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22/05/2015

Continuité

 

 

 Personne, à ce jour, n’a dû oublier les diatribes de Nicolas Sarkozy, alors président de la république, contre tous ceux qu’il désignait  comme des profiteurs, par opposition à « la France qui se lève tôt », la seule digne d’estime à ses yeux. Parmi eux, il y avait bien sûr les chômeurs de longue durée que Laurent Wauquiez, défenseur des classes moyennes, alla jusqu’à accuser de vider les caisses de l’état (« le cancer du chômage »). On sait par quelle indignation l’opposition d’alors – on était en 2011 – accueillît ses propos pour le moins outranciers. D’ailleurs, c’est en grande partie pour leur vision clivante et antisociale des Français que Sarkozy et sa clique furent évincés du pouvoir l’année d’après.

Or, que voit-on aujourd’hui, sous la présidence de celui qui posa volontiers en champion de l’antilibéralisme ? Une mesure supplémentaire de contrôle des chômeurs de longue durée qui prendra effet dès septembre prochain. Ce que Sarkozy n’a pas fait, sans doute par manque de temps, c’est son successeur socialiste qui va le réaliser sans effets tonitruants d’annonce,  selon sa manière beaucoup plus doucereuse. Cette continuité n’est pas vraiment une surprise, eu égard aux déclarations de François Rebsamen l’an dernier, mais tout de même, quelle ironie! Dans la foulée, on redécouvre que ce dispositif de surveillance renforcée était déjà expérimenté dans plusieurs régions – dont la PACA – depuis 2013. Concrètement, ce sont 200 agents supplémentaires de Pôle Emploi qui vont être employés à l’épluchage des dossiers de demandeurs d’emploi, avec pour mission de stimuler ceux qui manquent un peu trop d’ardeur à la tâche. Ils pourront ainsi leur envoyer des questionnaires et des ordres de convocation, voire demander leur radiation provisoire et la suppression de leur allocation si ces démarches n’entrainaient aucun effet. Reste que le propre du chômage de longue durée, c’est justement d’ancrer le chômeur dans le sentiment de son inutilité sociale, donc d’éteindre en lui toute volonté de retravailler. Ainsi, des gens victimes de cette lame de fond pourraient bien se retrouver en situation de coupables : n’est ce pas ce que l’on appelle un phénomène de double peine ?

Les partisans de ce contrôle accentué récusent toute idée de forcer la baisse des chiffres du chômage. Néanmoins  leur diminution arrangerait bien le locataire de l’Elysée, lui qui échoue depuis trois ans à honorer ses engagements de campagne vis-à-vis de ce problème structurel. Déjà bénéficiaire d’une reprise inespérée de l’économie française, François Hollande  pourrait les mettre au crédit de son action et peaufiner d’ores et déjà sa communication pour 2017.  Encore faudrait-il que des suicides de chômeurs désespérés, comme on en a connus en 2013, ne viennent pas d’ici là entacher son entreprise en blanchissage  politique !

 

             Bruno DA CAPO

03/07/2012

Bruissements (7)

 

                 

 

Egypte :  au terme d’une transition tumultueuse de 15 mois, les Egyptiens ont donc porté au pouvoir le candidat des Frères Musulmans, Mohamed Morsi, un ingénieur de 60 ans, au passé de militant antisioniste. Il est vrai qu’il avait, pour principal adversaire, Ahmed Chafiq, ex- premier ministre de Moubarak, ce qui ne laissait pas beaucoup de latitude aux électeurs. Une nouvelle fois, l’islamisme triomphe dans un grand pays arabe. Quid de la liberté individuelle et du respect des minorités sociales et religieuses (comme les Coptes) ? Se passera-t’il en Egypte ce qui se produit déjà en Tunisie, à savoir les menaces contre tous ceux et celles qui ne s’inscrivent pas dans une stricte obédience islamique ? On peut, hélas, le craindre malgré les déclarations consensuelles de Mohamed Morsi à l’encontre des pays occidentaux. La Charia ou l’armée (encore très puissante en Egypte) : est-ce donc la seule alternative pour les peuples du Moyen-Orient ? Est-ce ainsi que devait s’achever un printemps arabe porteur d’espoir et de démocratie ? A moins de considérer la révolution sous son angle étymologique, comme un retour à un état initial. Dans ce cas….

