour bénéficier maintenant d’un relatif confort financier ? N’ont-ils pas trimés et souffert, eux aussi ? N’ont-ils pas été assez pressurés pour qu’on veuille encore réduire leur pouvoir d’achat? Le pire est encore que ce stupide discours trouve un écho, voire un aval, chez les retraités eux-mêmes. Certains se culpabilisent, vont jusqu’à trouver injuste d’avoir plus d’avantages que leurs descendants : comme s’il n’était pas normal d’être plus riche à 65 ans qu’à 25. C’est contre ce formatage bêtifiant des esprits que le Franc-Tireur entend réagir. Plus personne ne doit avaler de telles couleuvres, qu’elles soient estampillées de Droite ou de Gauche.

 

Méric : que la vie ne soit pas juste, nous le savons tous intuitivement et les probabilités de vivre jusqu’à un âge avancé seront toujours démenties par les accidents individuels. Ainsi le parcours de Clément Méric, qui s’est refermé à seulement 18 ans par un beau soir de juin. Quelles qu’en soient les causes, la mort d’un jeune homme laisse toujours un goût amer. Mais ce qui n’aurait pu n’être qu’un fait-divers sordide (comme il s’en produit hélas fréquemment) a pris aussitôt une dimension politique. Car Clément Méric a été frappé à mort parce qu’il affichait ouvertement ses convictions gauchistes. Ce n’est pas nouveau dans notre histoire et, par le passé, d’autres jeunes gens ont connu le même sort que lui pour les mêmes raisons. Mais voilà, dans la France de 2013, ce genre d’homicides n’est plus supportable ; il accuse, bien plus qu’il n’excuse, leurs auteurs. Pour mettre un terme à l’instrumentalisation politicienne de cette affaire, Jean-Marc Ayrault a donc demandé la dissolution des Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires – groupuscule d’extrême-droite auquel appartenait l’assassin de Clément Méric. Mais nous vivons dans un état de droit et il faut encore que la justice entérine cette demande gouvernementale. De toutes les façons, elle ne règlera pas le problème de la violence extrémiste et de la séduction qu’elle exerce sur des jeunes en rupture avec les valeurs démocratiques. Car le danger, dans nos sociétés, ne vient pas seulement que des militants islamistes. C’est ce que cette triste affaire nous rappelle.  

 

Marseille-Métropole : déception pour les 109 maires des Bouches du Rhône qui ferraillaient avec l’Etat depuis trois ans autour du projet Marseille-Métropole. Celui-ci a finalement été adopté par le Sénat, mardi 4 juin, à l’instigation de Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation. Une victoire, selon elle, pour les habitants de ce territoire qui verront ainsi leurs problèmes traités à la bonne échelle. Evidemment, il y a encore des « résistants » parmi les élus locaux : on ne renonce pas aussi facilement à son autonomie et à ses petits privilèges. Mais malgré la fronde annoncée, il y a toutes les chances que le projet de Marseille-Métropole, après celui du Grand Paris et de la métropole lyonnaise, prenne effet en janvier 2016. Gageons, en attendant, que ces doléances coloreront la campagne des municipales de 2014. 

 

 

                                               Erik PANIZZA

14/06/2013

Bancs publics

 

                       

 

 Parmi les différents types de mobilier urbain qui jalonnent nos villes, le banc public est sans nul doute l’un des plus anciens, l’un des plus nécessaires aussi. En fer ou en bois – parfois les deux -, il offre ses courbes rigides à quiconque ressent un peu de fatigue après une bonne marche. Celui qui s’ennuie par une chaude après-midi d’été y trouve  l’occasion de se délasser un peu, soit en poursuivant la lecture d’un roman, soit en y pratiquant la contemplation muette des passants. Bien des personnes âgées y font des haltes prolongées et quotidiennes; il n’est d’ailleurs pas rare que des petits groupes d’individus vieillissants élisent l’un d’eux pour siège de leurs interminables discussions sur le monde comme il va. Quant aux « novis », ces jeunes amoureux chantés par Brassens et photographiés par Doisneau, ils viennent toujours s’y bécoter avec fougue, prélude à des ébats et des rendez-vous dans des espaces plus intimes. Si les bancs publics offrent, par leurs dimensions, un support collectif de détente, certains évoluent maintenant vers le siège individuel, comme on le constate dans d’autres villes européennes. Dans le cœur de Munich, on trouve ainsi des chaises métalliques disposées circulairement, de façon à permettre aux gens qui s’y assoient d’observer le spectacle incessant de la rue. A Vienne, dans les espaces verts qui bordent le Ring, la municipalité met même des transats à disposition des promeneurs ; et ils sont nombreux, l’été, à venir s’y faire bronzer en toute gratuité. C’est à ce souci d’amélioration du vécu urbain que l’on mesure aussi le degré d’évolution d’une société.

Rien de ce confort ne se retrouve, hélas, dans le centre-ville de Marseille redessiné par monsieur Gaudin et ses architectes. Sur le quai des Belges, les bancs publics, déjà peu nombreux avant les travaux de réaménagement, ont maintenant disparus. Terminé la gratuité d’une demi-heure de repos face à la Bonne Mère qui trône au loin, dans le décor. Des fois où quelques SDF auraient le mauvais goût de donner aux touristes le spectacle déplorable de leur avachissement… Seuls deux ou trois « survivants » en bois demeurent aux abords de la tour Saint-Jean. Notez bien que ce ne sont pas les bars avec terrasse qui manquent dans les parages, si vous voulez flemmardez un moment. Là, un garçon, généralement impoli et pressé, viendra prendre votre commande, que vous ayez soif ou non. Coût moyen d’une consommation : 3 euros. Il faut bien faire travailler le commerce… Cette disparition des bancs publics dans cette partie  - sans doute la plus fréquentée – de la ville en dit long sur le caractère mercantile de ce projet d’embellissement urbain. Il faut rentabiliser par tous les moyens ce « cadeau » prétendument fait aux Marseillais ; et chacun, d’une façon ou d’une autre, doit mettre la main à la poche. En attendant qu’un autre maire propose un jour de faire payer les heures d’ensoleillement passées au bord de la mer.

 

                                      Jacques LUCCHESI

15:48 Publié dans 11 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : banc public, brassens, gaudin, sdf