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13/01/2017

            Le parcours du combattant

        

 

Il parait qu’il y a une élection dans dix jours ? Je ne sais pas vous mais moi, ça m’émoustille toujours de glisser mon petit bulletin dans la fente d’une urne. Ils ont appelé ça les primaires de la gauche. Et ils sont encore sept en lice, comme les sept autres mercenaires de la droite, y a deux mois. Bon, cette fois c’est pas pareil. Y a même un candidat pas trop con qui pense que le travail n’a plus d’avenir et qui propose un revenu universel sans condition. Chouette ! J’ai bien envie de le soutenir. Encore faut-il savoir où ils organisent ça dans mon bled. On me dit d’aller voir sur Internet ; on trouve tout sur Internet. Et y a un site en effet, les Primaires Citoyennes.fr, avec du rouge, du bleu, du vert, du jaune, des couleurs qui vous en mettent plein la vue.

Je passe sur les trois premières cases -  les candidats, comment ça marche, qui peut voter. Y en a qu’une qui m’intéresse, moi : où voter. Je rentre ma ville et mon code postal, comme on me le demande. Pas de bol, c’est indisponible et le système ne reconnait pas ma demande. Pas d’alarme : c’est seulement le 11 janvier. Et puis, y a un numéro de téléphone pour les renseignements. J’appelle donc au 01 86 65 20 17. Le message me dit qu’il y a des conseillers sept jours sur sept – encore un sept ! - , de 9 heures à 20 heures. Mais quand il s’arrête, personne au bout du fil et cela trois fois de suite. Le lendemain, je reviens à la charge. Sur le site, c’est toujours aussi foutraque : l’incommunicabilité à son maximum. Heureusement qu’il y a le 118 818 pour les urgences, comme me le signale une autre page. J’ai juste négligé, dans ma fougue citoyenne, que c’est un numéro surtaxé à 2,99 euros la minute. Et toujours ces putains de jingles pour vous faire patienter! Tous des mange-sous, je l’affirme. Enfin un opérateur à la voix aussi plate et lente qu’une limace. Je lui expose aussi poliment que possible mon problème. Il me dit qu’il va chercher – autant dire que je peux aller écouter les infos en l’attendant. Ou qu’il peut, pour aller plus vite, me rediriger sur le téléphone des primaires citoyennes. J’accepte, trop pressé d’en finir : mauvais choix ! C’est le même message qu’hier et toujours personne au bout du fil. Je recompose, les nerfs à vif, le 118 818 pour leur dire ce que je pense de leur Géo Trouvetout. Cette fois c’est une opératrice qui me réceptionne, sans rien comprendre à ma demande. Et qui me renvoie encore une fois sur le numéro où des conseillers sont censés me répondre sept jours sur sept. J’ai compris la leçon : la prochaine fois, je m’adresserai directement à la NSA pour savoir où je dois voter en France.

Voilà comment on vous gâche une journée pourtant bien commencée ! Voilà comment on tue dans l’œuf les meilleures intentions ! Y a pas à dire : les socialistes sont les champions de la désorganisation. Une vraie machine à perdre des militants et des électeurs! Parce que, je sais pas vous, mais moi, dans ces conditions, j’ai bien envie d’aller, le 22 janvier, passer un dimanche à la neige plutôt de battre la campagne.

 

                                   Mister SHAKE   

11/01/2017

           Un drôle de paroissien

             

 

 

François Fillon a-t-il pensé que sa victoire aux primaires de la droite était un chèque en blanc pour le fauteuil présidentiel ? A chacun ses illusions. Tout comme le lièvre de la fable bien connue, il est peut-être parti trop vite et les sondages, en ce début d’année, viennent lui rappeler qu’une majorité de Français n’est pas prête à gober ses arguties catastrophistes. Je sais : il ne faut pas trop s’inquiéter des sondages, mais il vaut quand même mieux qu’ils ne vous soient pas trop défavorables.

Car le chemin de l’Elysée est jusqu’au bout semé d’embûches. Il faut, en particulier, savoir composer avec d’autres sensibilités que sa famille politique -  rassembler en un mot -  et à ce jeu-là Fillon, orgueilleusement accroché à son programme, sûr de son bon droit et de sa vérité, n’est pas le plus habile. Il est autrement plus doué pour la division et l’éloignement des centristes, pour qui ses réformes semblent trop abruptes, est un symptôme, sinon un signe révélateur. Tant à l’UDI qu’au Modem, on lui prefèrerait l’impétueux Macron, fut-il moins expérimenté que lui. Ceux-là, en outre, n’apprécient guère que Fillon mette en avant ses convictions religieuses à la moindre occasion. Voilà qui n’est pas très républicain, même si d’autres – à commencer par Nicolas Sarkozy – l’ont fait avant lui. N’y aurait-il pas là une stratégie électoraliste, un appel tacite à la France profonde et à un électorat âgé (qui, pourtant, n’a pas grand-chose à espérer de lui) ? Passe encore quand c’est Marine Le Pen qui l’exprime : elle défend son pré carré. Mais François Bayrou ? Mais Henri Guaino ?

