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18/02/2015

Le casse-tête ukraino-russe

 

Comme tous les Russes, Poutine est un jouer d’échecs. A moins qu’il n’ait un faible pour le poker, mais pas le strip-poker, car ce serait se dévoiler imprudemment... Il n’en demeure pas moins qu’il a deux cartes dans son jeu : l’une militaire et l’autre diplomatique. Angela et François ont moins d’atouts en mains. Ils veulent garder la main grâce à leur seule carte dont ils disposent : la carte diplomatique. Est-ce suffisant ? Non, proclament les Américains, convaincus que Poutine ne connaît qu’un langage : celui des armes. Donc en armant l’Ukraine, ils pensent contrer Poutine. La Chancelière et notre Président — petits télégraphistes, aurait-on dit en d’autres temps — s’accrochent à cette idée que la seule voie demeure diplomatique. Quoiqu’on attende un cessez-le-feu promis pour samedi 14 février à minuit, les combattants pro-Russes gagnent du terrain. Sur place, personne ne croit qu’on en restera là (on en a désormais la preuve, ndlr). Autrement dit, il semblerait que notre diplomatie bicéphale ait pris du plomb dans l’aile. Doit-on embraser la région pour autant ? Le doute ne peut manquer de marquer nos esprits quand on connaît combien toutes nos interventions en Irak, en Lybie, en Syrie, sans parler de l’Afghanistan, ont semé troubles, crimes, désordres et anarchie après notre passage. Que faire ? En matière de casse-tête, on pourrait s’inspirer des Chinois mais on serait mal inspirés : eux-mêmes en sont à une sévère épuration toute intérieure, ce qui se traduira bientôt par un durcissement inéluctable vers l’international... Certes un casse-tête dit bien se qu’il veut dire. Reste à savoir si les têtes qu’on casse sont bien pleines ou bien faites !

 

                          Yves CARCHON

18/12/2014

Poutine, le pétrole et l’Europe

                

 

 Un vent de panique souffle actuellement sur l’économie russe. La semaine écoulée a vu le rouble chuter de 9,5%, record historique depuis 1998. Au final, il aura perdu 60% de sa valeur normale depuis le début de l’année, représentant à peine 0,015 dollar aujourd’hui. Cette crise monétaire a provoqué une vive inquiétude dans la population. Nombreux sont les Russes qui se sont précipités dans les banques pour acheter des devises étrangères avec l’espoir de sauver un peu de leur avoir. Les capitaux des plus riches ont déserté massivement la Russie (environ 120 milliards de dollars, soit 95 milliards d’euros). Pour lutter contre ce marasme, des marques comme Ikéa veulent  relever leurs tarifs; quant à Apple, elle envisage tout simplement de suspendre  ses ventes en Russie.  De ce côté-ci de l’Europe, nombreux sont ceux qui voudraient voir dans cette crise les conséquences du blocus imposé à la Russie par l’Union Européenne depuis l’été dernier. Mais quoique l’interruption des échanges représente, pour la Russie, une perte de 32 milliards d’euros, celle-ci n’aurait pas eu d’incidence majeure si, entre temps, une autre crise n’était passée par là : l’effondrement du cours du pétrole. Car l’or noir, lui aussi, est actuellement à son plus bas niveau. Le baril s’échange aujourd’hui à seulement 55 dollars, quand il atteignait le double voici quelques mois à peine. Ce faible prix, décidé par l’OPEP, est lui aussi une réaction à l’offre excédentaire de pétrole sur le marché énergétique. Elle résulte, pour une grande part, de l’exploitation massive du gaz de schiste pratiquée par les USA et le Canada. Avec une économie qui repose principalement sur le pétrole et le gaz, la Russie ne pouvait qu’en subir le ressac : ses pertes  se monteraient présentement à 90 milliards d’euros – soit 5% de son PIB. Ainsi se profile une situation qui semble favorable à la reprise des négociations sur l’épineux dossier ukrainien. Depuis, le cours du rouble a été rehaussé et Poutine, lors de sa conférence de presse annuelle, s’est lancé dans une diatribe contre les ennemis de la Russie, accusant ouvertement l’U E d’être responsable de cette crise (qui devrait, selon lui, être résorbée d’ici deux ans). Le maitre du Kremlin peut faire croire ce qu’il veut au peuple russe ; chacun sait ici, à commencer par lui-même, que la situation actuelle n’est guère propice à une attitude durablement intransigeante. Que l’on se garde néanmoins, en Europe de l’Ouest, de crier victoire trop vite et d’adopter un ton immodeste avec lui. Le chemin du dialogue – et donc de la paix en Ukraine – exigera sans doute des compromis des deux côtés.

 

                       Bruno DA CAPO

14/08/2014

Snowden reste en Russie

 

 

 Il y a un an de ça, le monde entier apprenait l’existence d’Edward Snowden, un informaticien américain de 29 ans, consultant à la NSA, qui avait dénoncé les écoutes généralisées de la puissante agence de renseignements qui l’employait. Il y révélait, notamment, que l’Allemagne et la France, pourtant alliées des USA, étaient espionnées sans vergogne. L’affaire avait alors provoqué quelques remous diplomatiques et mis le lanceur d’alerte dans l’inconfortable situation d’un proscrit : car ce qui est moral n’est pas forcément légal et vice-versa. Commençait pour lui une errance aérienne dont on se demandait quand elle prendrait fin. Le temps d’une escale en France, le gouvernement  lui avait fait comprendre que sa présence sur notre territoire n’était pas la bienvenue. Finalement Snowden, qui espérait trouver refuge en Amérique Latine, avait obtenu – comme d’autres avant lui -  l’asile politique en Russie. Une occasion, pour Vladimir Poutine, de redorer son blason démocratique (bien terne) à peu de frais ; d’adresser aussi un pied-de-nez au sempiternel adversaire de la Russie que sont les USA. Le 7 août dernier, la Russie a donc renouvelé le visa de Snowden pour trois ans. Tant mieux pour Snowden dont la probité ne méritait sans doute pas un tel ostracisme (une grande partie de l’opinion occidentale lui est d’ailleurs favorable). Il pourra ainsi continuer à apprendre le Russe et mettre ses connaissances en informatique au profit de sa patrie adoptive. Depuis, les tensions internationales se sont encore accrues ; la guerre civile en Ukraine et le soutien logistique qu’apporte la Russie aux rebelles pro-russes n’en finissent pas d’inquiéter l’Europe. Pour pallier à l’impossibilité d’une intervention militaire, ses dirigeants, en accord avec Washington, multiplient les protestations et les menaces de sanctions économiques contre Poutine et ses proches. Peine perdue au vu des filières d’approvisionnement dont il dispose en Amérique du Sud et en Asie. Dans ce contexte qui rappelle de plus en plus celui de la guerre froide des années 60, Snowden reste plus que jamais un symbole et un enjeu. Un symbole pour tous ceux qui voient – et ils sont nombreux – dans la Russie une alternative au modèle occidental affaibli par ses dissensions : les ennemis de mes ennemis sont mes amis. Un enjeu car, si le vent venait à tourner, il y a gros à parier que l’ardent défenseur des libertés qu’est Poutine pourrait utiliser Snowden comme monnaie d’échange. Nous n’en sommes pas là et Snowden peut continuer à mener une vie discrète mais paisible en Russie. Avec, toutefois, la  certitude qu’il ne pourra plus réitérer ici son coup de force communicationnel de mai 2013. Vous avez dit liberté…

 

 

                     Bruno DA CAPO