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30/04/2015

Bruissements (49)

 

 

Migrants : Les migrants africains n’en finissent pas de s’échouer et de mourir près des côtes siciliennes. Les 700 noyés du dernier naufrage, voici quinze jours, portent à 1500 le nombre de leurs morts depuis le début de l’année. A ce stade-là, on peut parler d’une catastrophe humanitaire.  L’U E a donc organisé un sommet de crise, jeudi 23 avril, pour essayer d’apporter des réponses à une situation qui découle de l’instabilité politique des pays de départ (Lybie, Syrie, Erythrée). 9 millions d’euros mensuels  vont donc être débloqués pour la surveillance et les secours en Méditerranée (jusqu’ici supportés par la seule Italie). Mais quid de l’accueil fait à ces malheureux qui jouent ainsi leur va-tout ? Le pire est sans doute de retrouver parmi eux les mêmes divisions religieuses qui prévalent ailleurs. Comme si la solidarité ne parvenait même plus à s’imposer dans des situations d’extrême urgence. Ainsi, des Africains d’obédience musulmane ont, ni plus ni moins, jeté à l’eau 12 autres migrants, chrétiens ceux-là. Certes, ils ont été arrêtés et font depuis l’objet d’une instruction judiciaire. Mais on mesure ici toute l’absurdité de ces querelles religieuses. Même si on sait que des candidats au djihad infiltrent aussi ces cargos du désespoir et de la honte.  

 

Républicains : Exit l’UMP, bonjour les Républicains. Ce sera désormais la nouvelle appellation du parti piloté par Nicolas Sarkozy. On peut se demander ce qu’attend l’ancien président de la république de ce ravalement de façade. Sans doute une mise à distance des récentes turbulences de l’UMP. Une virginité artificielle, en somme. On ne peut pas, non plus, ne pas le mettre en parallèle avec le parti américain droitiste du même nom. Mais c’est à l’échelon hexagonal qu’il est le plus ambigu. Désormais, nous est-il dit tacitement, seuls les adhérents de ce parti seront les vrais républicains de notre pays. Une véritable OPA sur un substantif pourtant partagé par tous (ou presque).

 

CSA : Les « sages » du CSA ont tranché : c’est Delphine Ernotte, 48 ans, ex-numéro 2 d’Orange qui succèdera à Rémy Pflimlin à la direction de France-Télévision. Son dernier adversaire, Pascal Josèphe, présentait l’avantage d’être un homme de télévision, malgré ses 60 ans. Mais il avait contre lui le président de la République et  la quasi-totalité du parti socialiste. Car cette nomination était jouée d’avance. Elle est on ne peut plus caractéristique de l’air du temps : on a préféré un manager à un concepteur d’émissions et une femme à un homme. Voilà au moins qui fera plaisir aux féministes du gouvernement. Pour le reste, on peut compter sur Delphine Ernotte pour faire des économies dans le choix des programmes.

 

 

 Harcèlement : De temps à autres, les féministes françaises viennent égayer une actualité particulièrement sinistre avec des projets absurdes. Le dernier en date concerne le harcèlement sexuel dans les transports en commun. A en croire Pascale Boistard, secrétaire d’état aux droits des femmes, 100% des femmes françaises auraient été harcelées (comprendre draguées) lors d’un trajet en bus, en métro ou en RER. 100% : cela fait quand même beaucoup, non ? Et de demander, outre une vaste campagne d’affichage, la création d’une amende spécifique à ce délit supposé. Serait-on arrivé en France à une situation comparable à celle de l’Egypte qui nous est montrée dans « Les femmes du bus 678 » ? Une enquête un peu plus sérieuse a été menée dans la foulée. Elle fait apparaître que l’argumentaire de madame Boistard repose sur un échantillon de 300 femmes qui vivent toutes en Île de France. Voilà le problème ramené à de plus justes proportions. On notera au passage comment on peut faire dire aux chiffres ce que l’on veut, au mépris de leur vérité empirique.  En d’autres termes, cela s’appelle du révisionnisme. Et qu’est-ce qui est menacé dans tout ça ? La mixité et le vivre-ensemble harmonieux, tout simplement.

 

                             Erik PANIZZA

16/01/2015

Les cargos de la honte

 

 

