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30/01/2013

Florence Cassez : de l’ombre à la lumière

 

 

 

 

 La semaine dernière, Florence Cassez a été libérée de la prison mexicaine où elle croupissait depuis plus de sept ans. Une bonne nouvelle, assurément : personne, dans ce pays, ne dira le contraire. Car si l’on en juge par les explosions de violence, fréquentes dans les prisons sud-américaines – la dernière en date, au Venezuela, a fait plus de 50 morts -, on imagine sans peine par quels moments extrêmement pénibles la jeune femme a dû passer, détenue à quelques 10 000 kilomètres de son pays natal. Elle n’est malheureusement pas la seule Française à avoir vécu ce type de situation. On estime à 2200 le nombre de ressortissants français purgeant une peine de prison dans des pays étrangers, actuellement. Quelles que soient les causes de leur incarcération, lequel d’entre eux peut se flatter  d’avoir vu son affaire aussi médiatisée que l’a été celle de Florence Cassez depuis son arrestation ? Pourquoi une telle inégalité de traitement médiatique ? Rappelons quand même qu’elle a été à l’origine d’une brouille diplomatique et de l’annulation, en 2011, de l’Année du Mexique, en France. Et qu’elle a été quasiment reçue comme un chef d’état par François Hollande, vendredi dernier, à l’Elysée. Retour de la fille prodigue au bercail ? Le bon sens s’insurge en secret contre un tel éclairage, une telle prolixité sur la libération d’une prisonnière de droit commun, même victime d’une injustice flagrante. Ou alors, il faudrait se soucier pareillement du sort des autres prisonniers français à l’étranger.

Un parallèle s’impose, bien sûr, entre l’affaire Cassez et l’affaire Betancourt. Toutes deux ont vécu une longue privation de liberté en Amérique du Sud. Toutes deux ont bénéficié d’une forte mobilisation de l’opinion publique en leur faveur (peut-être parce que ce sont des femmes et qu’on est toujours plus sensible, dans ce pays, à la détresse d’une femme que d’un homme). Mais alors qu’Ingrid Betancourt, femme politique franco-colombienne, a été enlevée et séquestrée par une organisation paramilitaire (les  FARC), Florence Cassez a été jugée et condamnée – certes abusivement – par une juridiction légale, précisément pour complicité d’enlèvements. Ce n’est pas exactement la même chose, même avec un commun happy-end. Elle n’a d’ailleurs pas été acquittée pour les crimes qu’on lui reprochait ; simplement, son jugement a été « cassé » pour des vices de forme et c’est encore une différence qu’il ne faut pas occulter trop vite. Gageons que sa biographie est, à l’heure qu’il est, déjà aux trois quarts rédigée et que la France entière saura, d’ici quelques semaines, toutes les raisons, toutes les justifications, de sa tourmente mexicaine.   

 

                                          Erik PANIZZA

13:42 Publié dans 11 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cassez, mexique, betancourt, farc

22/01/2013

Otages

 

                            

 

 Osons le rappeler : le phénomène des prises d’otages n’est pas nouveau dans l’Histoire. L’Antiquité l’a connu – Jules César lui-même fut capturé par des pirates qu’il fit, à peine libéré, pourchasser et exterminer-, de même que le Moyen-Âge et l’époque moderne, avec les combats opposant chrétiens et barbaresques en Méditerranée. Quand ils n’étaient pas échangés ou libérés contre rançon, les prisonniers – pour la plupart des combattants – étaient tout simplement réduits à l’esclavage. Sans remonter bien loin dans le passé, on constate que la recrudescence des prises d’otages va de pair, dans les années 70, avec la montée des mouvements terroristes, de quelque idéologie qu’ils se réclament. Ce parallèle caractérise les guerres dites « asymétriques », non pas entre deux états souverains mais entre un état et des groupes armés poursuivant des visées politiques. Dans ce cas, tous les moyens sont bons pour faire pression sur celui qui apparaît – parfois à tort - comme le plus fort, dont l’enlèvement et la séquestration de civils ou de ressortissants d’un pays allié. L’otage apparaît ainsi comme une monnaie d’échange vivante que ses ravisseurs chercheront à négocier au meilleur prix avec l’état concerné. Cela peut prendre la forme d’une grosse somme d’argent (comme pour l’anthropologue Françoise Claustre, enlevée par des rebelles tchadiens en 1974) ou la libération d’un nombre important de partisans emprisonnés, ce qui fut le cas, en 2011, pour le soldat franco-israélien Gilad Shalit. Même si cette expérience est sans doute l’une des pires que puisse connaître un être humain (séquestration dans un lieu inconnu, mauvais traitements, incertitude totale sur son avenir), elle se termine souvent bien et chacun soupire – rare moment d’empathie généralisée – avec les otages libérés. Ce ne sera pas, hélas, le cas, à In Amenas où l’on dénombre déjà – le bilan est encore provisoire –  38 otages tués, c'est-à-dire davantage que leurs ravisseurs (29, pour le moment). Pour ne pas céder au chantage des terroristes et alimenter ainsi leur capacité de nuisance, l’armée algérienne a donné l’assaut, samedi 19 janvier,  au site gazier où ils étaient retenus sans chercher à temporiser. Même si cette attaque a permis de libérer 685 employés algériens et 107 otages étrangers, on imagine sans peine la colère, tant des états concernés et non informés (le Japon, la Grande Bretagne, entre autres) que celle des familles qui ont ainsi perdu un proche dans cette riposte sans concession. Ce bilan est lourd, trop lourd pour ne pas mettre en cause la méthode choisie par l’état algérien. On frémit d’avance pour tous ceux qu’un groupe de fanatiques retient loin de chez eux si elle venait à être généralisée. De façon toute diplomatique, François Hollande a salué cette initiative musclée. Aurait-il été aussi satisfait de ce dénouement sanglant si, parmi les otages, il y avait eu l’un de ses fils ? Ce n’est pas sûr. La raison d’état ne peut pas tout justifier en démocratie. Mais il est vrai que l’Algérie de Bouteflika n’est pas exactement une nation démocratique.

