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26/02/2016

Brexit

 

 Entre l’Angleterre et le reste de la communauté européenne c’est, depuis l’origine, « je t’aime moi non plus ». Quoique membre à part entière, elle a toujours voulu maintenir son indépendance et sa singularité - dont le maintien de sa monnaie nationale, à l’heure du passage à l’euro, ne fut pas la moindre exigence. Depuis, sa méfiance envers l’Europe s’est encore accentuée et un mot-valise agite l’opinion britannique depuis quelques temps : Brexit. La possibilité de sa sortie prochaine de l’UE est devenue un véritable enjeu électoral ; on sait la pression que met sur le gouvernement de David Cameron une formation anti-européenne comme Ukip. C’est aussi, à l’extérieur, l’objet d’un âpre marchandage avec Bruxelles, aussi, comme on l’a vu la semaine dernière. Que veulent les Anglais ? Bénéficier des avantages commerciaux liés au statut de membre (l’exonération des taxes douanière, en particulier) et s’acquitter en retour du moins d’obligations possibles. En langage imagé, c’est ce qu’on appelle vouloir le beurre et l’argent du beurre. David Cameron (qui ne cache pas sa préférence nationale) a encore réussi son coup de poker face au tandem franco-allemand emmené par François Hollande et Angela Merkel. Outre des accords bancaires extrêmement avantageux et une sécurité nationale indépendante des dispositifs militaires fédéraux, il a également obtenu le droit de ne pas verser d’allocations familiales aux résidents européens durant les quatre premières années de leur installation en Grande Bretagne. Mesure qui, en plus, ne concerne que les salariés, car les ressortissants de l’UE n’ayant pas trouvé de travail au bout de six mois pourront être renvoyés dans leur pays d’origine. Il ne va pas faire bon aller vivre en Angleterre quand on est français, italien ou polonais. Il y a plus, car les concessions faites à la Grande Bretagne ont de quoi exaspérer des états, comme la Grèce, qui souffrent des exigences de Bruxelles. Pourquoi, dans ces conditions, ne pourraient-ils pas renégocier leur adhésion à l’UE ou lui demander des dérogations sur des sujets sensibles, comme l’accueil des réfugiés ? « Regardez les Anglais. Ils ont fait plier Bruxelles. Pourquoi pas nous ? »
Si la pugnacité de David Cameron a, bien sûr, été saluée par tous ceux que le sentiment européen horripile – à commencer, chez nous, par les cadres du FN -, elle n’en reste pas moins insuffisante aux yeux des partisans de la sortie de l’UE. Ils sont nombreux et tonitruants en Angleterre, à commencer par Boris Johnson, l’actuel maire de Londres et adversaire de Cameron, qui s’est prononcé en leur faveur, lundi dernier. Dans le cas où un prochain référendum leur donnerait raison, l’Ecosse (elle-même travaillée par des visées sécessionnistes) a d’ores et déjà annoncée qu’elle se rallierait à l’UE. Vous avez dit Royaume Uni ?

Jacques Lucchesi

05/02/2013

L’Angleterre, cavalier seul ?

 

                

 

 

