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05/07/2019

      Tempête dans une piscine

 

                              

 

 

 Depuis quelques années maintenant, l’été ramène avec la canicule et le besoin pressant de se rafraîchir, des polémiques insidieuses sur les tenues de bain acceptables dans l’espace public. Ceux qui les orchestrent, sous couvert associatif, jouent habilement sur les ambigüités de notre laïcité pour tester les limites de la tolérance commune vis-à-vis de codes vestimentaires relevant d’une autre culture que la notre. C’est ainsi que, dimanche 23 juin, une dizaine de femmes ont voulu se baigner en burkini dans une piscine grenobloise. Rappelons au passage que le burkini est la version aquatique de la lugubre burqa, ce qui en fait l’exacte antithèse du monokini. Evidemment, elles se sont vu interdire l’entrée malgré leurs protestations et certaines ont même  écopé d’une amende de 35 euros.

Cependant la polémique enflait sur les réseaux sociaux et, deux jours plus tard, la piscine a été momentanément fermée pour des questions de sécurité. Le maire EELV de Grenoble, Eric Piolle, a évidemment réagi à cette provocation, condamnant une stratégie du choc et une atteinte au règlement intérieur. Quant à Marlène Schiappa, la secrétaire d’état à l’égalité des femmes et des hommes, elle a dénoncé dans cette intrusion une atteinte au droit des femmes à porter un maillot normal- c’est dire dévoilant plus le corps qu’il ne le cache.

 Tout cela serait aussi risible qu’un canular de potache s’il n’y avait derrière l’ombre d’une idéologie menaçant nos valeurs démocratiques. Du reste, comment peut-on logiquement s’indigner d’être reflué(e) d’un espace de baignade où la semi-nudité est de règle quand on s’y présente vêtu(e) de pied en cap ? Car comment, dans ces conditions, pouvoir bénéficier des bienfaits de l’eau et du soleil conjugués, ce qui est quand même le but recherché quand on va dans une piscine ou à la plage ? Et, accessoirement, montrer ainsi qu’on ne porte rien de douteux sur soi.

 Le motif d’islamophobie est parfaitement hypocrite et déplacé ; car c’est d’abord une simple question d’hygiène.  Si un homme - ou une femme – voulait entrer dans une piscine avec un pantalon de jogging et un tee-shirt, personne ne s’étonnerait qu’il ne soit pas accepté. On ne verrait là qu’une forme d’excentricité de sa part. Alors pourquoi devrait-on arguer un pseudo droit à la liberté religieuse quand il s’agit de femmes musulmanes qui se comportent de façon aussi provocatrice ?

 Personne n’est astreint à se baigner en été et on peut très bien rester chez soi, dans la tenue de son choix, si on estime que se dénuder en public est immoral. Mais de grâce, mesdames, ayez la décence de ne pas imposer vos critères de vertu à une société qui leur est parfaitement étrangère. Respectez, si vous voulez vous-mêmes être respectées, toutes celles et ceux qui ne font que vivre selon la norme commune lorsqu’ils exposent leurs corps à la lumière. Et rappelez-vous qu’en France, la santé publique prime sur toutes les guéguerres de valeurs.

 

Jacques Lucchesi

18/06/2019

                Marlène Schiappa idéologue

           

 

 

 

 Si être un homme ou une femme politique au XXIeme siècle, c’est sortir sans cesse de son pré carré pour aller pérorer de tout et n’importe quoi sur les plateaux de télévision, alors Marlène Schiappa en est certainement la meilleure incarnation. Jusqu’à présent, la très partiale secrétaire d’état à l’égalité des femmes et des hommes s’en tenait principalement à corroborer toutes les propositions féministes du moment, dans un oubli total du devoir de réserve attaché à sa fonction. Voici qu’elle a franchi un pas supplémentaire en co-signant, avec deux députés macronistes – Olivia Grégoire et Laurent Saint Martin – une tribune dans le dernier JDD, appelant les petits partis à rejoindre LREM. En voici d’ailleurs un extrait significatif :

« La République en marche n’a pas vocation à diviser en courants mais à élargir. Que vous veniez de LR, d’EELV, du PS ou du Parti animaliste, tout ce qui nous intéresse, c’est : êtes-vous prêts à faire passer votre pays avant votre parti? Êtes-vous prêts à porter et défendre des idées, peu importe leur provenance, au service des Français? »

On croit rêver en lisant ces lignes. A entendre madame Schiappa et consort, l’état de la France serait si alarmant qu’il nécessiterait une sorte d’union sacrée. Foin des querelles de clochers ! La patrie est en danger. Il s’agit à présent de travailler tous ensemble à sa préservation et son relèvement. Et quoi de mieux que la République en marche pour subsumer les différences et les idées originales? N’est-ce pas, depuis sa création, son principal credo ? Non, mesdames et messieurs, LREM n’est pas un parti comme les autres ; c’est la quintessence de la France d’aujourd’hui.

Voilà ce que nous dit, en filigrane, madame Schiappa. On notera au passage le parallèle de son OPA politique avec les appels répétés au patriotisme de Marine Le Pen et sa prétention, elle aussi, à incarner la France éternelle. Après tout, pourquoi se disperser en une multitude de partis et de mouvements ? Un seul serait bien suffisant pour gouverner ce pays. Le problème –  si problème il y a encore -, c’est que tout cela n’est ni plus ni moins que la négation de la démocratie ; laquelle a toujours supposé une alternance gauche-droite et, entre les deux, une bonne dose de dissensus.

