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31/10/2009

Sexe, mensonges et politique



La recette est connue depuis longtemps. Prenez un homme politique en vue, dénichez dans sa vie une zone d’ombre – une maîtresse ou un amant douteux -, faites cuire le tout dans une sauce médiatique pleine d’indignation vertueuse et vous aurez rapidement l’un de ces croustillants scandales dont la société moderne est si friande. Et les commères de renchérir un peu partout :
« Tous des tordus, ma bonne dame. Dire que ce sont des gens comme ça qui nous gouvernent. Quelle époque ! »
Un préjugé idiot voudrait, en effet, que dans notre république, nos dirigeants soient impeccables, qu’ils donnent  l’exemple à leurs administrés. Mais la nature humaine étant ce qu’elle est, cela est bien sûr impossible. Dans leur ensemble, les hommes politiques ne sont  pas meilleurs que nous, les obscurs, les sans-grades ; ils ne sont pas pires, non plus ;  ils sont surtout plus exposés. Et la vérité finit toujours par sortir du puits où l’on croyait l’avoir enfouie.
Le dernier en date à avoir subi ce climat délétère est notre actuel Ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand. Un nom plutôt difficile à porter quand on est membre d’un gouvernement de droite. Certains diraient même que ça sonne faux.  Nous ne reviendrons pas ici sur l’ironie de sa nomination, rue de Valois. Contentons-nous de rester au plus près des mécanismes qui ont abouti à le mettre dans cette inconfortable posture. Il y a d’abord l’affaire Polanski et son soutien chaleureux au cinéaste rattrapé par son sulfureux passé. Qui s’assemble se ressemble : pour le populo et sa nouvelle égérie, Marine Le Pen, ça ne fait pas de doute. Un violeur et un homo (il ne s’en est jamais caché). Entre eux, le trait d’union pourrait bien être la pédophilie, ce vice suprême. Sinon, qu’est-ce qu’il irait faire en Thaïlande, le « neveu » ? Des randonnées sur les îles volcaniques ? Tous des pervers. D’ailleurs, prenez et lisez. Car Frédéric Mitterrand écrit des livres. Pas que des livres sur les étoiles du cinéma mais des récits, de véritables tranches de vie – la sienne – où, dans un style alerte et riche en détails, il révèle complaisamment ses turpitudes personnelles. Non sans une forme de résipiscence, entre délices et regrets, comme autrefois Marcel Jouhandeau et quelques autres de sa « secte ». Un titre comme « La mauvaise vie » ne résonne t’il pas comme une excuse préalable ? Voilà son talon d’Achille. En soi ce n’est pas une faute, mais ça peut être une faiblesse quand on accepte des responsabilités ministérielles. Car sur ce versant Frédéric Mitterrand est, bien sûr, inattaquable. Et pour cause ! Il n’a encore rien fait. Et les calomnies du FN de faire leur bonhomme de chemin, relayées, amplifiées par les porte-voix socialistes. Le voici sur la sellette. Trop, c’est trop ! Il va lui falloir s’expliquer pour endiguer ce torrent de fiel. Où ça ? Sur TF1, bien sûr, la nouvelle « voix de son maître », à l’heure fatidique du JT de 20 heures. Une gageure. Il va d’ailleurs faire mieux que lui en audience. Huit millions de téléspectateurs haletants (j’en étais), les yeux exorbités dans l’attente de sa confession : qui dit mieux ?

