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02/10/2015

Les droits de l’homme à la mode saoudienne

              

 

 Premier état du Moyen-Orient, tant par sa superficie (2 millions de kms2) que par son économie (1607 milliards de $ de PIB annuel), l’Arabie Saoudite affiche orgueilleusement sa réussite aux yeux des autres nations. Son opulence, elle la doit principalement au pétrole et à ses minéraux qui représentent près de 90% de ses exportations. Et malgré la chute du cours du baril depuis deux ans, ses dirigeants n’ont pas encore trop de souci à se faire. Politiquement liée aux USA depuis 1945, elle est courtisée par de nombreux pays occidentaux – dont la France -  qui savent quel Eldorado représente, pour leurs entreprises, ce pays demandeur d’une technologie de pointe. Sur le versus intérieur, c’est nettement moins réjouissant et moins moderne. Monarchie absolutiste gouvernée depuis 1932 par une famille – les Seoud -, sa constitution est basée sur un Islam rigoureux et son système juridique sur la Charia. En matière de moeurs, elle pratique une stricte séparation entre les hommes et les femmes et persécute les minorités sexuelles. Toute opposition politique est impitoyablement réprimée et la peine de mort y est appliquée avec une régularité qui ne faiblit pas (80 exécutions depuis janvier 2015). Concrètement, elle est la parfaite illustration d’un pays qui plébiscite les acquis occidentaux tout en se situant aux antipodes de ses valeurs morales. Si l’on ajoute à ce tableau la présence sur son territoire de deux des trois lieux saints de l’Islam (La Mecque et Médine), on comprend son ambition d’exercer le leadership dans le monde arabe. Maintes fois critiquée par les occidentaux pour son attitude ambigüe vis-à-vis du terrorisme islamiste, l’Arabie Saoudite  peut faire tranquillement la sourde oreille. Car en ce monde, hélas, l’éthique n’est pas près de l’emporter sur la raison économique. Avec le régime saoudien, plus que jamais, charbonnier est maitre chez soi.

Par une ironie dont l’histoire du monde est familière, c’est un dignitaire de ce pays là, Faisal Bin Hassan Trad,  qui a été nommé, le 22 septembre, à la tête du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU. On imagine quelles lumières il pourra apporter à cette vénérable institution. Cette nomination pour le moins oxymorique survient au moment même où un jeune homme de 21 ans, Ali Mohammed Al-Nimr, attend son exécution dans une geôle saoudienne. Son crime : avoir participé, voici quatre ans, à une marche protestataire ; et sans doute, aussi, être chiite dans un pays majoritairement sunnite. Cette sanction disproportionnée scandalise le monde « libre » et une pétition demandant sa grâce auprès des autorités de Riyad circule actuellement sur le Net. Nous ne pouvons, bien sûr, qu’appeler à la signer massivement ; tout en mesurant bien que nos dirigeants ont des préoccupations plus urgentes en cet automne, surtout au Moyen Orient.

 

 

                        Bruno DA CAPO

25/09/2015

Bruissements (52)

 

 

Syrie : François Hollande a donc décidé d’intensifier les frappes aériennes sur les positions de Daesh en Syrie. Il a bien fait, même s’il sera sans doute critiqué pour cette décision. Aurait-il joué la carte de l’attentisme qu’on le lui aurait également reproché. Freud avait raison : gouverner, tout comme soigner et éduquer, est bien une tâche impossible. Mais si les bombardements de la coalition ont, depuis quelques mois, entravé la progression des djihadistes sur le terrain, elles ne seront pas suffisantes pour éradiquer le cancer islamiste dans cette région. D’autant que l’afflux de nouvelles recrues en provenance du monde entier – jeunes imbéciles épris d’exploits militaires – contribue à le reformer. Pour cela, il faudrait l’envoi d’un corps expéditionnaire aussi courageux et déterminé que le sont les combattants kurdes – les fameux peshmergas – près de la frontière turque. Et, pour le moment, personne ne veut y aller. On sait d’ailleurs que la Turquie – adversaire déclaré de Daesh – confond souvent, lors de ses tirs, les djihadistes et les peshmergas. Quant aux Russes qui s’engagent peu à peu pour soutenir le régime – ou ce qu’il en reste – de Bachar El Assad, leur seule présence ne sera pas suffisante pour changer la donne. Les migrants syriens n’ont pas fini de déferler sur les côtes européennes.

