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07/04/2017

  Sur un débat télévisé

                              

 

 

 Au fil des mois C polémique, le dimanche soir sur la 5, est devenu un rendez-vous incontournable pour qui s’intéresse au débat d’idées actuel. Pour son émission du 2 avril dernier, Bruce Toussaint avait réuni sur son plateau une belle brochette d’invités pour débattre d’un thème particulièrement urgent : la moralisation de la vie politique. Parmi eux, on trouvait Philippe Val, ex-directeur de Charlie Hebdo, l’avocat Jean-Yves Le Borgne (soutien de François Fillon) et l’historien Michel Winock.

Professeur émérite à Sciences-Po, ce dernier est l’auteur d’une œuvre importante qui aborde les lignes de fracture de la vie politique française depuis plus d’un siècle. Citons, entre autres, « Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France », « L’affaire Dreyfus, vérités et mensonges » ou « Le siècle des intellectuels ». D’une telle personnalité, on peut logiquement attendre une qualité d’analyse et une profondeur de vue que n’ont pas tous les participants. Et cependant… La discussion tourne autour des dissensions du PS et du parjure de Manuel Valls quand l’historien fait une « sortie » contre Benoît Hamon. Selon lui Hamon, qui s’estime trahi par son adversaire des primaires citoyennes, n’aurait fait que trahir lui-même son parti lorsqu’il était au gouvernement. Autrement dit, protester et trahir seraient à mettre sur un même plan ? Ce seraient deux actions équivalentes ? Il y a là manifestement une erreur de jugement. Une chose est de s’insurger contre son camp à visage découvert, au motif que celui-ci ne tient pas ses engagements ; une  autre chose est de ne pas respecter sa parole et l’accord officiellement passé. Dans le premier cas, c’est une attitude noble, qui grandit moralement celui qui la porte, quitte à en payer le prix. Dans le second cas, elle rabaisse celui qui se dérobe, quelque soit le motif qu’il invoque.

Non, il n’y a pas d’équivalence entre la conduite de Benoît Hamon et celle de Manuel Valls dans cette campagne - qui en aura vu d’autres en matière de reniement. On mettra avec indulgence cette fausse comparaison sur le compte de la fatigue et de l’âge (Michel Winock a tout de même quatre-vingts ans). Mais cela méritait quand même une petite mise au point.

 

Jacques LUCCHESI

05/06/2015

Burn-out

 

 

 

Dans la surenchère d’anglomanie dont font preuve tous les médias de ce pays, le mot « burn-out » n’est pas le moins usité : et pour cause ! On pourrait assez facilement le traduire en français par « épuisement professionnel », mais le snobisme contemporain préfère, évidemment, son équivalent anglais. Soit ! Mais venons-en au cœur du problème. Benoît Hamon, l’un des rares représentants de l’actuelle majorité qui croit encore au socialisme, vient donc de déposer à l’Assemblée Nationale un amendement visant à faire reconnaître le burn-out comme une maladie professionnelle. Projet difficile mais ô combien louable par ces temps de compétitivité généralisée. Car il s’agit de différencier l’épuisement professionnel de la dépression à proprement parler, maladie qui relève d’une autre cause, d’un autre régime aussi. Hélas, et malgré le soutien de nombreux députés socialistes, il y a peu de chances pour que l’amendement porté par Benoit Hamon trouve une issue favorable dans le contexte actuel. Les chiffres du chômage ne cessent d’augmenter et la tendance gouvernementale est bien plutôt de caresser les patrons dans le sens du poil. Pensez donc ! Une loi qui débaucherait provisoirement  quelques trois millions de salariés et aux frais de leurs employeurs, par-dessus le marché ! On préfère – reprise oblige - quémander des emplois nouveaux au patronat et durcir le ton contre les chômeurs de longue durée. Voilà qui est plus cohérent avec la politique menée depuis un an et demi.

Et pourtant ! Qui ne sait qu’il y a un lien de cause à effet entre le burn-out et le chômage ? C’est même l’un des principaux motifs de stress des salariés qui vivent quotidiennement sous la menace de cette nouvelle épée de Damoclès, incités à travailler au-delà de leurs forces pour satisfaire aux exigences de leurs employeurs. Car les patrons  peuvent compter sur une «armée de réserve » en perpétuelle expansion et leurs employés le savent bien. On voit bien dans quel cercle vicieux sont pris tant de gens en France. Ils devraient, médicalement parlant, s’arrêter momentanément de travailler, mais la plupart ne le font pas par crainte de ne plus retrouver leur emploi. D’un côté, l’épuisement, la maladie et peut-être la mort physique, de l’autre la mort sociale et la dépression : faites votre choix, messieurs-dames. Ce système infernal serait donc l’aboutissement des luttes sociales du XXeme siècle, avec leur aspiration à une société libérée du travail aliénant ? On a du mal à le croire. Comme on a du mal à admettre qu’il n’y ait pas d’alternative à cette entropie généralisée. Il faut prendre au sérieux le burn-out des individus sous peine de risquer, à plus ou moins courte échéance, le burn-out du peuple français tout entier.

 

 

                    Erik PANIZZA

21/05/2013

Class-Actions : vers une réglementation française

 


 

 Pour rappel les Class-Actions sont ces procédures collectives qu’entreprennent, devant la justice, des particuliers lésés par une même société. Cette pratique, assez courante aux USA, est peut-être un bon indice de démocratie, mais elle fait avant tout les choux gras des cabinets d’avocats chargés de plaider ces affaires. Les nombreux petits actionnaires français qui avaient misé sur Vivendi, avant que Jean-Marie Messier ne coule quasiment le groupe par sa gestion délirante, savent bien de quoi je parle : ils attendent encore un dédommagement pour les pertes subies. Ministre délégué à la consommation, Benoit Hamon a donc décidé d’introduire, le 2 mai dernier face à ses collègues, cette possibilité de recours collectif contre des entreprises françaises ayant manqué à leurs engagements. Même avec les limitations qui encadrent cette prochaine loi – le domaine  de la santé y est ainsi soustrait -, c’est quand même une bonne nouvelle pour les particuliers, eux qui sont de plus en plus soumis, dans la vie quotidienne, à des propositions abusives, notamment dans le secteur de la téléphonie mobile et d’Internet. Désormais, ils pourront plus facilement saisir la justice dans des conflits que la plupart – vu leur isolement – jugeaient perdus d’avance. Il ne faut pas, pour autant, s’attendre à des miracles et les procédures à venir  s’annoncent, d’ores et déjà, longues et complexes. D’abord il faudra faire  la preuve que telle annonce incriminée était mensongère ou anti-concurrentielle. Ce sera ensuite aux associations de consommateurs - et à elles seules - de porter les plaintes des particuliers devant la justice. Quant aux demandes d’indemnisation, elles devront être constatées et avalisées par l’Autorité de la Concurrence. Comme on le voit, les plaignants devront s’armer de patience, mais l’espoir n’est-il  pas toujours au bout du tunnel ? Ils pourront peut-être récupérer ainsi une partie de l’argent que ces entreprises malhonnêtes préfèrent encore verser, lorsqu’elles sont épinglées, dans de lourdes amendes, quitte à rehausser ensuite les factures de leurs clients. Au bout du compte, un juste retour des choses. Et une vraie – mais trop rare – mesure socialiste en ce printemps de toutes les rancoeurs.

 

                                Bruno DA CAPO