 

                                       Bruno DA CAPO

15/01/2013

La démocratie, c’est la guerre

 

                      

 

 A force de ne plus voir le spectacle de la guerre qu’à la télévision. A force de vivre dans une relative sécurité à l’intérieur de nos frontières – qui sont aussi celles de l’espace fédéral européen, désormais -, nous avons fini par oublier les terribles leçons de Mars et de Bellone. Depuis maintenant près de soixante-dix ans, nous avons interdit à la guerre l’accès à notre territoire, mais elle n’en demeure pas moins vivace dans le monde. Les conflits locaux, rapides ou endémiques, mais toujours très meurtriers, se comptent par centaines depuis 1945. Nation démocratique, la France y a souvent pris part, que ce soit pour ses intérêts économiques ou par le jeu des alliances internationales. De tous les continents, l’Afrique est celui où elle est, militairement parlant, le plus intervenu. Rien que pour ces cinq dernières années, elle a délégué ses troupes et sa logistique au Tchad, en Lybie, en Côte d’Ivoire et maintenant au Mali. Ce pays à majorité musulmane – l’un des maillons de la francophonie africaine, aussi – subit depuis des mois l’assaut de brigades islamistes particulièrement destructrices – comme on l’a vu avec les sanctuaires musulmans de Tombouctou. En répondant à l’appel au secours du président Traoré, François Hollande a pris certainement une décision grave et courageuse. Une décision qui, pour la première fois depuis son arrivée à l’Elysée, force le respect et l’adhésion de ses naturels adversaires, à droite. Ce n’est pas le même son de cloche sur sa gauche, où certains ont taxé sa décision d’ingérence. Pouvait-il faire autrement, surtout en sachant que quelques six mille ressortissants français vivent et travaillent actuellement au Mali (gibiers de choix pour ses agresseurs) ? Non, et c’est ne pas intervenir, laissant ainsi le champ libre à ces nouveaux barbares, porteurs d’une idéologie d’un autre âge, qui aurait été, stratégiquement parlant, irresponsable. Face à eux, il n’y a malheureusement que la force qui vaille. Car, dans cette affaire, c’est au moins autant une question de valeurs que d’intérêts commerciaux. La démocratie ne doit pas être l’apanage des seuls pays occidentaux. Tout peuple – à commencer par les Maliens – a le droit, sinon le devoir, de l’exiger pour lui-même. Mais la démocratie, nous le savons bien, ne fait pas l’affaire de tous.  Nombreux sont encore ses ennemis, tacites ou déclarés, au premier rang desquels ces groupes terroristes dont les raids criminels sont avant tout dictés par des considérations bassement matérielles. Ils doivent être combattus avec la plus farouche détermination. Tout en déplorant les risques que cette attitude de fermeté fait encourir aux otages français de l’AQMI et sans écarter la possibilité sournoise d’un attentat sur notre territoire ou sur des institutions françaises à l’étranger. Si la démocratie est synonyme de paix pour les peuples qui l’ont durablement plébiscitée, elle implique souvent de recourir aux armes pour la défense de son principe même. C’est ce que nous constatons, encore une fois, au Mali.

 

                                          Bruno DA CAPO

16:27 Publié dans 11 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mali, bellone, aqmi, démocratie