Si l’on excepte quelques brebis égarées en recherche éperdue de mandature, je doute fort que cet appel soit entendu par l’ensemble de la classe politique française. Qui pourrait d’ailleurs se laisser duper par un aussi grossier subterfuge ? Mais grâce à des vestales aussi zélées que madame Schiappa, on commence à voir clairement la nature inquiétante du projet macroniste. Après avoir renversé les piliers séculaires de l’édifice républicain, après avoir débauché, tant à droite qu’à gauche, tous ceux qui s’inquiétaient de leur avenir électoral, il voudrait à présent aspirer à son profit la diversité des propositions politiques pour notre pays. Comme quoi le « et en même temps », ce leitmotiv archi-répété du parti présidentiel, rejoint insidieusement le « ni droite ni gauche » de tous ceux qui, par le passé, ont voulu gouverner autocratiquement, dans le refus de toute forme d’opposition.

 

Jacques LUCCHESI

07/06/2019

      Putains de trottinettes !

 

 

 

 

 Comme tout était simple quand la rue se partageait entre trottoirs et chaussée, entre piétons et véhicules à moteur. Il est vrai que, certains jours, il y avait un peu trop des seconds dans nos villes et que la pollution, vers six heures du soir, atteignait fréquemment des records. Bon, la plupart des automobilistes ne respectaient, pas plus qu’aujourd’hui, les passages pour piétons, mais ceux-ci avaient au moins la jouissance exclusive des  trottoirs.

L’évolution de la sensibilité urbaine et la nécessaire lutte contre la pollution de l’air ont progressivement changé la donne. Ce fut d’abord l’apparition des vélos. Ou plutôt leur réapparition, car le vélo – peut-on l’oublier ? – a été largement pratiqué par les Français jusqu’à la seconde moitié du XXeme siècle. C’était le moyen de locomotion par excellence des classes laborieuses – tout le monde ne pouvant pas se payer une moto et encore moins une bagnole.

A ce critère économique a succédé peu à peu le souci de l’environnement. Engin mécanique à propulsion humaine, le vélo est bon pour la santé et ne pollue pas. Et même si la France accusait un retard certain par rapport à des pays voisins (comme la Hollande et l’Allemagne), le vélo devint vite un signe de militance écologique. Reste que les cyclistes n’avaient pas la part belle lorsqu’ils roulaient sur la chaussée, juste derrière des camions et des bus. Pour la ventilation pulmonaire, on repassera. En revanche, sous l’angle du monoxyde de carbone et des particules fines, c’était le jackpot cancérigène assuré. Il fallait donc leur aménager des pistes cyclables, ce qui fut fait à minima et, bien sûr, comme à Marseille, au détriment de l’espace piétonnier réduit à la portion congrue sur les avenues et les boulevards. Cela n’empêche d’ailleurs pas les cyclistes de continuer à effectuer une bonne partie de leur trajet sur la chaussée.

Cette ambiguïté du vélo n’a fait que se renforcer avec l’introduction, dans nos villes, d’autres engins roulants non motorisés, rollers, planche à roulettes et maintenant trottinettes. Jusqu’à présent, ces moyens de locomotion étaient associés à l’enfance et à la sortie des écoles. Mais dès les années 90, on a vu de grands dadais se les réapproprier, dans un esprit alternatif, pour leurs déplacements urbains. Du reste, la première génération de trottinettes avait pour elle l’avantage d’être très légère et même pliable. Ce n’est plus le cas aujourd’hui avec les modèles électriques en libre accès qui pèsent 16 kilos et atteignent facilement les 25 Km/H. On imagine facilement la surprise, sinon le stress, des piétons qu’ils frôlent à cette vitesse ; car, bien entendu, c’est sur les trottoirs qu’elles roulent principalement. Et comme leurs utilisateurs ne sont pas plus prudents que les cyclistes, ils multiplient d’autant les risques d’accident. A Levallois-Perret, en avril dernier, c’est un octogénaire qui a été heurté mortellement par l’un de ces engins. A Marseille, où les trottinettes électriques sont en location depuis janvier, les accidents – heurts ou chutes – ont pris une tournure exponentielle, puisqu’on y recense pas moins d’un cas par jour depuis avril.

 Face à cette incurie, les pouvoirs publics commencent à réagir. Timidement, comme à Marseille, où un arrêté municipal limite à 6 Km/H leur vitesse sur les trottoirs. Plus drastiquement, à l’échelon national, où un décret de loi prévoit, dès septembre prochain, des amendes de deuxième classe (35 euros) et de quatrième classe (135 euros) pour les trottinettes jouant aux formules 1 sur les trottoirs. Ce ne sont certainement pas les piétons qui se plaindront de cette réglementation plus sévère. Mais dans ce genre de litiges, tout repose sur la preuve ; et cela risque de rendre très difficile son application.

 

Jacques LUCCHESI

17:19 Publié dans numéro 19 | Lien permanent | Commentaires (0)