18/09/2015
L’école de l’informatique
Qui pourrait aujourd’hui affirmer que l’apprentissage de l’informatique à l’école n’est pas une nécessité incontournable ? Personne, évidemment. Car le monde a opéré, à partir des années 70, un tournant vers le numérique et celui-ci a progressivement investi tous les domaines d’activité de notre vie. Aucun élève, dans le public ou dans le privé, ne doit rester à l’écart de ce langage, d’autant plus qu’il est devenu indispensable dans le secteur du tertiaire, le plus pourvoyeur d’emplois à l’heure actuelle. Mais l’acquisition de ses codes ne peut pallier – et encore moins se substituer – à celle des savoirs fondamentaux que sont la lecture, l’écriture et le calcul. Leur maitrise est nécessaire pour pouvoir profiter pleinement des possibilités liées à l’outil numérique – comme, par exemple, la recherche à partir des liens hypertextes.
Or, que constate-t’on, malheureusement, dans l’école française en ce début du XXIeme siècle ? Un retard de plus en plus manifeste dans l’acquisition de ces savoirs basiques. Le niveau général s’y est dégradé, plaçant notre pays à la 25eme place mondiale pour les mathématiques (classement international PISA), loin derrière les grands pays asiatiques et les petits pays nordiques. Et ce n’est guère mieux pour la compréhension de l’écrit, puisqu’il se situe au 21eme rang. Les inégalités, là aussi, ne cessent de se creuser entre les milieux sociaux mais aussi entre les sexes, puisque les filles progressent plus vite que les garçons. Comme si ce n’était pas assez on assiste à la montée inquiétante d’un phénomène qu’on croyait derrière nous: l’illettrisme. Il concerne aujourd’hui 2 ,5 millions de personnes dans notre pays, soit 7% des Français entre 18 et 65 ans ayant été scolarisés. Car, contrairement à l’analphabétisme qui caractérise les gens n’ayant jamais appris à lire et à écrire, l’illettrisme concerne ceux qui ont progressivement perdu l’usage de ces savoirs. Comment, dans ce cas, s’intégrer à la société et assumer pleinement son rôle de citoyen ? Mais comment ne pas voir, non plus, dans cet état de choses, l’influence d’une société de plus en plus aspirée par la gadgétisation technologique, au détriment des fondamentaux évoqués.
Non, il ne suffit pas de savoir pianoter sur un téléphone portable pour être un individu civilisé. Pas plus qu’il ne suffit d’envoyer, à longueur de journée, des messages rédigés dans un sabir de mots tronqués pour dire que l’on sait écrire. A l’heure où certains éducateurs préconisent l’abandon pur et simple de l’écriture calligraphique à l’école, nous soutenons au contraire que ces gestes-là, pour ancestraux qu’ils paraissent, sont nécessaires au développement cognitif harmonieux de l’enfant. Que l’on ne doit pas (pour de mesquines raisons économiques) sacrifier les bases d’une culture humaniste au profit des nouveautés du moment. Alors la pratique de l’informatique sera, pour nos élèves, un atout supplémentaire et non, comme c’est souvent le cas présentement, un amoindrissement de leurs capacités intrinsèques.
Jacques LUCCHESI
15:37 Publié dans numéro 15 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : informatique, fondamentaux, illettrisme, sabir
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