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13/07/2017

    Les bonnes intentions de la sécurité routière

   

 

Parmi les changements de barème et autres taxations qui arrivent opportunément chaque été, il y a, depuis le 1er juillet, plusieurs mesures concernant la conduite routière et ses nombreuses infractions. En France, comme on le sait sans doute, la mortalité sur les routes est repartie à la hausse depuis trois années consécutives. Elle atteint les 3700 tués annuels et la volonté des pouvoirs publics de la ramener autour de 2000 décès est mise à rude épreuve. A l’alcool, traditionnelle cause d’accident au volant, s’ajoutent désormais d’autres addictions, d’autres négligences, qui sont de plus en plus dans le collimateur de l’état. D’où sa volonté de frapper un peu plus les contrevenants au porte-monnaie :    

Stop à la gourmandise et aux casse-croûtes express. Manger en conduisant sera passible désormais d’une amende de 35 euros. Fumer – cet autre pêché de bouche – sera encore plus réprimé, puisque c’est une amende de 68 euros qui  sanctionne la conduite à une main, surtout s’il y a un enfant à bord. Les amateurs de vins et de pastis ne sont pas oubliés par le législateur ; d’autant que le taux d’alcool toléré (par litre de sang)  est ramené de 0,5 gramme à 0,2 gramme. Pas plus de deux verres avant de conduire ou 135 euros d’amende.

Haro, également, sur la coquetterie : se maquiller en roulant peut coûter maintenant 35 euros.  Pensez-y, mesdames, quand vous prendrez la voiture pour aller à un rendez-vous. Quant à l’écoute musicale en voiture, dérangeante voire stressante au-delà d’un certain volume, elle sera sanctionnée à hauteur de 75 euros.

Téléphoner en conduisant, même avec un kit mains libres, vaut toujours 135 euros d’amende et un retrait de trois points sur le permis.

Mais ce sont les amateurs de jeux en ligne et les épistoliers numériques qui remportent le gros lot: consulter un écran ou rédiger un message en conduisant vaut désormais 1500 euros d’amende et trois points en moins sur le permis pour ceux et celles qui s’y adonnent un peu trop machinalement.

Tout cela, n’en déplaise aux automobilistes, va dans le bons sens. Car lorsqu’il s’agit de la sécurité physique de soi et des autres, on ne doit pas être laxiste. Et les actions susnommées affaiblissent toutes, à des degrés divers, la lucidité nécessaire à une sûre conduite. Mais la question est de savoir comment ces amendes vont pouvoir s’appliquer. Car il n’est pas facile de prendre sur le fait un conducteur délictueux. Qui peut d’ailleurs le faire, hormis les gendarmes et les policiers ? Quant au particulier lambda qui se sentirait des velléités de justicier, sa parole n’a aucun poids s’il n’est pas un agent assermenté.

J’en ai fait l’amère expérience, voici quelques années, en voulant porter plainte contre un conducteur qui m’avait ostensiblement grillé la priorité sur un passage piéton. (Le montant de l’amende est, là aussi, de 135 euros). Mais c’est parole contre parole et, dans ce système-là, vous êtes à peu près certain de n’obtenir jamais gain de cause. C’est ainsi qu’on encourage les chauffards dans leur incivisme criminel. Quand on sait, à Marseille, le nombre impressionnant d’automobilistes qui ignorent allègrement les passages protégés, on mesure la fortune que perd chaque jour la municipalité.

Car en l’absence de radars et de caméras, le flagrant-délit est quasiment improuvable. Ainsi ces amendes, nouvelles ou anciennes, ont de fortes chances de ne jamais trouver leurs destinataires et d’enrayer ainsi la désinvolture routière. C’est ce que l’on appelle communément un coup d’épée dans l’eau.

 

Jacques LUCCHESI