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04/04/2019

            Photo de famille

 

               

 

  On s’en doutait depuis longtemps mais il manquait, néanmoins, l’image qui scelle au grand jour leurs affinités profondes. C’est chose faite depuis dimanche dernier et leur rencontre amicale sur le plateau des Glières (Haute-Savoie) pour commémorer un haut fait de résistance en mars 1944. Emmanuel Macron et Nicolas Sarkozy posant ensemble pour les cameramen et les photographes, voilà de quoi donner du grain à moudre à tous les commentateurs de la chose publique. On sait, malgré quelques divergences, l’admiration réciproque que les deux hommes se portent. Mais cette poignée de main dit, plus qu’un long discours, le lien politique qui les unit aux delà des appartenances formelles. Car Macron est bien le continuateur du programme libéral établi par Sarkozy en 2007. En ce domaine, on peut même affirmer que l’élève est en train de dépasser le maître. Et ce ne sont pas les choix qu’il a fait, lors du mini-remaniement ministériel de lundi, qui contrediront cette évidence, puisque les trois nouveaux entrants au gouvernement (Sibeth Ndiaye, Cédric O et Amélie de Montchalin) sont des admirateurs avérés du jeune président. Tout comme Sarkozy, Macron fait peu de cas de son premier ministre en nommant directement les membres de l’équipe gouvernementale. C’est ainsi qu’on récompense les bons élèves. Et peu importe leur passé politique : ils ne sont là que pour appliquer, dans leurs secteurs respectifs, la politique du chef.   

Si François Hollande fait figure de chaînon manquant dans cette photo de famille, il ne faudrait pas croire qu’il est radicalement opposé  aux choix politiques de son successeur. Certes, il ne lui ménage pas ses critiques, ces derniers temps. Mais c’est quand même lui qui a offert à Macron son premier poste important en 2014. Lui encore, cette année-là, qui a initié le virage libéral d’un quinquennat qu’il avait pourtant placé sous les auspices de la gauche historique, ruinant du même coup les fondements du PS. On en constate aujourd’hui tous les effets.

 

Jacques Lucchesi

25/09/2014

Bruissements (41)

 

 

Gattaz : suspendre les jours fériés, déroger à la loi sur les 35 heures ou revoir  librement  le SMIC à la baisse, secteur par secteur : voici quelques propositions, parmi d’autres tout aussi antisociales, que Pierre Gattaz, dans un document d’une cinquantaine de pages, a avancé  pour conditionner un retour à l’embauche.  En cela, il confirme ce que tout le monde pensait dès janvier : que le cadeau fiscal proposé par François Hollande, dans le cadre du pacte de responsabilité, ne serait pas suffisant pour le patronat. Si une telle voracité peut choquer les âmes pures, elle n’a rien d’étonnant dans le contexte actuel. Lorsque les chaines publiques de télévision passent tous les soirs les clips du MEDEF à la gloire du travail, il n’y a aucune raison pour que son président adopte une attitude consensuelle. Si Gattaz voulait provoquer l’opinion publique, il y a réussi au-delà de ses espérances. Magnanime, il a déclaré, sitôt après, vouloir laisser un peu de temps au gouvernement pour régler ses propres conflits. Quand on a un ami aussi zélé que Manuel Valls à la tête de l’état, on aurait tort de le mettre au pied du mur et de heurter ainsi sa grande susceptibilité.

 

Sarkozy : en finira-t’on jamais avec Sarkozy ?  Au soir de sa défaite électorale, le 6 mai 2012, il avait surpris, presqu’ému, par la dignité de ses propos. Se mettre en retraite du pouvoir : après tout, il n’y a pas que la politique dans la vie. A peine 28 mois plus tard, chacun peut prendre la mesure de son inconstance en le voyant revenir, plus tacticien que jamais, sur la scène publique. Ce qui est encore le plus surprenant, c’est de constater l’admiration qu’il suscite toujours chez une certaine jeunesse, toute prête à lui servir de porte-voix. Avec lui, on est davantage dans le registre émotionnel du showbiz que de la politique. Mais il n’est pas certain que ses anciens électeurs préfèrent son nouveau masque humble et miséricordieux à l’ancien, celui du néo-Bonaparte plein d’ambition et d’énergie. Dimanche soir, sur le plateau de France 2, face à un Laurent Delahousse plus incisif qu’à l’accoutumé, il était aussi ridicule que pitoyable, cherchant ses mots quand il ne les mangeait pas, incapable d’avancer des idées politiques précises, se contredisant tranquillement, justifiant son retour par son grand amour de la France. On aurait cru entendre le Maréchal Pétain en 1940 : « Je fais don de ma personne à la France ». Sans même parler de sa complainte victimaire à l’encontre de la justice (qui n’en a pas fini avec lui). Comment croire un instant à sa sincérité ? La vérité, c’est que le quinquennat de Nicolas Sarkozy a été un échec, tant personnel que politique.  Tout comme Hollande à présent, il n’a pu tenir – et pour cause ! – ses engagements initiaux. Et il n’y a aucune raison objective pour qu’il fasse mieux la seconde fois que la première. Mais voilà, au fond de lui, il ne peut supporter que d’autres, dans son parti, prennent la place qu’il croit sienne – celle de la vedette, évidemment. Vous avez dit changement…

