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08/08/2011

L’honorable monsieur Pasqua

 

                  

 

 

 Une nouvelle fois, Charles Pasqua – 84 ans – doit répondre de corruption devant la Cour de Justice de la République  (celle qui juge les ministres). Une nouvelle fois, il va pratiquer une économie de parole proche de l’omerta et sera, sans nul doute, relaxé ou condamné à une peine symbolique à l’issue de son procès. Son âge est encore le meilleur garant d’une immunité qu’il ne possède plus officiellement mais qui reste valable dans les faits.

Celui qui fut, un temps, pain-bénit pour les humoristes (en raison de sa faconde méridionale) a pourtant un parcours bien moins souriant. La vie de Charles Pasqua a même tout ce qu’il faut pour inspirer romanciers et cinéastes. En publiant ses mémoires (« Ce que je sais », tomes 1 et 2), le sénateur des Hauts-de-Seine a pris, comme on dit, les devants, histoire de régler aussi quelques comptes avec ses « amis » haut placés. Mais il ne pourra pas empêcher que d’autres, avant et surtout après sa disparition, discutent la véracité de ses propos le concernant. Du reste, ce que l’on sait déjà n’est-il pas suffisant pour dresser le portrait de ce politicien hors-normes ? Son parcours politique est, en effet, tout ce qu’il y a de plus circonstanciel et de plus empirique. Résistant puis défenseur de la cause gaulliste au lendemain de la Libération, au besoin manu militari. Il n’y a qu’à évoquer son passage à la tête du Service d’Action Civique (SAC) ou son action contre-révolutionnaire en mai 1968. Des méthodes qu’il reprendra lorsqu’il sera, à deux reprises (1986 et 1993), Ministre de l’Intérieur. Elles produiront pas mal de « bavures » (affaires Normand, Lefèvre, Oussékine) et quelques succès, comme la libération des otages de l’Airbus détourné sur l’aéroport de Marignane en décembre 1994.

Comme si la face « diurne » de son action politique n’était pas suffisamment riche en matière à réflexion, une face « nocturne », liée aux « affaires » de la République est progressivement apparue qui a pris le dessus sur la première. Entre 2000 et 2010, elles vont replacer Charles Pasqua sous les feux de l’actualité, mais dans les chroniques judiciaires, cette fois. Reconnaissons-le : bien des politiciens français trainent derrière eux une ou deux « casseroles » de ce genre. Et plus d’un – comme Alain Carignon ou Michel Noir – ne s’en est jamais remis – politiquement parlant. Mais Pasqua, avec une dizaine de procès à son palmarès, bat là encore tous les records. Surtout, il reste imperturbable dans la tempête, offrant à ses juges une apparence de parfaite tranquillité (qui cache mal, on le sait, des colères parfois redoutables). Dernier baron du gaullisme, Charles Pasqua est également devenu la figure emblématique d’une classe politique qui ne s’est jamais embarrassé de scrupules. En sera t’il toujours ainsi dans ce monde impitoyable ? Il faut, évidemment, souhaiter que non, même si c’est, aujourd’hui encore, une sorte de vœu pieu.

 

                                              Bruno DA CAPO

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