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31/05/2018

 Erdogan : la une de la discorde

                                                  Erdogan, le Point, affiche, kiosque

 

 

Sur le portrait du président turc  s’étale, en grosses lettres, le dictateur ; suivi, en petits caractères, par cette question : jusqu’où ira-t-il ? C’est la une de l’hebdomadaire  Le point  de la semaine dernière et on peut dire qu’elle n’est pas passée inaperçue. L’affirmation prend ici l’allure d’une dénonciation : mais comment présenter autrement un homme qui, depuis deux  ans, a fait emprisonner des dizaines de milliers  de personnes – militaires, fonctionnaires, enseignants et journalistes – pour de supposés agissements séditieux ? Qui peut encore croire que la Turquie est encore, à l’heure actuelle, une démocratie ?

Et pourtant, malgré une toute petite majorité obtenue en avril 2017, lors de son référendum sur la  réforme de la constitution, Recep Tayyip Erdogan a ses partisans indéfectibles, notamment dans la diaspora turque en Europe. De véritables chiens de garde qui veillent à la réputation de leur leader au-delà des frontières turques, usant au besoin de méthodes brutales, toujours au nom de la vérité et de la liberté des peuples. Ce sont dix d’entre eux qui ont, vendredi 25 mai, exigé le retrait de l’affiche du Point dans un kiosque du Pontet – le même scénario s’est d’ailleurs produit à Valence. Sous la menace, le kiosquier a demandé à l’annonceur Jean-Claude Decaux de retirer illico l’affiche de la discorde. L’opinion publique  n’a heureusement pas tardé à réagir à cette exaction ; et l’affiche a retrouvé la vitrine qu’elle n’aurait pas dû quitter.

Car nous sommes en France et pas en Turquie. Et, dans notre pays où la liberté de la presse n’est pas tout à fait lettre morte, ces arguments musclés sont inacceptables. Du reste, ce n’est pas la première fois que le pouvoir turc, même par des voies plus diplomatiques, fait pression sur des états européens pour qu’ils s’inclinent à ses demandes répressives. En août 2017, il a ainsi fait incarcérer en Espagne  Hamza Yalcyn, un journaliste turc opposé à Erdogan. Tandis que l’année d’avant, c’est l’humoriste allemand Jan Bömhermann qui était menacé de poursuites judiciaires, pour crime d’irrévérence envers le sultan d’Ankara. Une ingérence qui ne fait, finalement, que confirmer l’assertion audacieuse du Point. Oui la Turquie, sous la férule d’Erdogan, s’est éloignée de la ligne démocratique qui pouvait justifier son adhésion à l’Union Européenne. Elle reste néanmoins notre alliée dans la lutte contre les filières djihadistes syriennes et on ne peut que souhaiter qu’elle revienne à des méthodes politiques moins arbitraires.  

 

Jacques LUCCHESI

13/05/2016

Bruissements (62)

 

 

 

Erdogan: drôle de pays que la Turquie, pourtant officiellement notre alliée dans la lutte contre Daesh ! Son président, Recep Erdogan, envisage de réformer la constitution laïque d’Atatürk pour y réintroduire l’Islam comme religion d’état. Depuis son arrivée au pouvoir, les condamnations de journalistes se multiplient et la presse libre est menacée d’étouffement. Et c’est sans même parler du chantage aux migrants que ce pays – candidat à l’entrée dans l’U E – nous fait contre d’importantes subventions. De là à limiter notre liberté d’expression pour plaire à son « sultan »…C’est ce qui semble s’être produit en Allemagne, après qu’Erdogan ait porté plainte, le mois dernier, contre Ian Böhmermann, un humoriste allemand. Motif : celui-ci l’aurait insulté, à travers un « poème » lu à une heure tardive sur une chaîne de télévision. On parle d’allusions sexuelles douteuses mais surtout de la répression que subissent les Kurdes et les Chrétiens en Turquie. Il n’y a que la vérité qui fâche, on le sait bien. Devant l’insistance des autorités turques, Angela Merkel a fait savoir qu’elle examinerait la demande d’Ankara. Ian Böhmermann sera-t-il trainé devant les tribunaux et condamné par la justice de son pays pour sa liberté de parole envers un chef d’état étranger? Ce serait une « première » en tous les cas et nous ne manquerions pas de le soutenir de ce côté-ci du Rhin.

