Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

25/11/2016

Bruissements (68)

 

 

 

 

Fillon : personne ne l’avait vu venir, un peu comme dans la fable de La Fontaine, « Les voleurs et l’âne». Le troisième homme, c’était donc lui. Occulté par le duel Sarkozy-Juppé, objet de tous les commentaires depuis des mois. Mais les électeurs ont, une fois de plus, fait mentir les sondeurs et, au terme d’un premier tour très suivi, François Fillon est devenu le grand gagnant de cette primaire de la Droite avec 44,1% des suffrages exprimés. Il s’est imposé, dimanche dernier,  loin devant Alain Juppé (28,6%) et surtout Nicolas Sarkozy (20,7%) dont l’élimination pourrait bien marquer la fin de sa carrière politique. Presqu’aussitôt – c’est beau les convictions – la plupart des  dirigeants  des Républicains ont prêté allégeance à ce chef imprévu. Le second tour aura bien lieu dimanche prochain, mais avec le report des voix de Sarkozy sur son ancien premier ministre, on voit mal comment Alain Juppé pourrait renverser le cours des choses en sa faveur. Reste que, pour la plupart des Français, le programme hyper-libéral de François Fillon n’est pas une bonne nouvelle : retour aux 39 heures, suppression de 500 000 emplois de fonctionnaires, relèvement de la TVA de deux points, suppression de l’impôt sur la fortune, etc…Pour peu il ferait passer celui de son adversaire pour une resucée socialiste. Au moins sa ligne politique est sans ambiguïté et la Gauche sait à quoi s’en tenir avec lui s’il devenait le candidat de la Droite à la prochaine présidentielle.

 

Hollande : peu de chefs d’état ont été aussi contestés et caricaturés que François Hollande. A vrai dire ce travail de sape a commencé quand il n’était encore que candidat – et ses compagnons du PS n’ont pas été les derniers à le ridiculiser. Il est vrai aussi que, devenu président, Hollande a maintes fois donné des verges pour se faire battre: il suffit de rappeler ici la pitoyable affaire Léonarda. Est-ce par un sursaut de sympathie pour le chef humilié ou simplement par conviction républicaine qu’un collectif de personnalité des arts et du spectacle (parmi lesquelles Catherine Deneuve, Juliette Binoche et Denis Podalydès) s’est publiquement élevé contre le « Hollande bashing », arguant que tout n’avait pas été négatif dans son quinquennat – certes – et que, de toutes les façons, il fallait respecter la fonction présidentielle. On sait que les artistes se cherchent périodiquement des causes à défendre, même si, par le passé, ils ont été moins conservateurs. Cette déclaration a surpris tout le monde, à commencer par Jean-François Cambadélis, premier secrétaire du PS, même s’il a vite saisi cette aubaine. On ne sait pas encore si cet élan pro-présidentiel s’avèrera providentiel pour le président-candidat. Au fait, n’y a-t-il pas un mot en Français pour signifier la même chose que « bashing » ?

 

 

Merkel : une, au moins, que rien n’arrête, c’est bien Angela Merkel. A 65 ans et après onze années passées à la tête du plus puissant état d’Europe, la chancelière allemande a annoncé son intention de briguer un quatrième mandat consécutif, l’année prochaine. Une candidature stratégique car ainsi « Mutter » entend bien barrer la route au populisme grandissant outre-Rhin ; et aussi redorer le blason de son parti, la CDU. Si elle était élue une nouvelle fois, elle égalerait ainsi le record détenu par son ancien mentor Helmut Kohl : seize ans, entre 1982 et 1998.

 

Tabac : après les prostituées, ce sont les buralistes qui sont maintenant dans le collimateur de l’état français. Il est vrai que leur profession est autrement plus dangereuse pour la santé. Avec 80 000 décès par an, le tabac reste l’une des principales causes de mortalité en France. Ce qui n’empêche pas un tiers de nos concitoyens – dont beaucoup de jeunes - de continuer à fumer. Avec la création du paquet neutre, distribué depuis le 21 novembre, Marisol Touraine espère bien faire baisser un peu leur nombre. Partant du principe que le design et la marque des cigarettes sont de puissants incitateurs  à leur consommation, on a misé ici sur la laideur du produit. Les  emballages sont noirs et vert de gris, le nom des marques y est caché et des images d’organes malades accompagnent le sempiternel rappel que « fumer tue ». Pas de quoi se la jouer cool, en effet, même si le prix du paquet reste  bloqué autour de 7 euros. Une dépense encore trop faible, pas assez prohibitive pour les fumeurs, selon les experts. Et de rappeler qu’en Australie, pays-phare de cette expérience, le paquet coûte l’équivalent de 16 euros. Il n’empêche : dès le 1er janvier prochain, tous les paquets traditionnels devraient disparaître des circuits de ventes. Toute l’industrie du tabac est évidemment vent debout contre cette mesure. Mais on aurait tort, pour la santé publique, de l’abandonner, comme d’autres avant elle.

