Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

22/06/2011

Une pensée pour Carla




Un gamin de quatorze ans tue une camarade du même âge à la sortie de l’école : voilà une nouvelle qui fait froid dans le dos ! L’histoire se passe en France en 2011 à Florensac, dans le collège Voltaire, plutôt tranquille et sans histoires. Le gamin faisait de la boxe comme d’autres font du foot ou du basket. Soit. Mais quand il a cogné, il savait bien ce qu’il faisait. On imagine qu’un entraîneur apprend à ses poulains les coups à éviter et ceux qu’il ne faut pas donner. Il a apparemment « mis le paquet ». En frappant à mort sa petite camarade, il a plongé deux familles dans le drame : la sienne et celle de sa victime. En y allant trop fort, il a stoppé deux vies : celle de Carla à tout jamais, la sienne qui portera ce crime jusqu’à sa mort. Une tragédie qui, lorsqu’on a posé les faits, renvoie à notre société qui est violente et secrète en son sein ces drames qui trop souvent font l’écume des journaux. A qui la faute ? A ce gamin ? A l’apprentissage de la boxe ? Ou au modèle compétitif, montré comme exemplaire, qui veut que nous devons être battants, gagnants, champions de tout et de n’importe quoi ? Nos sociétés reposent sur ces valeurs de va-t-en guerre ; elles exaltent la force, la puissance sur l’autre. Non seulement nous nous devons d’être beaux, séduisants, sans un gramme de graisse, mais il nous faut aussi montrer sa force et gonfler ses biceps pour être sûr d’écraser son prochain. Ce qui se passe à la corbeille de nos Bourses, ou dans nos ministères, ou dans nos grandes entreprises, - à tous les échelons de notre mode de société – c’est le  fameux struggle for life, où l’on s’assure les places de choix et gros bonus, les bonnes tables, les résidences huppées et les escort-girls. Bref, un modèle cynique et édifiant pour la jeunesse ! On me dira : quel est le lien avec ce drame ? Le lien, c’est que tant qu’on décidera de vivre sur le culte de la force, tant que la compétition sans limites nous fascinera à ce point, nous devrons récolter ce qui aura été semé au cœur même de l’enfance : violence, brutalité et crimes.

                                             Yves Carchon

18:59 Publié dans numéro 20 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : carla, ecole, boxe, violence

17/06/2011

Modeste leçon de géopolitique



On massacre en Syrie. Allègrement, gaillardement, apparemment sans états d’âme. Sur ordres de Bachar el-Assad, un monstre froid que l’on dit cultivé puisqu’il parle plusieurs langues et qu’il a fait ses universités en occident ! Parle-t-il la langue démocratique ? A l’évidence non, puisqu’il extermine son peuple sans qu’il y ait d’ailleurs beaucoup d’émoi chez nos grands dirigeants imbus pourtant de liberté et de démocratie. Déjà, dit-on, (par la bouche même du philosophe André Gluksmann) on intervient en Lybie ! Alors, s’il nous fallait aussi intervenir en Syrie ! Et puis, Bachar, c’est un ophtalmologiste de formation ; il n’a donc pas froid aux yeux ! Il sait ce que veut dire : œil pour œil, dent pour dent ! Il eût été dentiste que sa férocité eût été à son comble ! Ses relations très agressives, pour ne pas dire plus, avec l’Etat israélien rendent les choses encore plus difficiles pour les Occidentaux. De confession alaouite, branche de l’Islam chiite, on sait qu’il est aussi très proche de la République théocratique d’Iran. Voilà qui n’est donc pas si simple, disent nos diplomates.  Si la Syrie devait s’autodétruire, on peut gager qu’un grave déséquilibre de la région entraînerait une redistribution des cartes. Mais la Turquie est là, qui accueille aujourd’hui dix mille Syriens fuyant la guerre et leur pays. La Turquie, grand pays, à qui l’on a fermé la porte de l’Europe et de laquelle on devrait s’inspirer quant aux problèmes migratoires... Seulement voilà, la marge de manœuvre turque est très étroite.  Les Turcs sont embêtés puisqu’ils ont intégré depuis des lustres des Syriens alaouites, eux-mêmes prêts à conforter le régime sanguinaire de Bachar el-Assad. Au risque de mettre en cause leur harmonie interne, Erdogan d’Ankara doit donc jouer serré. On voit que rien n’est clair quand on s’empoigne avec les enjeux politiques d’une région. Doit-on dire pour autant qu’il n’y a rien à faire ? Non, trois fois non : on ne peut tolérer qu’un peuple soit trucidé et agonise sous nos yeux. Il nous faut donc intervenir d’une manière ou d’une autre !

                                                Yves Carchon

14/06/2011

De la délation allusive

 

         

 

 

 Il est des retours médiatiques qui ne grandissent guère ceux soudainement replacés sur le devant de la scène. Concernant Luc Ferry, on aurait préféré que ce soit pour un nouveau livre (il en a écrit de forts bons). Mais l’époque est, hélas, aux ragots infâmants et le philosophe attitré de la Droite actuelle n’a manifestement pas évité ce piège tendu aux élites. En affirmant publiquement qu’il en savait long sur les tendances pédophiles de quelques anciens ministres tout en se gardant de livrer des noms, il n’a fait qu’ajouter au malaise politique ambiant, conséquence des récentes affaires Strauss-Kahn et Tron. Cette attitude pour le moins ambiguë n’a pas manqué de soulever la réprobation, y compris dans son propre camp. Mais peut-être que Luc Ferry est tout simplement en train d’expérimenter un nouveau concept : la délation allusive. Celle-ci consiste, on l’aura compris, à s’attribuer la connaissance de secrets propres à menacer des personnalités qui se croyaient à l’abri de la justice. Mais cet élan tardif de la conscience morale (qui étouffe, bien sûr, sous le poids des dits secrets) est nuancé par une forme de pudeur – ou de magnanimité - s’interdisant tout grand déballage. Dès lors, on ne dit rien en sachant tout, ou plutôt on procède par allusion, comme dans un jeu de devinettes. Ainsi se place-t’on dans  une position attentiste de supériorité tout en maintenant le trouble dans l’opinion publique. Quand on sait que ces prétendues révélations pourraient concerner des élus socialistes, on ne peut manquer de penser que tout cela ressemble à de la stratégie bassement politicienne. Depuis, une affaire de népotisme financier – au demeurant vite épongée - est venue ternir l’armure vertueuse du chevalier blanc Luc Ferry. On se gardera de mettre au même niveau de petites malversations et des pratiques pédophiles. Mais la vraie sagesse eût été quand même de ne pas remuer tant de boue.     

 

 

                                                     Erik PANIZZA