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24/04/2012

Hasta la vista, de Geoffrey Enthoven

 


 

 

 Il est des films dont le sujet aurait été impensable deux ou trois décennies plus tôt ; des films qui viennent à point dans une époque pour accompagner  - du moins faut-il l’espérer – l’évolution des mentalités. Tel est, je crois, le cas de « Hasta la vista », de Geoffrey Enthoven. Après « les intouchables » et son phénoménal succès, ce petit film belge est arrivé sur nos écrans voici un mois et a été aussitôt plébiscité par le public. Lui aussi nous parle – avec quel réalisme ! - de handicap mais surtout de la vie et de l’amour, de ce formidable élan vital qui irrigue les corps les plus abimés, les âmes les plus entravées. Il prend ici la forme d’un voyage estival que projettent trois jeunes Belges dont le lourd  handicap – deux sont paralytiques, le troisième est aveugle – astreint à une existence (trop) bien réglée dans le giron familial. Pour quinze jours, ils vont louer les services d’un minicar et d’un chauffeur forcément un peu infirmier. Direction le sud de la France et la route des vins. Ce n’est évidemment qu’un prétexte pour gagner la frontière espagnole et ses bordels florissants. Les obstacles, on l’imagine aisément, ne manqueront pas en chemin. Mais l’appel des corps et  la volonté de vivre pleinement, librement, cette parenthèse ensoleillée seront, d’une façon ou d’une autre, les plus forts. Un périple initiatique d’où tous ne reviendront pas, qui bouleversera la donne du départ. On saluera ici l’interprétation sensible et juste de Gilles De Schrijver dans le rôle du jeune Lars, atteint par une maladie incurable. De même que celle d’Isabelle De Hertogh, qui incarne avec beaucoup de nuances la corpulente conductrice de cet insolite trio. Un film réjouissant et hors normes, dont on ne peut ignorer le message social. Je ne saurai que trop le conseiller  à tous ceux et celles qui persistent à ignorer la sexualité des handicapés et son difficile vécu.

 

 

                            Jacques LUCCHESI

23/04/2012

Fin de campagne

 

                       

 

 

 Dès le matin, la différence avec les autres dimanches était sensible dans cette petite commune des Bouches du Rhône. Les gens étaient plus nombreux, moins flegmatiques, dans les rues ; les voitures allaient et venaient avec nervosité. L’ambiance n’était pas à la détente. Vers dix heures, les cloches ont sonné à toute volée dans l’église, sur la place du village : mais était-ce pour appeler les fidèles à la messe ou aux bureaux de vote ? Car l’esprit républicain s’invite partout, certains jours. Les écoles, encore une fois, étaient ouvertes pour les électeurs, décor enfantin de ce grand culte démocratique. Tout y était strictement numéroté et fléché, secteur par secteur, bureau par bureau. On y faisait la queue devant les présentoirs où s’étalaient dix bulletins de vote et de petites enveloppes bleues. Un seul nom, à l’exclusion de tous les autres, pouvait y entrer, petits papiers qui seraient bien vite froissés et défroissés. Rituel de l’isoloir et de ses rideaux trop courts puis, à nouveau, la file d’attente pour le cérémonial ultime des urnes, en présence des thuriféraires assesseurs : a voté ! A en juger par la masse des entrants et des sortants, on pouvait croire que l’abstentionnisme était une maladie en forte régression aujourd’hui. Pourtant, le JT de la mi-journée laissait entendre que le premier taux de participation était inférieur (28 contre 31%) à celui de 2007.Une moyenne nationale, évidemment.  Dehors, sous les arbres, on échangeait ses impressions et ses pronostics comme on parle, habituellement, des résultats du championnat de football. Et cela allait continuer durant tout l’après-midi. A dix-huit heures on a commencé à fermer les portes des bureaux. Tant pis pour les retardataires étonnés d’être précocement forclos. Il faudra penser à venir plus tôt dans deux semaines. Vint le dernier acte de cette mémorable journée, le dépouillement des votes avec la litanie des noms des candidats de ce premier tour. Evidemment, tous n’étaient pas nommés en proportions égales, mais c’est la dure loi de la démocratie. Les regroupements par paquets de dix et les mises au point toutes les demi-heures, sous l’égide du chef du bureau,  ne faisaient que creuser l’écart : certains candidats, boudés par les électeurs, n’atteignaient même pas un nombre décimal, alors que d’autres caracolaient avec des chiffres à deux zéros. Petit à petit se dessinait la radiographie électorale de la commune. Qui n’était – heureusement – pas celle de la carte nationale, connue dès vingt heures.

 

                              Horace DAUDET

19/04/2012

De l’usage modéré des sondages

 

 

 

 

 

 

Je n’ai rien contre les sondages, sauf lorsqu’ ils sont instrumentalisés pour influer sur le vote des Français. S’il faut en croire tous les augures, les jeux sont déjà faits. On connaîtrait déjà les résultats : Hollande l’emporterait contre Sarko. Autrement dit, la consigne implicite est donnée : votez utile (ce, dès le premier tour) pour que s’affrontent les deux athlètes politiques que portent les sondages. C’est bien sûr faire offense à la démocratie et à tous les votants qui ont pourtant encore les cartes en main. Les médias, qui pourtant s’en défendent, participent à ce conditionnement et leur pression est forte pour nous guider à accepter le dictat des sondages. Pour peu qu’on manque de culture politique ou de perspective historique (ou que notre opinion soit volatile), la bipolarisation peut paraître confortable. La droite contre la gauche, voilà qui est limpide ! L’ennui, c’est qu’une présidentielle est, - a toujours été un moment de brassage d’idées, d’offres, de propositions où se mêlent pêle-mêle les plus sérieuses, les plus loufoques, voire les plus farfelues. Qu’importe ! C’est la réelle respiration de la nation que l’on entend dans ce premier roulement de tambours de campagne. Le premier tour est fait pour que s’expriment toutes les tendances ou sensibilités qui la sous-tendent. Zapper ce tour, c’est racornir notre vitalité démocratique. Or les sondages, non seulement amenuisent de fait les « petits » candidats, crédités de 1% des intentions de vote, mais magnifient ceux crédités des plus hauts scores évalués (27, 28, voire 30%). Restent les 10 à 15 %, « faiseurs de rois », extrêmes et centre qui véhiculent les frustrations, les rêves et mécontentements divers. Mélenchon n’est pourtant pas Marine qui n’est pas plus Bayrou. Mais ce sont les 10-15 % ! Comme si un pourcentage supputé pouvait donner du poids ou au contraire discréditer le mouvement ou le courant qui en est crédité ! Revenons donc à plus sérieux. On peut au soir du premier tour avoir quelques surprises. Ce citoyen rebelle qu’est par essence le Français pourrait très bien disqualifier l’un des deux favoris, tant par bravade que pour donner une saine leçon aux sondeurs de tous poils. Ce serait un sacré camouflet infligé à ceux qui croient pouvoir diriger l’opinion !


                                  Yves CARCHON