 

Amende : il y a cependant des réactions plus rassurantes qui émanent de l’U E. Comme le projet d’infliger une amende proportionnelle aux pays membres qui refuseraient d’accueillir leur quota de migrants – et donc de soulager leurs voisins dans cette mission inscrite au cœur de la charte européenne. Ces états réfractaires, on les connaît bien à présent. Ce sont la Hongrie, la Pologne, la Slovénie et la République Tchèque. Avec eux, la défense de l’identité européenne implique des murs hauts et massifs aux frontières. Depuis, la Bulgarie s’est invitée dans le débat, tançant ces états qui veulent profiter des droits européens sans honorer leurs obligations. La Croatie et la Roumanie lui ont emboité le pas. Une ligne de fracture se dessine peu à peu au sein des anciens pays de l’Est. Difficile de s’harmoniser dans une communauté aussi vaste, entre des peuples qui ont tous une histoire singulière, qui poursuivent tous des intérêts égoïstes sous couvert d’adhésion.

 

Evacuation : En France aussi, les réfugiés continuent à soulever beaucoup d’hostilité, malgré les déclarations de principe de nos dirigeants. Comme en témoigne cette évacuation musclée, mercredi 4 mai à Paris, de ceux qui avaient trouvé refuge dans le lycée Jean Jaurès – pourtant désaffecté. 277 personnes ont ainsi été évacuées malgré les protestations d’une centaine de riverains présents sur les lieux. Elles ont été triées selon leur nationalité et leur situation administrative. On parle de les reloger – surtout les femmes et les enfants – dans un centre Emmaüs voisin. Mais ce n’est pas avec ce genre de rafle matinale que la police française va regagner la sympathie de l’opinion publique.

 

Londres : Il s’appelle Sadiq Khan et a 45 ans. C’est un fils d’un chauffeur de bus d’origine pakistanaise. Il a été élu, samedi dernier, maire de Londres - la plus grande métropole européenne - succédant ainsi à l’excentrique Boris Johnson. Il est aussi le premier musulman à accéder à une aussi haute fonction en Angleterre et en Europe. Dans son discours de réception, ce travailliste convaincu a remercié tous ceux qui l’avaient aidé dans cette victoire. Il a rappelé ses origines populaires et sa volonté d’être le maire de tous les londoniens, sans distinction de race ou de religion. Ce n’est pas en France qu’on verra de sitôt une telle promotion. Prochain rendez-vous électoral en Grande Bretagne le 23 juin, pour le référendum sur son maintien ou non dans l’Union Européenne.    

 

Jeux vidéo : bonne nouvelle pour les geeks : les jeux vidéo sont en passe d’être reconnus comme un sport en France. Lundi 2 mai, le Sénat a adopté une mesure permettant cette officialisation. C’était, depuis plusieurs années, une revendication de leurs nombreux pratiquants : rien qu’en France on estime leur nombre à 850 000 et à 4,5 millions celui de leurs spectateurs. Reste que d’appuyer sur des touches ou des manettes ne représente pas un effort physique particulier, de ceux, intenses et puissants, qui caractérisent les sports désignés comme tels. Bon, il y a bien les échecs, où le mental prime de loin sur le physique,  qui font déjà exception à la règle. Alors pourquoi pas les jeux vidéo ? Un autre problème se pose en aval : celui de la publicité et des paris en ligne qui accompagneraient ce type de compétitions. Pour l’heure, ils sont interdits mais la situation pourrait rapidement évoluer, avec les télés et les sponsors déjà en embuscade. Difficile, pour un jeu, d’échapper à l’emprise de l’argent lorsqu’il se transforme en sport.

 

                           Erik PANIZZA

17/10/2014

Ô Kobani !

 

 

Kobani est donc destinée à devenir une ville martyre. Une de plus, pourrait-on dire désabusé. Malgré les déclarations révoltées des puissants, malgré le feu nourri tombant du ciel, les combattants de l’Etat islamique encerclent, pour ne pas dire enserrent la ville. Face à eux de courageux combattants Kurdes (hommes et femmes confondus), prêts à défendre plus que leurs terres : l’aspiration à vivre enfin dans un pays démocratique. Hélas, ils sont bien seuls ! Pas question pour les Turcs d’intervenir, Erdogan refusant de susciter dans son propre pays des velléités irrédentistes kurdes... Mieux vaut laisser assassiner un peuple et s’en remettre à la real politique. Apparemment, la compassion n’est pas dans ses priorités ! Certes les Américains sont là avec leur force et la finesse diplomatique qu’on leur connaît... Sans eux, ce serait sans doute pire. Et engager des troupes serait ajouter à la confusion pour un résultat, on le sait, contre-productif (voir interventions en Irak, Lybie...). Alors, sans pour autant intervenir directement sur le terrain, peut-on au moins armer les Kurdes. Qu’attend-on ? La victoire de Daesh, en laissant s’installer un fascisme religieux intraitable, prêt à persécuter qui s’oppose à sa barbarie ? Il n’est pas loin le temps où on laissa mourir l’Espagne républicaine sans même lever le petit doigt. Je crains que Kobani ne soit le Madrid de 36, mais cette fois-là avec la honte d’avoir laissé se perpétrer cette infamie alors que nous avions encore en tête les lâchetés d’hier.

 

                                                             Yves CARCHON