 La nouvelle est tombée le 23 janvier dernier, faisant l’effet d’un coup de semonce dans le ciel européen : David Cameron, premier ministre britannique, envisagerait, avant 2017,  de lancer un référendum sur le maintien ou la sortie de son pays hors de l’Union Européenne. Au-delà de la stratégie politicienne, évidente à l’approche de nouvelles élections législatives en 2015, cette déclaration -  fut-elle seulement d’intention -  mérite qu’on s’y arrête un peu. Car c’est quand même la première fois qu’un grand pays membre de l’U E envisage de se retirer de l’espace fédéral, notre cadre politique commun désormais. L’Angleterre – on le lui a assez reproché – a conservé sa monnaie nationale, lors du passage à l’euro en 2002. Elle n’est pas, pour autant, dans une position satellitaire vis-à-vis de l’Union, comme la Norvège ou le Danemark. Entre elle et Bruxelles, il y a bien plus que des rapports d’échanges commerciaux mais aussi une importante capacité de décision et de défense ; d’ailleurs c’est une Anglaise, Catherine Ashton, qui est ministre des affaires étrangères de l’U E. Quelles seraient les conséquences de ce retrait pour l’Angleterre ? Elle devrait tout d’abord abandonner sa voix au chapitre de l’Europe. Du coup, la France et l’Allemagne se retrouveraient dans une position de leaders incontestés. Les impôts – importants – qu’elle verse à la Communauté seraient, de fait, suspendus mais, en contrepartie, elle ne bénéficierait plus des subventions généreuses que Bruxelles accorde, secteur par secteur, à ses membres. D’autre part, elle paierait à nouveau des taxes douanières sur ses transactions avec l’Europe (et l’on sait quel poids celles-ci ont fait peser sur les économies nationales avant le marché unique). Car l’Angleterre, pays en très forte récession industrielle, ne peut pas vivre de son seul marché intérieur. Tout cela, David Cameron le sait bien. Mais la crise de la zone euro, sa faible compétitivité vis-à-vis des économies émergentes, l’inquiète. Il n’apprécie guère les contrôles bancaires auxquels l’Europe soumet la City. En outre, il lui faut soigner son aile droite - conservateurs et euro-sceptiques convaincus-  en vue de sa réélection. Alors il tente un coup de bluff, dans le but d’inciter Bruxelles à assouplir ses réglementations -  voire d’alléger les charges communautaires de la Grande Bretagne -  tout en lui conservant les avantages du statut de membre. Vulgairement, cela s’appelle vouloir le beurre et l’argent du beurre. Lui-même n’y croit guère mais il pourra toujours se targuer d’avoir essayé. Comme le disait avec raison Laurent Fabius : « on ne peut pas faire l’Europe à la carte. ».

 

 

                                      Bruno DA CAPO

28/09/2011

Jeux barbares

 

 

                                         

 

 

 Parmi toutes les images que charrient, chaque jour, les nombreuses chaînes d’information, rares sont celles qui sont encore capables de réveiller notre sens moral. Du reste, comment ne pas se blinder face à ce déferlement de souffrances  qui constitue l’essentiel des journaux télévisés ? C’est ce concert de catastrophes que Jean Baudrillard, voici quarante ans dans « La société de consommation », dénonçait déjà comme un conditionnement à la résignation. Nous savons, cependant, que l’indignation n’est pas tout à fait lettre morte en notre époque. Qu’elle peut rejaillir à la façon d’un vieux volcan et c’est plutôt salutaire. Pour tous ceux qui, comme moi, gardent un peu d’espoir dans les valeurs de la civilisation, l’indignation venait, la semaine dernière, d’Angleterre avec la vision d’un combat d’enfants. Deux enfants de 8 et 9 ans qui se battaient à mains nues dans une cage, excités par quelques centaines d’adultes qui avaient payé pour voir ce spectacle et qui étaient, pour la plupart, des parieurs. Deux enfants qui se battaient comme ailleurs des coqs ou des chiens, non pas pour régler un différent mais pour faire gagner un peu d’argent à leurs parents qui, bien sûr, les soutenaient. Deux enfants qui avaient, aux dires de leurs pères, choisi librement de se battre dans cette enclave, fiers de participer à ce genre de compétition. Des justifications qui cachent mal le caractère scandaleux de cette pratique, aussi condamnable que l’exploitation sexuelle de l’enfance. Car l’on peut se demander dans quelles voies s’engageront, d’ici une dizaine d’années, des gamins dûment conditionnés à la violence et au profit, précisément par l’exercice de la force brutale.  Mais n’est-ce pas aussi un symptôme de la crise que l’Angleterre traverse, sans doute encore plus durement que d’autres grands pays européens comme la France ou l’Allemagne ? N’est-ce pas l’une des conséquences de la politique ultra libérale qu’y applique le gouvernement Cameron, insensible au sort des plus pauvres de ses concitoyens ? Quand la pauvreté rencontre le libre-échange, on remet au goût du jour des paris et des spectacles d’un autre temps, d’un autre monde. Tout en s’abandonnant au rêve idiot d’un mariage princier dont le faste insolent et les faramineuses retombées commerciales auraient pourtant du, à eux seuls, révolter la jeunesse britannique.

 

 

                                                   Bruno DA CAPO