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15/10/2014

De l’écologie punitive

                       

 

  C’est une évidence: l’écologie passe mal en France. Contrairement à l’Allemagne qui l’a depuis longtemps intégrée à son mode de gouvernance, elle reste, pour beaucoup de nos concitoyens, synonyme de rigueur, de contrainte et de décroissance. Plus personne ici, ou presque, ne conteste le bien-fondé de ses affirmations. Mais lorsqu’il s’agit de quitter la théorie pour la pratique et de modifier un peu nos comportements, c’est, en général, la conjuration des égos contre les mesures qu’elle inspire. Dans le contexte de précarité sociale qui est le nôtre, l’économie, aussi délétère soit-elle, finit toujours par imposer ses solutions à court terme sur le temps plus long de l’écologie. Une opposition d’autant plus regrettable que l’écologie est, elle aussi, un  facteur économique important, pour peu qu’on s’engage à faire les réorientations industrielles nécessaires.    

Le fiasco de l’écotaxe abandonnée, la semaine dernière, par Ségolène Royal ne fait que confirmer cette frilosité générale. Voilà un droit de péage qui ne devait s’appliquer qu’aux poids lourds, véhicules de 3,5 tonnes et plus dont on sait  quel impact destructeur ils ont sur l’environnement. Il s’inscrivait parfaitement dans le principe du pollueur-payeur, dispositif européen qui transcende les partis et qui contribue à financer des actions dépolluantes. Or, il a suffi qu’une corporation – celle des transporteurs-routiers – montre les dents et menace le pays de grèves massives pour que le gouvernement, par la voix de sa ministre de l’écologie, fasse marche arrière et renonce ainsi à une rentrée fiscale de 600 millions d’euros annuels. Bel exemple de pusillanimité politique pour les uns, d’indifférence au monde pour les autres. Tout était pourtant prêt pour faire appliquer l’écotaxe sur nos autoroutes, à commencer par les portiques de contrôle commandés à la société Ecomouv’ dans le cadre d’un partenariat public-privé. Pour l’état, il va falloir rembourser les travaux engagés à hauteur d’un milliard d’euros. Une perspective qui ne semble guère inquiéter Ségolène Royal («On verra bien. » A-t’elle lâché à la presse). Car elle a un plan B avec la taxation supplémentaire des sociétés autoroutières (qui ne sont pas à plaindre, non plus) et du diesel, grand émetteur de particules fines dont le prix avantageux n’incite guère les conducteurs à mettre de l’essence dans leurs moteurs. Reste que ce sont les automobilistes lambda qui feront, d’une façon ou d’une autre, les frais de la débandade gouvernementale face à nos routiers sympas. Ségolène pourra tranquillement se consacrer à d’autres dossiers sensibles – comme la pollution des sacs en plastique, l’important étant, pour elle, de ne pas faire de « l’écologie punitive ». Tandis que François Hollande continuera, lui, à s’afficher sur le perron de l’Elysée avec des stars hollywoodiennes en quête d’un second souffle. De quoi faire de l’écologie un spectacle à défaut d’une cause nationale particulièrement urgente.

 

                            Bruno DA CAPO

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