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24/02/2017

           Un crime contre l’humanité ?  

 

        

 

Il y a des allégations historiques que tout homme politique, même jeune et peu expérimenté, devrait soupeser davantage avant de les exprimer publiquement. C’est sans doute le cas pour Emmanuel Macron déclarant à Alger, la semaine dernière, que « La colonisation était un crime contre l’humanité ». Certes, on mesure bien la part d’opportunisme qui entre dans cette affirmation. Les plaies engendrées par le conflit franco-algérien, voici plus d’un demi-siècle, ne se sont jamais complètement refermées et il ne s’agit pas de « caresser la bête à rebrousse-poil », eu égard au partenariat économique des deux pays. Pour autant, on devrait se garder de faire des associations un peu trop cavalières (ce qui lui a été vertement reproché). Car si la colonisation, que la France, entre pragmatisme et idéalisme, a menée tambour battant en Afrique et au Maghreb au cours du XIXeme siècle, ne s’est pas faite sans violences ni exactions, on ne peut guère la comparer aux génocides qui tombent sous le coup de cette accusation, ni même à l’esclavage d’ailleurs aboli en 1848, sous la deuxième République. On me rétorquera que la notion de crime contre l’humanité s’est élargie avec le temps. Dans ce cas, jusqu’où faudra-t’il remonter dans l’histoire de l’humanité pour exiger des comptes, tellement les guerres de conquêtes l’ont façonnée jusqu’à nos jours ?

Aussi condamnables que ces entreprises d’assujettissement d’un peuple par un autre nous paraissent aujourd’hui, elles ont été une constante tout au long des siècles. Et un pays comme la France, longtemps puissance dominante à l’échelle du monde, n’a pas échappé, au cours de son histoire, à la colonisation d’une nation étrangère. Car peut-on appeler autrement la présence anglaise en Aquitaine et en Normandie durant le dernier moyen-âge ou l’annexion de l’Alsace-Lorraine par l’Allemagne au XIX et au XXeme  siècles ? Et ne parlons même pas de l’occupation nazie pendant quatre ans. A ce stade précis de notre histoire, il n’est pas judicieux de toujours retourner le couteau dans la plaie ni de favoriser la concurrence victimaire entre communautés -  comme s’il y avait au bout une palme de la souffrance universelle à décrocher. A défaut d’une repentance généralisée, à défaut de pouvoir changer le passé, il faut au moins en prendre acte en évitant, surtout, de lui inféoder notre présent commun. Lequel a des responsabilités, qui n’ont peut-être jamais été aussi lourdes, vis-à-vis de notre futur.    

 

        Jacques LUCCHESI