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09/02/2010

Grèves: les maires aussi










De mémoire de manifestant, on n’avait encore jamais vu ça. Après les ouvriers, les routiers, les cheminots, les traminots, les profs, les juges, les infirmiers, les prostituées, les étudiants, les lycéens et les retraités, c’était au tour des maires de descendre dans la rue, le 28 janvier dernier. Il faut quand même attribuer un pouvoir particulier à Nicolas Sarkozy : celui de faire l’unanimité des protestations contre lui et son gouvernement. Le candidat qui voulait en finir avec « l’esprit de mai 68 », le président qui a cherché à limiter le droit de grève jusqu’à le rendre insensible pour les usagers, aura réussi ce tour de force de faire défiler  – toutes tendances politiques confondues -  nos édiles courroucés. Et que réclament-ils, ces braves premiers magistrats de nos modestes communes ? Une augmentation de leur traitement ? Quoiqu’ils résident tous dans un hôtel de ville, ils  ne sont pas, pour autant, logés à la même enseigne. Beaucoup ne cumulent pas avec un salaire de ministre, de sénateur ou de député. Eh bien non ! Ils ne manifestent pas pour leur portefeuille personnel, ces hussards de la république, mais bien pour leurs administrés (et un peu, aussi, pour leurs prérogatives administratives). Car ils redoutent de voir leurs communes – ces communes pour lesquelles ils ont tellement trimés – avalées par les métropoles dans la nouvelle carte des régions projetée en haut lieu par Balladur et consort. A ce jeu-là, ce sont toujours les gros qui mangent les petits. Et les petits maires – comme, jadis, les « petits blancs » des colonies – n’ont pas envie, c’est naturel, de subir ce sort. Même ceux qui ont contribué à mettre en place l’actuel gouvernement, ou qui en ont bénéficié…
Est-ce que la menace de mettre en grève leurs mairies peut avoir une incidence sur cette perspective d’absorption juridico-administrative qui les inquiète tant ? A titre personnel j’en doute, surtout quand je me réfère à la mairie de Marseille. Si, d’aventure, celle-ci venait à suivre ce mouvement, il y a gros à parier que les Marseillais ne le sentiraient pas passer, vu l’état de non-travail endémique qui règne dans ses services. Mais ceci est une autre histoire.


Noël MONPERE  

01/02/2010

Sarkozy parle aux Français

Il est arrivé, l’air narquois, sur le plateau de Jean-Pierre Pernod vers 20H45 après avoir causé avec Laurence Ferrari des affaires du moment (dont, bien sûr, celle d’Henri Proglio). Le JT de TF1 : une sorte d’échauffement télévisuel pour lui permettre d’affronter les questions de 11 Français triés sur le volet. De la chômeuse diplômée au retraité besogneux, en passant par le patron de PME et le suppléant de l’Education Nationale, ils composaient un spectre assez représentatif de la société française actuelle. Et tous, évidemment, avaient des doléances spécifiques qu’ils allaient enfin pouvoir soumettre, en direct et en personne, à notre super-président. Sarkozy à TF1, c’est un peu Saint-Louis rendant la justice sous son arbre. Après presque trois ans de règne, le monarque républicain a eu le temps de peaufiner sa technique de communication et offre volontiers une image d’équanimité, aux antipodes de l’arrogance et de l’autoritarisme du candidat qu’il fut naguère. Il se contrôle et écoute paternellement ses interlocuteurs, même ceux qui le contestent ouvertement, comme Pierre, l’ouvrier syndicaliste de Renault. Mais, au fond, il n’a pas changé. Quelles que soient les questions, il a une réponse toute prête selon un schéma discursif en trois temps : d’abord déplorer, ensuite conforter en rappelant tout ce qu’il a fait, enfin annoncer tout ce qui reste à faire et qu’il va faire, évidemment, d’ici la fin de son mandat. Les promesses, c’est bien connu, n’engagent que ceux qui les écoutent.

Au delà de son exercice bien rodé d’auto-satisfaction et de son temps de parole toujours en inflation (encore une heure de plus, ce soir ; c’est « Joséphine, ange gardien » qui paiera la note), que lui reprochent toutes ces voix discordantes qui s’élèvent à la moindre de ses apparitions? De ne pas faire ses courses au supermarché ? Noblesse oblige. D’aimer davantage les patrons que les ouvriers ? On ne se refait pas à 55 ans. De préférer l’augmentation du temps de travail à sa redistribution proportionnelle ? Ah, ses diatribes récurrentes contre les 35 heures ! Ou peut-être, tout simplement, de ne pas avoir les moyens de ses ambitions. Contre toute attente, sur le plateau, le témoignage le plus embarrassant pour lui est venu de Bernadette, la timide employée de grande surface. Sans nommer ouvertement – on n’est jamais trop prudent – son employeur, elle a avoué avoir demandé plusieurs fois des heures supplémentaires – ces fameuses heures supplémentaires détaxées pour les patrons – et, chaque fois, elle a essuyé un refus de sa direction, au motif qu’il n’y avait pas assez de travail. Et notre bon président de prendre un air étonné : « Comment est-ce possible, madame ? Je vais aller lui tirer les oreilles. ». Quand on vous disait, voici trois ans, que c’était de la poudre aux yeux…

Erik PANIZZA