Alors Fillon, déçu sans doute que l’on ne croit pas à sa sincérité, se défend, jure la main sur le cœur « qu’en tant que chrétien et gaulliste, jamais il ne prendra une décision qui soit contraire à la dignité humaine ».Que n’a-t-il choisi la prêtrise plutôt que la politique ! Il va même visiter une annexe des Pèlerins d’Emmaüs et fait mine de s’affliger qu’il y ait en France neuf millions de personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Comme s’il pouvait faire quelque chose pour eux ! Comme si ses conceptions politiques ne les saigneraient pas davantage s’il venait – cas encore très hypothétique – à les mettre en œuvre ! S’il y a, dans cette campagne présidentielle, un projet qui exclut radicalement les vertus chrétiennes de partage et de charité – ou de son avatar laïque, la solidarité - , c’est bien le sien. On ne peut pas être à la fois l’abbé Pierre et Margaret Thatcher.

 

                 Jacques LUCCHESI

30/12/2016

           Un jugement qui fait débat

Le 19 décembre dernier, la Cour de Justice de la République a reconnu Christine Lagarde coupable de négligence  dans l’arbitrage de l’affaire Tapie en 2008. Rappelons qu’elle était alors ministre de l’économie et qu’elle avait accordé à l’homme d’affaires 405 millions d’euros pour préjudice moral dans le litige qui l’opposait au Crédit Lyonnais. Mais, quoique reconnue coupable, Christine Lagarde n’a écopé d’aucune sanction, pas même d’une amende de 15 000 euros prévue dans ce cas. Certes, sa faute est moins grande que celle d’un Jérôme Cahuzac. Elle ne s’est pas enrichie personnellement avec cet argent. Mais elle a néanmoins accordé avec légèreté une somme colossale prélevée sur les fonds publics.

A l’annonce de cette décision plutôt complaisante, l’opinion s’est enflammée, dénonçant une justice à deux vitesses : selon que vous serez puissant ou misérable…Et Julien Cristofoli, un enseignant révolté par cette décision, a même lancé une pétition – sur Change.org – demandant un vrai procès pour Christine Lagarde. A ce jour, elle a recueilli plus de 225 000 signatures, - chiffre qui est loin d’être clos -, créant une vague de fond médiatique autour de ce jugement mais aussi sur l’impact d’Internet dans la vie publique. Est-ce qu’une pétition peut aller contre les lois en vigueur, voire changer une décision de justice ? Dans le cas de Jacqueline Sauvage, c’est oui. Dans le cas de Christine Lagarde, c’est non. Elle ne sera pas rejugée par une juridiction ordinaire, nous le savons bien. La patronne en exercice du FMI est une personnalité qui jouit d’une réputation internationale ; il est donc stupide de rapprocher son cas de celui d’un SDF condamné, lui, à de la prison ferme pour un vol alimentaire, aussi consternant que cela paraisse. Elle n’est pas pour autant intouchable – l’exemple de son prédécesseur, Dominique Strauss-Kahn est là pour nous le rappeler. Mais en tant qu’ancienne ministre, elle bénéficie du droit d’être jugée par une institution d’état, composée majoritairement de députés et de sénateurs, bref de serviteurs de l’état - d’où un soupçon de complaisance.

Or, c’est justement contre cette fameuse Cour de Justice que s’élève la pétition de Julien Cristofoli, voyant en elle (non sans raison) un privilège insupportable dans un régime prétendument républicain. Et de rappeler que François Hollande, à l’orée de son quinquennat, avait projeté de supprimer cette juridiction un peu trop inégalitaire. Va t’il s’y atteler dans les derniers mois de son mandat ? Pourquoi pas ? On le sent tellement soucieux, ces temps-ci, de rattraper ses erreurs et de laisser aux Français une meilleure image de sa présidence. Réaliser en quatre mois les mesures avortées, les promesses non tenues depuis quatre ans : voilà qui redonnerait des couleurs à la politique et de l’espoir chez ceux qui furent ses électeurs.

 

 

 

 

                    Jacques LUCCHESI