 

Ecosse : au terme d’un référendum très suivi, les Ecossais se sont prononcés  à 56%  contre l’indépendance vis-à-vis du Royaume-Uni. Choix prudent pour les uns, décevant pour les autres - à commencer par Alex Salmond, leader du parti indépendantiste - qui pensaient que leur région avait les moyens économiques de son autonomie. Quant à nous, Européens continentaux, il faudra continuer à échanger nos euros contre des livres pour visiter le pays des Highlands et du Loch Ness. Reste à savoir maintenant si David Cameron donnera plus de pouvoirs à l’Ecosse (mais aussi au Pays de Galles et à l’Irlande du Nord), comme il l’a officiellement déclaré. Même si ces élections écossaises pour l’auto détermination se sont avérées négatives ; même si, sur cette question brûlante,  elles ne sont pas une première – on ne peut que rappeler les exemples opposés du Québec et du Monténégro -, elles pourraient néanmoins inspirer d’autres régions européennes – la Catalogne en Espagne, la Padanie en Italie – que travaillent depuis longtemps des velléités séparatistes. Faut-il déplorer, sous la tutelle de l’UE, ce possible détricotage de vieilles nations qui se sont constituées, au fil des siècles, dans la contrainte et la douleur ? Il est encore trop tôt pour le dire. Bornons nous à constater que les nouveaux habits de l’Europe se taillent toujours dans ses vieux oripeaux.

 

Djihadistes : il était une fois trois braves petits Français qui étaient allés en Syrie faire ce qu’ils croyaient être leur Djihad. Arrêtés puis extradés par les autorités turques  – quel manque de chance ! -, ils furent d’abord  placés dans un avion à destination de Paris. Mais c’est finalement dans un autre vol, pour Marseille celui-là,  qu’ils firent leur retour glorieux en France. Là, aucun comité officiel, aucun policier pour les accueillir avec les honneurs que l’on doit à des héros de leur acabit: normal puisque c’est à Orly qu’ils étaient attendus. Sous le coup de la déception, ils s’évanouirent dans la nature, faisant savoir toutefois qu’ils se rendraient aux autorités si elles voulaient les interroger. C’est ce qu’ils firent le jour suivant, car c’étaient des garçons doux et coopératifs. Et comme le commissariat, où ils s’étaient présentés, était fermé, ils attendirent patiemment son ouverture. Bon ! Stoppons ici cette pseudo fable qui ne montre que trop les failles de notre système de sécurité,  prétendument  renforcé depuis l’engagement de la France contre l’état islamique en Irak. On voudrait en rire si ce n’était aussi grave. D’autant que ce cafouillage tragi-comique survient à peu près au même moment que l’enlèvement et l’exécution atroce d’Hervé Gourdel par des terroristes islamistes en Algérie. Son crime : avoir été un citoyen français en vacances. Même si nous devons ne pas céder à la paranoïa sécuritaire, voire à l’affolement (ce qui est le but recherché par ses assassins), nous ne pouvons pas, non plus,  ignorer la menace insidieuse que ces tensions internationales font peser sur notre territoire. Oui, nous sommes entrés dans une nouvelle forme de guerre et celle-ci exige de nous la vigilance la plus extrême.

 

Migrants : ont-ils été touchés par la grâce en entendant le pape François qualifier de « honte » la mort d’une centaine de migrants africains au large des côtes siciliennes? Toujours est-il qu’un couple de riches financiers italo-américains, Régina et Christophe Catrambone, ont décidé de secourir ces déshérités absolus. Pour cela, ils ont tout simplement créé leur propre ONG, Migrant Offshore Aide Station (MOAS), et fait transformer un ancien chalutier en navire hôpital. Il  patrouille désormais dans les eaux de la Méditerranée à la recherche d’éventuels naufragés,  secondé dans sa mission par des hors-bords et des drones. Une initiative sans tambour ni trompette et qui mérite d’être applaudie par ces temps de déshumanisation accélérée. Rappelons que depuis le début de cette année, ce sont près de 1900 réfugiés qui sont morts en espérant trouver un sort meilleur en Europe.