 

Erik PANIZZA    

12/09/2012

Bruissements(10)

 


 

Marseille : dix-neuf assassinats par balles depuis le début de l’année. Marseille n’en finit pas de faire parler d’elle, mais c’est à nouveau pour de mauvaises raisons. Oubliés la préparation de 2013, année européenne de la culture ; oubliée la perspective des municipales en 2014. Non, ce qui fait la une des journaux, ce sont les règlements de compte entre gangs liés au trafic de la drogue. Cette situation a pris des proportions qui débordent les capacités d’action des élus locaux (La députée PS Samia Ghali demandait l’intervention de l’armée dans les cités). Aussi, un comité interministériel, sous la présidence du Premier Ministre Jean-Marc Ayrault s’est réuni en urgence, jeudi 6 septembre, dans les salons du palais du Pharo. Rien que du beau monde, de Manuel Valls à Marie-Arlette Carlotti, sans oublier Arnaud Montebourg. Concrètement, ce nouveau plan anti-délinquance va déboucher sur l’envoi de 204 policiers supplémentaires à Marseille. Leur présence sécurisera davantage les Marseillais honnêtes mais il y a gros à parier qu’ils ne seront d’aucun effet pour régler les problèmes de gangstérisme évoqués plus haut. Car il y a, depuis sa fondation, quelque chose qui rend cette ville rebelle au pouvoir central. Ici, le grand principe c’est la « débrouille ». Il s’agit de s’arranger avec les lois, voire de les contourner quand elles sont trop contraignantes. Ainsi le bien privé prime toujours sur le bien public. On  retrouve ce principe à tous les niveaux de la vie marseillaise, depuis le non respect des stationnements interdits jusqu’aux trafics en tous genres dont la criminalité violente est la conséquence. Barons de la drogue ou petits dealers, ces gens-là ont choisi de vivre parallèlement à la société légalement instituée (c’est ce qu’on appelait avant le « milieu »). Ils ont leurs propres codes, leurs propres règles, leur propre justice. Forcément ils ne se reconnaissent pas dans les valeurs de l’état de droit, car ils ne parlent pas la même langue que lui. Comment trouver dès lors un terrain d’entente ? Doit-on  multiplier les actions « coup de poing » en sachant que la tête de l’hydre repoussera toujours ? Il faut d’ores et déjà chercher ailleurs des solutions pour enrayer ce fléau social.

 

Tabac : sur le versant légal, le tabac est un autre problème d’addiction et de santé publique qui se pose à tous les gouvernements. En France, il est  la cause de 73 000 décès chaque année. Et l’on sait ce que coutent à la Sécurité Sociale les maladies qu’il provoque ou entretient. En contrepartie, les taxes sur l’industrie du tabac constituent une manne importante pour les états. D’où cette situation ambiguë, faite de mises en garde, de limitations et d’augmentations périodiques, qui n’en finit pas. La dernière en date sera encore de 6% et prendra effet le 1er octobre prochain. Désormais, les fumeurs paieront 40 centimes de plus chaque paquet de cigarettes acheté chez un buraliste. Le paquet de Malboro – la marque la plus demandée – passera ainsi de 6,20 euros à 6,60 euros. Mieux vaut limiter sa consommation si l’on ne veut pas trop creuser son budget. Parmi les autres mesures de lutte annoncées, le design de moins en moins incitatif des paquets et le lancement d’un nouveau patch gratuit de désaccoutumance au tabac : le combat, là aussi, se déroule sur plusieurs fronts. Quels effets produisent tous ces efforts ministériels ? Si, au niveau global, la chute des ventes est sensible depuis une dizaine d’années, cette situation fait naturellement les choux gras de la contrebande. On estime qu’un paquet sur cinq échappe ainsi au contrôle de l’état. Là encore, les fumeurs invétérés se « débrouillent » et les trafiquants s’enrichissent. Vieille histoire.     

 

Fiscalité : François Hollande pourra-t’il tenir son annonce phare, durant la campagne présidentielle, à savoir taxer les plus hauts revenus – un million d’euros annuels et plus - à 75% ? La plupart des observateurs en doutent de plus en plus depuis quelques jours. Le chiffre de 67%  serait plus vraisemblable, après la suppression du bouclier fiscal limitant à 50% le taux d’imposition des plus riches. Déjà, les plus gros contribuables (footballeurs, personnalités du showbiz) trainent des pieds, faisant valoir le caractère bref ou aléatoire de leurs carrières. Et un super patron comme Bernard Arnault (LVMH) déclare vouloir prendre la nationalité belge – puis, peut-être après, celle monégasque – pour échapper au moins en partie à ce nouveau barème d’imposition. Quid du « patriotisme financier » prôné par le président ? S’il y a une baudruche appelée à se dégonfler sitôt lancée, c’est bien celle-là. Car l’argent a ceci de particulier qu’il délie ceux qui en ont beaucoup de tous liens moraux comme territoriaux. Etre riche, c’est l’assurance de pouvoir vivre mieux que les autres n’importe où sur cette planète. Le problème, pour les très grosses fortunes, est simplement de les  conserver, donc de continuer à s’enrichir le plus possible. Et là aussi c’est le règne de la « débrouille ».

 

Fessenheim : la plus vieille centrale nucléaire de France revient au cœur de l’actualité après l’accident survenu mercredi 5 septembre. Deux techniciens y ont été légèrement brûlés par des jets d’eau oxygénée. A priori, rien de bien grave,  sauf que cela relance les scénarios catastrophiques. Il y a, d’autre part, une autre promesse de campagne en suspens pour François Hollande et ses alliés écologistes voudraient bien qu’il la tienne sine die. Il est vrai que lorsqu’on a un ministre du redressement productif qui considère publiquement le nucléaire comme une énergie d’avenir, il est difficile de franchir le pas.

 

 

                                                      Erik PANIZZA