 

Egypte : il ne fait pas bon, par les temps qui courent, faire du tourisme au Moyen-Orient. Quand ce ne sont pas des terroristes qui mitraillent les touristes (comme en Tunisie), ce sont des militaires qui les confondent avec des djihadistes et les prennent pour cibles. C’est la tragique méprise dont a été victime, le 13 septembre dernier,  un groupe de Mexicains qui circulaient avec leurs guides égyptiens dans la région désertique de Farafra. Bilan : 12 morts et 10 blessés. Le gouvernement égyptien a, bien sûr, ouvert une enquête. Mais il y a gros à parier que ces vies stupidement annihilées seront passées, comme tant d’autres, par les pertes et profits. Quand on vous dit que les guerres sont horribles…

 

La Mecque : une grue qui s’effondre sur la Grande Mosquée de la Mecque, tuant plus de cent personnes, à quelques jours du Hajj – le grand pèlerinage musulman : voilà qui a de quoi alarmer les croyants. Comment ne pourraient-ils pas voir un signe divin dans cette tragédie ? Mais même les Saoudiens n’ignorent pas que, derrière les catastrophes les plus déconcertantes, il y a souvent une responsabilité humaine. C’est ainsi qu’au fil de l’enquête, ils sont remontés jusqu’au groupe de construction immobilière Ben Laden, gérant du chantier et qui n’avait pas respecté les normes de sécurité en la matière. Oui, Ben Laden, comme le défunt fondateur d’Al Qaïda et organisateur des attentats de New-York en 2001. Lequel n’était autre qu’un rejeton de cette richissime lignée  d’entrepreneurs saoudiens. Décidément  les catastrophes, volontaires ou involontaires, sont chez eux une affaire de famille.

Grèce : on ne donnait pas cher de  son avenir politique après sa démission fracassante du mois d’août. Pourtant, dimanche dernier, au terme d’élections législatives anticipées, Alexis Tsipras est encore sorti victorieux des urnes avec une courte majorité de son parti Syriza. S’il a de fortes chances de retrouver son poste de premier ministre, il va néanmoins devoir composer avec l’aile modérée du parlement grec et accepter les conditions de remboursement de la dette dictées par Bruxelles. Sans parler du sort des migrants arrivés massivement sur les côtes grecques, cet été. Pas vraiment une sinécure que la gouvernance de la Grèce actuelle. Une seule certitude : le rêve d’une politique anti-austérité est bien derrière lui.

 

Pauvreté : Une bonne nouvelle sur le front économique français : la pauvreté a reculé en 2013 de 0,3%. Elle  ne touche plus que 14% de la population, contre 14,3% en 2012. Cela repose en partie sur le relèvement des minimas sociaux (RSA, ASS). Si l’on ajoute à cela la baisse (1,8%) des revenus des plus riches, plus taxés sur leur patrimoine, on comprend que la majorité socialiste ait retrouvé le sourire – d’autant que c’est la première augmentation du niveau de vie des plus pauvres depuis 2008.  Malgré tout, 8,6 millions de Français continuent à vivre avec moins de 1000 euros par mois (quand le revenu moyen est de 1667 euros). Une hirondelle ne fait pas le printemps, surtout en automne.

 

Régionales : Elles se rapprochent à grands pas, ces élections régionales de décembre. Et le PS sait qu’elles risquent d’être un nouveau camouflet pour lui et la politique gouvernementale. Aussi son patron, Jean-Christophe Cambadélis, appelle à l’union sacrée de la Gauche. Et de proposer, à la mi- octobre, un référendum populaire pour y parvenir. L’ennui, c’est que les autres formations qui composent cette famille ne sont plus disposées  à jouer les faire-valoir d’un parti qui les a largement ignorées dans sa conduite des affaires. Il faudrait peut-être que le PS arrête d’agiter des épouvantails et règle ses problèmes en interne.

