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15/09/2016

De la santé des politiques

         

 

 

 S’il est une activité qui exige de la santé, c’est bien la politique, surtout à son plus haut niveau. Tellement de charges et d’obligations pèsent sur celui – ou celle – qui exerce le pouvoir suprême. Et même si des armées de conseillers et de secrétaires sont là pour le soulager des tâches procédurales, il ne peut se soustraire à la représentation publique et aux décisions relevant de sa seule responsabilité. Oui, il faut beaucoup de lucidité – et donc de santé – pour cela. Or, sans d’ailleurs remonter très loin dans l’Histoire, on constate que les gouvernants des grandes nations ont rarement joui d’une santé parfaite. Ainsi Roosevelt était, à la fin de sa vie, devenu paralytique. Des douleurs dorsales chroniques accablaient Kennedy, l’obligeant à prendre quotidiennement de la cortisone. Quant à Boris Eltsine, premier président de la Russie post-soviétique, c’était un alcoolique invétéré qui souffrait de problèmes cardiaques, ce qui rendit pathétique la fin de sa gouvernance. En France, on se souvient, bien sûr, de Georges Pompidou et du cancer qui devait l’emporter avant la fin de son mandat. Plus chanceux ou plus habile, François Mitterrand parvint à cacher le sien pendant douze ans aux Français, ce qui créa une durable polémique : devait-il mentir sur son état de santé pour se maintenir au pouvoir ? Car, dans ce domaine aussi, les dirigeants d’une nation démocratique doivent rendre des comptes au peuple.

A présent, comme on l’a vu dimanche dernier, c’est Hillary Clinton qui est attaqué par Donald Trump sur sa prétendue santé défaillante. Selon lui, elle n’aurait pas les capacités physiques pour assumer les responsabilités qu’elle brigue. On sourit devant la bassesse de ces attaques politiciennes – d’autant qu’elles viennent d’un adversaire qui a un an de plus qu’elle. Certes, à New-York, un peu après les commémorations du 11 septembre, Hillary Clinton a fait un léger malaise et on l’a vue chanceler avant d’entrer dans sa voiture. Elle a rapidement riposté en disant publiquement qu’elle souffrait d’une pneumonie – ce qui n’est pas une affection incurable. Vérité ou mensonge ? Nous ne pouvons pas, à l’heure actuelle, trancher avec certitude. C’est pourtant là le nœud du problème. Car la santé des politiques implique des enjeux qui s’accommodent fort bien de la dissimulation. Mais elle ne peut malgré tout primer sur un programme cohérent.      

 

                     Jacques LUCCHESI

05/07/2016

Du nouveau sous le soleil

 

 

Au début des années 80 le monde découvrait, à l’occasion d’un cri d’alarme lancé par quelques scientifiques, un aspect essentiel de l’environnement terrestre : la couche d’ozone. A l’observation  celle-ci  laissait apparaître un trou de plusieurs dizaines de millions de kilomètres carrés au dessus de l’Antarctique. Rappelons que cette pellicule de gaz bleuté a pour fonction de filtrer le rayonnement ultra-violet, par là d’en atténuer les effets négatifs. Très vite on comprit quelle menace pour la santé humaine représentait cette annonce. Les climatologues en détectèrent vite la cause : l’émission de gaz chlorés contenus massivement dans les aérosols et les réfrigérateurs. Le facteur humain était donc responsable au premier degré de cette inquiétante détérioration, ce qui fut clairement exposé en 1987, à Montréal, au cours d’un congrès qui fit date. Des mesures drastiques furent prises à cette occasion, suivies par l’ensemble de la communauté internationale. L’heure n’était plus aux tergiversations ; il fallait traquer ces gaz délétères partout où nous les avions introduits si on voulait éviter une épidémie de cancers cutanés. Tout comme le « trou de la Sécurité Sociale », le « trou de la couche d’ozone » venait de faire son entrée dans le panthéon des expressions médiatiques et n’allait plus quitter les bulletins d’informations.

Près de trente ans plus tard, après quelques phases de rétraction et d’expansion, la couche d’ozone s’est en partie reconstituée, gagnant ainsi plus de quatre millions de kilomètres carrés sur son déficit initial. Dans le concert de catastrophes médiatisées qui nous accable  quotidiennement, cette bonne nouvelle a de quoi nous réjouir (surtout en cette saison). Voilà au moins une virginité dont la reconstruction ne prête pas à sourire. Ce constat encourageant  ne signe pas la fin de nos efforts en ce domaine – loin de là ! Il faudra encore tenir  ce régime pendant plus de quarante années si on veut parvenir à la complète résorption du fameux trou. Mais elle montre au moins que les dérèglements climatiques ne sont pas inéluctables, pour peu que nous prenions au sérieux les risques dont ils sont porteurs. Et, dans ce combat-là, chacun de nous est concerné. C’est encore la meilleure attitude à adopter si nous voulons garder notre Terre habitable pour les siècles à venir.