 

 

                     Erik PANIZZA

11/07/2014

Bruissements (39)

 

 

Sarkozy : il s’est débrouillé pour faire encore l’évènement de la semaine dernière. De mémoire de citoyen, on n’avait encore jamais vu un ex-président de la République être mis en garde à vue quinze heures durant puis, finalement, mis en examen. Devant les caméras de TF1, où il est allé s’expliquer dès le lendemain, Nicolas Sarkozy – sans d’ailleurs fixer une seule fois l’objectif – a juré qu’il était innocent des agissements reprochés, à savoir un financement occulte de sa campagne de 2007 par le maître de la Lybie, le défunt (mais pas regretté) Mouammar Kadhafi. Et de dénoncer un prétendu complot, vu que les deux juges qui instruisaient son affaire  - Claire Thépaut et Patricia Simon - étaient membres d’un syndicat de la magistrature plutôt orienté à gauche. Un argument repris en chœur par l’ensemble de ses amis les plus fidèles. Il faut dire que Sarkozy n’a jamais eu foi en la justice de son pays ; une justice un peu trop indépendante à son goût. Manque de chance : il était, dès le surlendemain, rattrapé par l’affaire Bygmalion et les fausses factures établies par Copé pour l’UMP, afin de justifier les dépassements de ses comptes de campagne en 2012. Vraiment, cela va être dur pour lui de redevenir un candidat crédible aux yeux des Français, en 2017. A l’exception, bien sûr, de ceux et celles qui en ont fait leur nouveau messie. Une bien étrange secte, comme on en conviendra sans peine.

 

Jaurès : à l’approche du centième anniversaire de sa disparition, Jean Jaurès fait l’unanimité dans la classe politique française. Nul ne peut contrôler sa postérité, mais tout de même…On croit rêver devant ce concert de louanges méritées quoiqu’illégitimes. Car chacun, à droite comme à gauche, veut s’approprier un peu de ses mannes. On sait avec quel aplomb Sarkozy s’est revendiqué de lui en 2007. Et c’est encore plus risible quand une Marine Le Pen va jusqu’à l’intégrer dans son panthéon politique personnel. Quant à Hollande, il le tire à présent du côté de sa vision économique social-libérale. Rappelons, si besoin était, que Jean Jaurès fut, en son temps, le leader de la SFIO et le fondateur de « L’Humanité », journal qui est resté à gauche contre vents et marées. Qu’à ce titre-là, il n’y a guère, dans le paysage politique actuel, que le Parti Communiste et le Front de gauche qui pourraient l’invoquer sans faire rire. Ainsi en va-t’il pour les grandes personnalités nationales élevées au rang de saints laïques en ces temps de grande incertitude.

 

Voile : une Française musulmane de 24 ans, qui se plaignait de ne pas pouvoir porter le voile intégral (burqa ou niqab, selon la longueur) dans l’espace public, a donc décidé de saisir la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) pour arbitrer son différend avec la loi française qui l’interdit depuis octobre 2010. Mais quoique réservée, sinon opposée à cette loi, la CEDH a quand même tranché en faveur de l’état français, rappelant à la plaignante que l’interdiction du voile intégral n’était pas fondée sur des discriminations religieuses mais sur le souci de préserver le « vivre-ensemble ». Comme quoi l’Europe peut parfois n’avoir qu’une seule voix. Pour que le bon sens puisse l’emporter sur les exigences communautaristes.

 

Albi : Nous connaissons tous des parents passionnels qui survalorisent leurs enfants, au point de faire un drame pour le moindre bobo, la moindre punition qui touche leurs rejetons. Mais de là à aller tuer l’auteur présumé de ce nouveau crime de lèse-majesté…L’affaire de l’institutrice mortellement poignardée, vendredi 4 juillet à Albi, relance bien des interrogations. Tant d’un point de vue moral que spatial, il n’y a plus assez de séparation entre la famille et l’école. Ainsi, tout respect dû à l’enseignant vole en éclats. La profession, on le sait, est devenue la championne du stress au travail, la plus exposée aux agressions de tout ordre et c’est lamentable. Quant à la meurtrière, rien ne peut absoudre son geste, rien et surtout pas un dossier psychiatrique. Ce qu’elle risque ainsi est ridiculement faible par rapport à l’acte abominable qu’elle a commis, qui plus est sur une autre mère de famille. Il faudra, un jour ou l’autre, revoir cette notion d’irresponsabilité trop généreusement attribuée à certains meurtriers. Car autrement, on se demande bien pourquoi ils pourraient mettre un frein à leurs pulsions destructrices. Et la peur continuera de gangréner des rapports sociaux déjà bien débilités.

 

                          

                                     Erik PANIZZA

15:13 Publié dans numéro 12 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sarkozy, jaurès, voile, albi