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02/12/2016

Sida : les affiches de la discorde

 

 

Célébrée chaque 1er décembre depuis 1988, la journée mondiale de lutte contre le Sida n’a pas, cette année, fait les gros titres de la presse. Il est vrai qu’avec l’élection de Donald Trump aux USA, la victoire de François Fillon aux primaires de la Droite et l’abdication tacticienne de François Hollande (proclamée le même jour), il n’y avait plus beaucoup de place pour les causes humanitaires dans l’actualité. D’autre part, c’est un fait que le Sida n’est plus synonyme de mort rapide – tout au moins en Europe -, comme c était le cas dans les années 80. Avec l’apparition des trithérapies en 1996 puis l’amélioration progressive du traitement (réduit maintenant à un seul comprimé par jour), l’infection au VIH tend de plus en plus à devenir une maladie chronique – un peu comme le diabète ou l’hépatite C- , rendant la vie quotidienne plus difficile sans trop diminuer l’espérance de vie.  Contre-effet de ces progrès médicaux, la protection sexuelle se relâche depuis quelques années avec, pour conséquence logique, une augmentation des risques et des cas de contamination. En France, l’an dernier, on a ainsi enregistré 5925 nouveaux diagnostics de séropositivité. Parmi eux, 43% étaient « des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes », (selon la formulation légèrement tautologique de Sida Info-service). Ils sont d’ailleurs suivis de près par « les hétérosexuels nés à l’étranger » (38%). Nous ne reprendrons pas ici l’antienne bien connue sur la nécessité du préservatif entre partenaires ignorant leur sérologie, tellement elle est évidente.

Cette recrudescence épidémiologique justifie certainement de nouvelles campagnes de sensibilisation. En l’occurrence, les photos et les slogans des récentes affiches conçues par le ministère de la santé n’avaient rien de très audacieux – eu égard à ce qu’on a vu par le passé. Deux hommes tendrement rapprochés avec des mots comme « aimer, s’éclater, s’oublier » ou « coup de foudre, coup d’essai, coup d’un soir », voilà qui n’est pas de nature à choquer les enfants, leurs mamans et leurs mamies, même aux abords des écoles. Après tout, c’est le mode relationnel, tant des homos que des hétéros, depuis plusieurs décennies. Pourtant une dizaine de villes, parmi les cent trente où l’annonceur Jean-Claude Decaux les avait apposées, ont jugé qu’elles offensaient la pudeur et ont exigé leur retrait. Nul ne sera étonné d’apprendre que, pour la plupart, ces édiles courroucés appartiennent au parti Les Républicains. Pour enrayer cette épidémie de pudibonderie, la ministre de la santé Marisol Touraine a aussitôt saisi le tribunal administratif. Elle a bien fait. Mais qui peut douter du caractère circonstanciel de ces réactions d’indignation ?  Elle sont un avant-goût de l’hiver moral qui attend les Français si, par malheur, François Fillon s’installait à l’Elysée en mai prochain.

 

                         Jacques LUCCHESI

16:57 Publié dans numéro 16 | Lien permanent | Commentaires (0)

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