 

 

                        Jacques LUCCHESI

27/06/2014

Bruissements (38)

 

 

 

Royal : la transition énergétique est certainement l’un des plus importants dossiers gouvernementaux du moment. Personne, qu’il soit de droite ou de gauche, ne peut le négliger, car son application déterminera la qualité de notre vécu collectif au cours des prochaines décennies. Mais si les enjeux sont globaux, les solutions sont d’abord locales. Celles présentées par  Ségolène Royal, mercredi 18 juillet, pêchent manifestement par leur caractère trop timide et trop général. Certes, la ministre de l’Ecologie a rappelé le souci gouvernemental de diversifier ses sources d’énergie pour arriver, vers 2030, à une production énergétique assurée à seulement 50% par le nucléaire. Mais rien sur la fermeture des centrales vétustes, comme Fessenheim, promesses de campagne du candidat Hollande. Sur ce point, chacun se renvoie la patate chaude : le gouvernement en laisse le soin à EDF, tandis que celle-ci, par la voix de son PDG Henri Proglio, réplique que c’est à l’état d’en décider. Quant à l’écotaxe, si décriée par les Bonnets Rouges durant l’automne dernier, le gouvernement vient de la supprimer au profit d’un « péage de transit » qui ne couvrira que 4000 kilomètres d’autoroute au lieu des 15 000 initiaux. Un parcours qui épargnera la houleuse Bretagne mais qui ne rapportera que 550 millions d’euros annuels à l’état quand l’écotaxe aurait dû lui en ramener au moins 800. Un différentiel de 250 millions perdus pour financer la fameuse transition - dont le prix est estimé à un milliard d’euros annuels. Quitte à établir de nouveaux arbitrages budgétaires, il faudra bien trouver l’argent pour ça. D’autant qu’elle finira par créer de nouveaux emplois - même si d’aucuns pensent qu’elle en supprimera beaucoup avant. Est-ce une raison pour ne pas oser l’assumer jusqu’au bout ? La peur de faire de nouveaux chômeurs est devenue telle en France qu’elle menace de paralyser des innovations nécessaires et fructueuses.     

 

Santé : on attendait beaucoup de la réforme de la santé dévoilée, jeudi 19 juillet, par Marisol Touraine, tellement ce secteur reflète les inégalités criantes de notre société. Et de bonnes idées, il en a, en effet, dans son rapport : extension à tous du tiers payant, class-actions pour malades lésés, ligne téléphonique à trois chiffres pour faciliter l’accès à un médecin. Mais là comme ailleurs, l’état cherche à faire des économies (dix milliards d’euros sur trois ans). Et s’il est judicieux de chercher à éviter des doublons d’analyses ou de radiographies, il est par contre plus hasardeux de vouloir généraliser la médecine ambulatoire, car il faut souvent quelques jours de récupération après une intervention chirurgicale, même légère. Une autre idée appréciable est sans doute le projet d’appliquer  un code couleurs sur les produits alimentaires. Cela simplifierait la lecture des ingrédients (toujours très obscure) et situerait le produit sur une échelle allant du rouge (dangereux) au vert (bénéfique). Mais d’ores et déjà, les industries de l’agro-alimentaire protestent, rétorquant que l’influence, positive ou négative, d’un aliment sur la santé implique d’autres critères, dont sa fréquence de consommation. On sait peut-être que le parlement européen a déjà rejeté cette classification chromatique en 2010.  

 

Intermittents : Marseille, Montpellier et bientôt Avignon : les festivals de danse et de théâtre annulent, les uns après les autres, leurs spectacles par solidarité avec les intermittents en colère. Depuis mars dernier, les grèves se succèdent et les négociations, tant avec le patronat que l’état, ne parviennent pas à déboucher sur un système d’indemnisations satisfaisant. Le problème n’est pas nouveau ; il dure maintenant depuis 2003 et aucun gouvernement, de droite ou de gauche, n’est parvenu à un accord durable avec les représentants de cette profession souvent précaire C’est aussi un symptôme dans ce pays où l’état se désengage de plus en plus de la culture et de ses acteurs. Alors même que ce secteur est l’un des plus importants de notre économie. Et je ne parle même pas de notre réputation à l’étranger.

 

Réfugiés : parmi les nombreuses journées dédiées à une cause tout au long de l’année, il faut compter avec la journée des réfugiés. Celle-ci était célébrée le vendredi 20 juin et les chiffres qu’elle a fait apparaître sont hélas bien peu réjouissants. En 2014  il y aurait dans le monde, sous l’effet conjugué de la misère et des guerres, plus de 50 millions de personnes déplacées. 50 millions de personnes ayant dû fuir leurs pays d’origine pour tenter de survivre ailleurs, conformément à la Charte Universelle des Droits de l’Homme – qui prévoit pour chacun le droit de vivre librement où il veut. 50 millions de réfugiés, c’est plus que n’en a produit le deuxième conflit mondial. Parallèlement, le marché touristique ne cesse de s’accroître : 1087 millions de touristes en 2013, ce qui représente une progression de 5% par rapport à l’année d’avant. D’un point de vue financier, les voyages et le tourisme pèsent 7000 milliards de dollars, soit 9% de l’économie globale. Quoiqu’elle reste la première destination touristique au classement mondial, la France compte bien accroître ses parts et atteindre vers 2020  les 100 millions de touristes annuels (un peu plus de 70 millions, actuellement). Comprend-t’on mieux ainsi les urgences, les écarts et les paradoxes de l’humanité du XXIeme siècle ? Le réfugié et le touriste : les deux extrêmes d’une espèce par nature instable. On sait, avec eux, de quoi l’avenir sera fait.

 

                  Erik PANIZZA