Il n’empêche. Devoir faire la preuve de sa bonne foi devant les caméras n’a rien d’un petit exercice de santé. Face à lui, il a pour interlocutrice la grande prêtresse de l’information pré-digérée, Laurence Ferrari elle-même (d’accord, il y a pire en matière d’inquisition). Mais la blonde présentatrice prend très à cœur son nouveau rôle de procureur. Elle n’a pas l’intention de se laisser mener par le bout de son joli nez. Et de revenir plusieurs fois à l’assaut :
« Monsieur Mitterrand, avez-vous eu, oui ou non, des relations tarifiées avec des garçons mineurs ? » 
L’aplomb de Frédéric Mitterrand face à son insistance baveuse force l’admiration. Manifestement, il s’est bien préparé à l’épreuve. L’avocat que fut  son oncle parle en lui. Du grand art. Tour à tour repentant et péremptoire, les yeux baissés ou dominateurs, il entend avec tout le bagout dont il dispose faire la preuve éclatante de sa sincérité. Et montrer, au passage, qui est le maître ici.
« Oui, j’ai eu des rapports tarifiés avec des garçons thaïlandais. Mais c’étaient des hommes sensiblement du même âge que moi. Enfin, Laurence Ferrari, je sais faire la différence entre un boxeur de 40 ans et un jeune adolescent. »
De cela nous n’en doutons point. Au fait, vous en connaissez, vous, des boxeurs de 40 ans qui font la retape ? A Bangkok comme à Paris, les garçons de passe sont, en général, chômeurs ou étudiants. Ils sont peut-être majeurs mais n’ont guère plus de 20 ans. Normal : sur ce marché, les amateurs recherchent avant tout la chair fraîche. La différence est, bien entendu, dans les tarifs pratiqués d’un continent à l’autre.  C’est sans doute de bonne guerre mais la vérité que clame Frédéric Mitterrand, face à Laurence Ferrari et aux téléspectateurs, est néanmoins  mâtinée de mensonge. Ce n’est pas exactement la vérité relatée dans les pages de son récit. Où l’on peut lire sans équivoque, qu’il aime lui aussi la chair fraîche : pas des enfants, non, mais quand même de jeunes hommes. En soi, ce n’est ni mal ni bien. Il est autrement plus navrant – sinon ridicule - de condamner le tourisme sexuel quand on est soi-même client. Conclure un plaidoyer  aussi courageux et brillant par une note aigre de conformisme, quel gâchis! Mais n’est-ce pas ce que l’on appelle vulgairement saisir la balle au bond ? 
Finalement,  quelle morale peut-on tirer de cette affaire assez lamentable ? Sans doute que le vrai scandale n’est pas celui que l’on voulait nous faire croire. Le vrai scandale, c’est la bassesse de la vie politique française, tous partis confondus. Elle ne vaut pas mieux que celle américaine qui, quelques dix années plus tôt, se déchaîna contre un président progressiste, au motif que celui-ci s’était fait tailler une pipe par une stagiaire visiblement énamourée. Le vrai scandale, c’est de juger un homme politique sur ses mœurs (ou sur son allure physique) plutôt que sur son action publique. Mais la France n’est heureusement pas l’Amérique. Le puritanisme y a un terreau moins ancien et moins vivace que le libertinage. Quand tout cela aura refroidi, quand la pâte du soufflet aura retombé, Frédéric Mitterrand regardera peut-être comme une chance la mésaventure qui lui est arrivée. Provoquer une tempête  avec un livre : quel privilège de nos jours ! Encore fallait-il, pour en subir la rançon, disposer déjà d’un capital de notoriété.




Jacques LUCCHESI

19/10/2009

fils à papa







Depuis longtemps maintenant, les enfants ont pris la déplorable habitude de décevoir leurs parents. Quoi ! On mise tous nos espoirs sur eux ; on se serre la ceinture pour les nourrir, les habiller et leur payer de bonnes études ; et ne voilà t’il pas qu’un jour, ils vous déclarent tout de go qu’ils se foutent pas mal de vos sacrifices, qu’ils veulent vivre leur vie sans rendre de comptes à personne. Sempiternel conflit des générations. Vous-êtes vous demandé pourquoi tout va si mal dans cette société ? C’est parce que le jeunes ne veulent en faire qu’à leur tête, qu’ils ne savent plus écouter les anciens. Comme dirait la mère Denis : c’est bien vrai, ça. »
Notez bien qu’il y en a encore un petit nombre qui suivent les conseils avisés de leurs aînés. Ceux-là n’iront jamais à l’encontre des intérêts familiaux, car ils savent bien où est leur avenir. Et cette conduite, aussi docile que prévoyante, paie toujours. Voyez Jean Sarkozy – peut-être, à l’heure actuelle, le plus parfait exemple de fils à papa. Il n’a jamais déçu son illustre paternel. Il lui a même emboité le pas à peu près sur tout : mariage précoce à 22 ans, études de droit (il est actuellement en 2eme année), engagement dans la vie politique locale (à Neuilly, pourquoi se compliquer la vie ?). C’est ainsi qu’en 2008, il a été élu conseiller municipal UMP de cette modeste commune puis, dans la foulée, président du groupe UMP du Conseil Général des Hauts-de-Seine. Ce n’est pas mal du tout quand on y songe.
Sa candidature et sa probable élection, en décembre prochain, à la tête de l’EPAD marquent  une nouvelle étape dans son irrésistible ascension. Que voulez-vous ? Même son prédécesseur, le sympathique Patrick Devedjian – 65 ans depuis quelques semaines –, était atteint par la limite d’âge : il fallait bien que quelqu’un se dévoue pour ce poste. La nouvelle de cet acte méritoire a suscité pourtant plus de protestations que d’enthousiasme. Elle aura au moins eu l’avantage d’éclairer une structure administrative et financière que presque personne ne connaissait avant cela. Et celle-ci, à l’examen, n’a rien de négligeable. Concrètement, l’Etablissement Public d’Aménagement de la Défense (comprendre le quartier d’affaires parisien, pas la force militaire nationale), c’est 160 hectares, 2500 entreprises et 3,3 millions de m2 de bureaux où travaillent 150 000 salariés. Au final, il brasse la bagatelle de 115 millions d’euros par an.
La gouvernance de cette place-forte économique devrait logiquement échoir à un haut fonctionnaire en fin de carrière, sanctionnant un parcours professionnel sans faille. Elle va donc revenir à un jeune homme de 23 ans qui n’a même pas terminé son cursus universitaire. Quand on sait quels types d’emplois – réceptionniste d’hôtel ou serveur dans un fast-food – sont proposés aux étudiants du même âge, on a de quoi rester pantois devant une pareille histoire. Elle illustre on ne peut mieux les dérives du pouvoir et le mépris de l’opinion publique affiché par Sarkozy père. Rêve-t’il secrètement de créer une forme nouvelle de monarchie sur ce qui reste de la Cinquième République ? Dans ce cas, on comprendrait mieux la percée de son fils cadet, recueillant à l’instar des anciens dauphins titres et prébendes dès son plus jeune âge. Il n’en reste pas moins que nous vivons encore dans un régime électoraliste. Et que le vote populaire pourrait bien sanctionner aux Régionales, voire aux Présidentielles, de telles pratiques régaliennes. A condition, toutefois, que les Français soient encore capables de sentiments républicains.



