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10/03/2017

           Fillon s’accroche

                 

 

 

On se demande parfois ce que peut représenter un candidat pour ses électeurs de base. Que peuvent-ils bien attendre de lui à la tête de l’état au point de pleurer à l’évocation de ses déboires ou de le toucher comme s’il était le Messie. Comment croire, en effet, qu’il puisse être le seul capable de « sauver le pays » et ne rien vouloir entendre de ce qui lui est reproché. Il y a quelque chose de profondément immature, d’irrationnel et même de malsain dans ce genre d’effusions affectives, surtout lorsqu’ elles se déversent dans le champ politique. C’est ce pathos pourtant qu’on a pu voir, la semaine dernière, autour de François Fillon. Il est vrai qu’il était dans la tourmente, malmené par les médias et les sondages, mis prochainement en examen par la justice, lâché par quelques-uns de ses principaux soutiens (Thierry Soler, Patrick Stéfanini, Bruno Lemaire). Mais ne doit-il pas qu’à lui-même d’avoir fait douter de la légitimité et du bien-fondé de sa candidature ?

Cependant Fillon a choisi de donner raison à ses « disciples ». Pas question pour lui de se retirer de la course à l’Elysée. Et d’organiser une manifestation de protestation contre ses supposés persécuteurs, avec le soutien des ultras cathos de l’association Sens Commun. Dimanche dernier, place du Trocadéro, ses supporteurs étaient venus en nombre – cinquante mille selon la police, deux-cent mille  selon les Républicains -, bravant la pluie et le froid pour répondre à son appel à résister. Face à eux, entouré de quelques fidèles (le dauphin François Baroin, la grande duchesse Valérie Boyer, le vicomte Luc Chatel), Fillon a réaffirmé sa détermination à aller jusqu’au bout et surtout à être le seul choix possible dans son camp. Plus que jamais il s’est moulé dans le rôle – parfaitement factice - de l’homme providentiel ; ce qui est une façon de faire croire qu’il a l’envergure d’un président. Dans la foulée, il également convaincu les instances de son parti de renoncer à l’idée d’un plan B, d’autant que Juppé n’a pas insisté pour le remplacer. Sa personnalité a ainsi pris le pas sur les discussions de fond, tant il est vrai qu’une élection présidentielle privilégie davantage un homme qu’un programme.

Du reste, on voit mal comment Fillon  pourrait faire autrement à présent. Et si d’aventure, il parvenait à être élu, il pourrait au moins obtenir la suspension des enquêtes judiciaires pendant cinq ans (ce qui serait très appréciable dans son cas). Cependant, on peut douter de sa capacité à rassembler les Français au delà de son électorat de base (environ quatre millions de personnes). Sa chute dans les sondages le met, au mieux, en troisième position derrière Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Certes, on a eu droit à pas mal de surprises ces temps-ci. Mais, sauf à tenir les électeurs pour des imbéciles, il faut espérer que le jugement des urnes confirmera, dans six semaines, celui des échantillons de sondés.

 

 Jacques LUCCHESI  

02/05/2012

La contre-fête du travail

 

               

 

 

 Quoiqu’il soit revenu, au cours de ces derniers jours, sur son idée du « vrai travail », Nicolas Sarkozy n’en a pas moins organisé, hier, place du Trocadéro, cette grande réunion qui se démarquait sensiblement des traditionnels défilés syndicaux du 1er mai. Et de prier ceux-ci de « baisser le drapeau rouge  pour servir la France et les travailleurs ». Aucun des syndicats, de la CGT à la CFDT, n’a suivi, évidemment, cet appel insidieux qui se double, en outre, d’un parfait contre-sens historique. Car Jean-Luc Mélenchon avait beau jeu de le rappeler au président-candidat: « Le 1er mai est rouge depuis toujours ». Depuis toujours, c'est-à-dire depuis 1886, quand les syndicats et les ouvriers américains ont, les premiers, fait grève pour bénéficier de conditions plus décentes de travail. Une exigence légitime qui devait trouver rapidement un écho en France, mais aussi une forte résistance chez les dirigeants de la Troisième République. Ainsi, à Fourmiès, le 1er mai 1891, la troupe fera feu sur des manifestants pacifiques, tuant dix d’entre eux mais transformant aussi ce jour tragique en un symbole absolu des revendications populaires. Il faudra cependant attendre 1919 pour que la journée de 8 heures devienne effective en France et le 1er mai de l’année suivante pour que ce jour soit officiellement chômé. En 1941, Pétain tentera de le récupérer politiquement en proposant de le salarier. Une mesure qu’aucun gouvernement de l’après-guerre ne remettra plus en cause. 

Oui, c’est cela le 1er mai. Pas la fête de Jeanne d’Arc ni, non plus, celle du « vrai travail », c'est-à-dire ce travail servile et abêtissant que n’ont cessé de promouvoir, depuis cinq ans, Sarkozy et ses sbires  au nom de la productivité et du redressement national. Le 1er mai, c’est le rappel que le travail est fait pour l’homme et non pas l’homme pour le travail. Le 1er mai, c’est moins la fête du travail que celle du loisir péniblement conquis sur celui-ci par la détermination et le courage des hommes. Cette tension vers une vie meilleure, cette volonté de progrès social continu, même avec les bémols qu’impose la conjoncture économique actuelle, un seul candidat la porte à présent dans cette élection présidentielle : François Hollande.

 

                           Bruno DA CAPO