 

Wolksvagen : mettre un tigre dans son moteur, c’est démodé aujourd’hui. Mieux vaut y installer un logiciel qui ramène, lors des contrôles anti-pollution, les émissions d’azote et de gaz carbonique à la norme convenue pour mieux l’outrepasser sitôt après. C’est le choix qu’a fait Wolksvagen pour conquérir le marché américain. Manque de chance : son astuce a été détectée par une ONG et ce sont 11 millions de ses véhicules qui vont revenir au bercail. Allez faire, après ça, confiance à la rigueur allemande ! Rien qu’aux Etats Unis, le constructeur teuton risque une amende de 18 milliards de dollars. Il restera bien, malgré tout,  quelques millions d’euros pour offrir un « parachute doré » à Martin Winterkorn, patron de la célèbre firme, après sa nécessaire démission.

 

                       Erik PANIZZA

18/09/2015

L’école de l’informatique

                        

 

 Qui pourrait aujourd’hui affirmer que l’apprentissage de l’informatique à l’école n’est pas une nécessité incontournable ? Personne, évidemment. Car le monde a opéré, à partir des années 70, un tournant vers le numérique et celui-ci a progressivement investi tous les domaines d’activité de notre vie. Aucun élève, dans le public ou dans le privé, ne doit rester à l’écart de ce langage, d’autant plus qu’il est devenu indispensable dans le secteur du tertiaire, le plus pourvoyeur d’emplois à l’heure actuelle. Mais l’acquisition de ses codes ne peut pallier – et encore moins se substituer – à celle des savoirs fondamentaux que sont la lecture, l’écriture et le calcul. Leur maitrise est nécessaire pour pouvoir profiter pleinement des possibilités liées à l’outil numérique – comme, par exemple, la recherche à partir des liens hypertextes.  

Or, que constate-t’on, malheureusement, dans l’école française en ce début du XXIeme siècle ? Un retard de plus en plus manifeste dans l’acquisition de ces savoirs basiques. Le niveau général s’y est dégradé, plaçant notre pays à la 25eme  place mondiale  pour les mathématiques (classement international PISA), loin derrière les grands pays asiatiques et les petits pays nordiques. Et ce n’est guère mieux pour la compréhension de l’écrit, puisqu’il se situe au 21eme rang. Les inégalités, là aussi, ne cessent de se creuser entre les milieux sociaux mais aussi entre les sexes, puisque les filles progressent plus vite que les garçons. Comme si ce n’était pas assez on assiste à la montée inquiétante d’un phénomène qu’on croyait derrière nous: l’illettrisme. Il concerne aujourd’hui 2 ,5 millions de personnes dans notre pays, soit 7% des Français entre 18 et 65 ans  ayant été scolarisés. Car, contrairement à l’analphabétisme qui caractérise les gens n’ayant jamais appris à  lire et à  écrire, l’illettrisme concerne ceux qui ont progressivement perdu l’usage de ces savoirs. Comment, dans ce cas, s’intégrer à la société et assumer pleinement son rôle de citoyen ? Mais comment ne pas voir, non plus, dans cet état de choses, l’influence d’une société de plus en plus aspirée par la gadgétisation technologique, au détriment des fondamentaux évoqués.

Non, il ne suffit pas de savoir pianoter sur un téléphone portable pour être un individu civilisé. Pas plus qu’il ne suffit d’envoyer, à longueur de journée, des messages rédigés dans  un sabir de mots tronqués pour dire que l’on sait écrire. A l’heure où certains éducateurs préconisent l’abandon pur et simple de l’écriture calligraphique à l’école, nous soutenons au contraire que ces gestes-là, pour ancestraux qu’ils paraissent, sont nécessaires au développement cognitif harmonieux de l’enfant. Que l’on ne doit pas (pour de mesquines raisons économiques) sacrifier les bases d’une culture humaniste au profit des nouveautés du moment. Alors la pratique de l’informatique sera, pour nos élèves, un atout supplémentaire et non, comme c’est  souvent le cas présentement, un amoindrissement de leurs capacités intrinsèques.

                                    Jacques LUCCHESI