Bruno DA CAPO 

17:14 Publié dans Numéro 4 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : epad, sarkozy, parents, enfants

10/10/2009

la carotte et le bâton









Pour gouverner les peuples, les dirigeants de toutes les époques ont toujours joué sur deux ressorts psychologiques universels : la crainte et la récompense, le bâton et la carotte. Certains usaient (et usent encore) beaucoup du bâton, d’autres un peu moins – démocratie oblige -. Mais tous  continuent d’agiter la carotte pour séduire et faire avancer le bétail humain. Pour républicain qu’il soit, notre actuel gouvernement emploie les mêmes procédés. La nouveauté est qu’il les applique maintenant dès l’école. Les nouvelles générations d’élèves sont, manifestement, peu entrainées à l’effort. La faute en incombe, pour beaucoup, au marché et à ses gadgets qui détournent une grande partie de leur attention. La quête de l’excellence, avec les marques académiques du succès, ne les motive plus guère. Dans le contexte actuel, faire de brillantes études n’est plus l’assurance d’une vie professionnelle réussie, tant la concurrence est rude. C’est, au mieux, un acquis pour une meilleure insertion, d’ailleurs pas forcément dans la filière choisie. A l’inverse, rater sa scolarité n’est pas vécu comme un drame, vu que c’est dur pour tout le monde. Dans ce cas, l’esprit de débrouillardise viendra suppléer à l’instruction écourtée. On sait à quelles impasses ces raccourcis peuvent mener…Bref, les élèves ont tous de bonnes raisons de ne pas se prendre  la tête, pour employer une expression de leur cru. Dans ces conditions, pourquoi ne pas leur faire miroiter de petits  bonus qui stimuleraient  leur assiduité? C’est ce que Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives, a proposé d’expérimenter dans le secondaire. Certes, ce n’est pas très moral, ça en dit même long sur l’abaissement général,  mais là aussi, la fin justifie les moyens. Après tout, bien des familles, par le passé, pratiquaient cette tactique, offrant un cyclomoteur ou une voiture à leurs rejetons lorsqu’ils étaient reçus bacheliers. Pour les uns, la carotte prendrait ainsi l’allure d’une cagnotte collective, pour d’autres des places gratuites à des matches de foot (les possibilités de gratifications ne sont pas closes). La proposition de Martin Hirsch vient même à point nommé. Car après toute une série de mesures répressives pour faire régner l’ordre dans les collèges et leurs abords, on ne pouvait pas encore donner du bâton dans les chaumières. Imagine t’on quelles protestations et quelle impopularité aurait entrainé, dans tout le pays, l’imposition de pénalités financières  frappant les élèves – et donc leurs parents – les plus indisciplinés ?  La recherche du bien public a quand même ses limites.
Notez bien qu’il y a encore mieux que l’argent ou le foot pour inciter des adolescents turbulents à venir en classe et à suivre plus attentivement le programme. Pourquoi ne pas aller au bout de cette logique hédoniste et leur offrir, en cas de bons résultats, quelques délicieux moments avec des créatures féminines de leur choix ? Le « deal » n’est pas nouveau : rappelons-nous, voici un siècle, qu’il n’était pas rare que les pères emmènent leurs fils au bordel lorsqu’ils arrivaient à l’âge de ces jeux intimes. Je veux bien parier que cette proposition, dûment transformée en loi effective, ferait rapidement monter le niveau scolaire général. Sommes-nous devenus si puritains en France pour ne pas y penser un peu ? Ce serait, dans ce cas, vraiment un signe de rupture avec nos vieilles frilosités.



Austin Power