L’Europe ne peut plus endiguer l’arrivée de milliers de migrants sur ses côtes. Aujourd’hui, l’Italie, demain la France. Nous y sommes : c’est un fait. Les trafiquants d’êtres humains ont semble-t-il trouvé une imparable technique pour imposer leur « cargaison » : laisser dériver leurs cargos sur nos côtes, au risque de noyer les malheureux qui leur ont fait confiance. Ainsi, il y a une semaine, deux cargos à la dérive chargés de migrants syriens et turcs ont été interceptés par la marine italienne : un premier cargo, le Blue Sky, transportant près de 800 migrants livrés aux caprices de la mer, puis un deuxième dont les 450 migrants ont été secourus au large de la Calabre. L’Italie — on l’a vu déjà pour Lampedusa — est confrontée à un afflux croissant de clandestins qui cherchent à gagner l’Europe au péril de leur vie. La moitié de ces migrants sont des Syriens ou des Erythréens. On peut imaginer dans les mois à venir des milliers d’hommes et de femmes, fuyant la Syrie en guerre, qui s’échoueront bientôt. L’Europe a le devoir d’aider la péninsule italienne. Le fait-elle ou du moins est-elle à la hauteur de répondre à cette urgence ? Il est vrai qu’au-delà des protestations humanistes, on doit admettre qu’un tel trafic est un commerce juteux : chaque migrant paie entre 1000 et 2000 dollars sa place sur un cargo, ce qui signifie que les passeurs encaissent pour un voyage plus d’un million de dollars ! L’Europe doit-elle revoir contrôles et règles avec les armateurs qui louent ou vendent ces cargos ? Une chose est sûre : tant que la Syrie et bien d’autres pays seront en guerre, rien n’empêchera hommes et femmes de survivre et de s’aventurer sur des mers dangereuses, y compris avec leurs enfants. En attendant, ces chargements d’humains nous font penser à d’autres déportations qu’on a pu connaître dans l’Histoire, que ce soit la traite négrière ou les déportations de Juifs : ce sont les cargos de la honte.

 

                                Yves CARCHON

10/10/2013

Réfugiés

 

 

                                          

 

 

 Avouons-le sans détour : le sort des autres peuples, aussi effroyable soit-il, ne nous passionne pas en France. Au fil du temps, nous n’avons fait que nous refermer sur nous-mêmes et nos petits problèmes. Dans l’information qui nous arrive à jets continus, nous ne retenons guère que ce qui nous touche de près : chômage, retraites, pouvoir d’achat, insécurité. De plus en plus, nous vivons comme si nous étions dans une forteresse assiégée. Plus que jamais, les nouveaux venus sont regardés comme une menace pour nos acquis, même si cela bouscule parfois notre conscience républicaine. Charité bien ordonnée…Cela peut sembler un paradoxe au pays des droits de l’homme, un pays où un tiers de ses habitants a des origines étrangères, mais c’est comme ça. Avec de tels sentiments le F N, à n’en pas douter, a encore de beaux jours devant lui.

Il n’empêche : le monde continue de produire quotidiennement son lot de malheurs et de détresses. La multiplication des réfugiés en est la preuve criante, eux qui – il ne faudrait jamais l’oublier – ont dû tout quitter pour tenter simplement de survivre en terre étrangère. Imagine-t’on le traumatisme que cela représente dans une vie d’homme ? Ce phénomène – qu’il faut distinguer de la simple émigration – n’est pas nouveau : que l’on songe, notamment, aux « boat people » vietnamiens dans les années 70. Ce qui est nouveau, c’est le degré de rejet et d’insensibilité qui l’accompagne dans notre pays.  Dans les visages haves de ces déracinés, nous ne voyons plus que le masque de l’envahisseur et non cet alter ego plus malchanceux. Si l’égalité et la liberté ont depuis longtemps façonné nos moeurs, qu’en est-il de la fraternité, troisième valeur de notre belle devise nationale? De temps en temps, un drame un peu plus terrible que les autres défraie l’actualité, nous force à voir la réalité géopolitique dans toute sa cruauté. La semaine dernière, ce fut le naufrage d’une embarcation emportant cinq cents Africains – Ethiopiens et Erythréens pour la plupart – au large des côtes de la Sicile. Environ deux cents d’entre eux – peut-être davantage maintenant – ont péri dans les flots méditerranéens ; sans que cela dissuade d’autres désespérés de tenter l’aventure vers l’envoutante Europe, à commencer par les Syriens ruinés par deux ans et demi de guerre civile. Face à cela, l’UE se mobilise, certes, met en place une nouvelle conférence humanitaire, mais sans parvenir à fédérer sur cette question douloureuse ses vingt-huit états membres. Quant à la France, si décidée, le mois dernier, à une action militaire contre le régime de Bachar El Assad, elle est beaucoup plus tiède à accorder le droit d’asile aux victimes civiles du dictateur syrien. En 2012, elle a ainsi accueilli 627 d’entre elles, c'est-à-dire moins que le petit  Danemark (770) et à peine un peu plus que la minuscule Chypre (564). C’est un peu juste pour un pays qui est quand même la deuxième économie européenne.

Qu’on l’admette ou non, il faudra bien que l’UE se préoccupe davantage du sort des réfugiés extra-européens ; il faudra bien qu’elle crée davantage de structures d’accueil si elle ne veut pas être débordée par ce phénomène, au cours des prochaines décennies. Car, selon nos meilleurs démographes, ce sont plus de deux cents millions de migrants – d’Afrique mais surtout d’Asie – qui pourraient bien déferler vers nos frontières, chassés par d’ inéluctables  bouleversements climatiques. A moins de renier tous nos principes et de leur livrer une guerre ouverte, nous devrons alors réapprendre à les regarder comme des hommes et les intégrer à notre destin commun.

 

 

                        Bruno DA CAPO