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28/06/2016

Brexit : vers une crise européenne

           

 

Ah ! Nous nous en souviendrons de ce référendum anglais pour ou contre le maintien dans l’Union Européenne. Donc l’Europe Fédérale, après des années d’expansion, va connaître son premier morcellement, sa première sécession. Et avec quel départ ! La Grande Bretagne, la cinquième économie du monde, l’un de ses plus grands états, sa tête de pont Atlantique avec les USA.

Jusqu’au bout, comme tant d’autres en France et en Angleterre, je n’ai pas voulu croire à une telle possibilité. D’autant que ces derniers jours, après l’assassinat de Jo Cox, l’avantage allait de nouveau dans le camp du « Remain ». Aussi, lorsque j’ai appris la nouvelle, vendredi matin, j’ai éprouvé un mélange de déception et de colère. Quoi ! Son sacrifice aura finalement été vain. Quoi ! Une majorité, parmi les Anglais, avait gobé les couleuvres de Nigel Farage et Boris Johnson sur la souveraineté et l’immigration. Comment peut-on croire que le plombier polonais plombe l‘économie britannique, alors que c’est cette main-d’œuvre bon marché qui a fait, précisément, son embellie ? Comment peut-on penser que l’Angleterre soit soumise, pieds et poings liés, à Bruxelles, elle qui n’a jamais cessé, depuis son adhésion en 1973, de demander et d’obtenir des accommodements qui sont regardés comme autant de privilèges par d’autres pays européens ?

Il faut croire que ce n’était pas suffisant pour le petit peuple qui a voté majoritairement « out », remonté  - non sans raison - contre les élites technocratiques, excédé par l’opacité des lois européennes. La faute à qui ? A ceux, premièrement, qui n’ont pas pris le temps de leur expliquer clairement les avantages et les contraintes de la construction européenne. A David Cameron, ensuite, lui qui a eu l’idée de ce référendum pour conserver sa crédibilité au sein de son parti. L’Histoire jugera.

Quoiqu’il  en soit, les jeux sont faits et il va falloir désigner à Londres un nouveau chef du gouvernement, procéder aussi aux régulations administratives qui s’imposent des deux côtés de la Manche. Cela va prendre du temps et mobiliser des armées de juristes. Après quoi, les Anglais (qui continueront, forcément, à commercer avec l’Europe) vont redécouvrir les barrières et les taxes douanières, les produits plus chers à l’importation, un marché de l’automobile réduit, des prix à la hausse, un pouvoir d’achat en baisse. Ils ne bénéficieront plus des subventions européennes et ne récupèreront pas, pour leur usage propre, le montant global des impôts qu’ils versaient en contrepartie à Bruxelles, comme le leur a fait croire le perfide Nigel Farage – lequel a dû, depuis, confesser son mensonge. 

Déjà, à l’annonce du Brexit, la Livre a perdu 10% de sa valeur et elle risque fort de continuer à chuter. Et la City, si fière de son rayonnement financier, ne peut que perdre sa primauté européenne avec le repli vers le continent de ses institutions bancaires. A cela s’ajoute la perspective d’autres référendums, comme ceux que préparent l’Ecosse et l’Irlande du Nord pour leur maintien dans l’Union Européenne. Si tel est le cas – et on ne voit pas ce qui pourrait les en empêcher maintenant -, la Grande Bretagne n’aura plus rien d’une grande nation, amputée d’un tiers de son territoire actuel.

Voilà les principales conséquences de ce vote orienté par les apôtres du nationalisme et de l’intolérance. Oui, le 24 juin 2016 restera comme un jour funeste pour l’Europe. A moins que celle-ci ne profite de cette crise pour redéfinir ses propres critères de fonctionnement et d’admission. Vers plus de transparence et moins de libéralisme, comme on veut encore l’espérer.     

 

                                                                           

               Jacques LUCCHESI