 

Mesures : mais revenons en France et à ces mesures annoncées qui arrivent à point nommé dans le contexte des hausses annuelles des prix en juillet. On en connaissait déjà quelques-unes – comme l’augmentation de l’allocation scolaire de rentrée. Pour le reste, pas de grandes surprises et même de petites déceptions, avec un SMIC majoré d’à peine 20  euros ou le retour de la retraite à 60 ans – et encore seulement pour ceux qui totalisent 41 annuités. Quant au projet de plafonner le livret A à 30 600 euros, il sera ramené plus modestement à  20 000 dès l’automne prochain. On sent le gouvernement socialiste passablement gêné aux entournures, obligé de composer avec le contexte économique actuel au grand dam de son aile gauche qui crie déjà à la trahison. Néanmoins, Jean-Marc Ayrault, dans son discours de politique générale à l’Assemblée Nationale, a réaffirmé les principaux engagements du candidat Hollande au cours de sa campagne présidentielle : retour à l’équilibre budgétaire en 2017, taxation à 75% des revenus annuels de plus d’un million d’euros, création de 60 000 postes de fonctionnaires sur 5 ans. Car le changement, selon lui, ne peut se faire que dans la durée et sans précipitation. Le ton était sobre mais vibrant et volontaire aussi, durant les 90 minutes de son allocution – ponctuée, c’est de bonne guerre, par le chahut des députés de l’opposition. Beaucoup d’idées et de propositions généreuses, entre patriotisme économique et refus de l’austérité, mais qui ne prendront vraiment sens qu’à l’épreuve de la réalité.

 

Continuité : Notez bien que les ministres socialistes n’entendent pas détricoter systématiquement toutes les mesures de leurs prédécesseurs de droite. Ainsi, Manuel Valls, à l’Intérieur, ne compte pas revenir sur la circulaire Guéant limitant à 30 000 le nombre des sans-papiers régularisés chaque année. Quant à Najat Vallaud-Belkacem, actuelle ministre des droits de la femme, elle compte tout simplement poursuivre l’entreprise d’éradication de la prostitution et la pénalisation des clients commencée par Roselyne Bachelot. Au-delà même de sa naïveté déconcertante vis-à-vis d’un tel phénomène social, comment ne pas dénoncer cette moralisation dirigiste de la vie sexuelle des Français, prévisible de la part d’une certaine droite, insupportable quand elle émane d’une ministre socialiste, fut-ce au nom de la dignité des femmes ? Du reste, sa critique la plus cinglante est venue d’une ex-ministre de droite, Rachida Dati, qui a simplement dit, de Najat Vallaud-Belkacem, « qu’elle ne connaissait rien à la prostitution ». Difficile, pour une fois, de lui donner tort.

 

Minitel : fin de partie pour le Minitel entré dans nos maisons au début des années 80. Ah ! Elle nous aura fait fantasmer, cette petite boite brune, sorte de super- annuaire électronique géré verticalement par France-Télécom. Pas moins de 25 000 services étaient accessibles par lui, ce qui simplifiait déjà pas mal la vie des usagers les plus branchés. Mais, rapidement, ce fut la frange « rose » du Minitel qui l’emporta sur toutes les autres. Avec la floraison des affiches coquines dans nos villes, le 36 15 devint pendant une dizaine d’années le nouveau code des libertins. L’arrivée d’Internet en France, dans les années 90, prit assez vite le pas sur ce petit bijou de la télématique française. Autant en tirer la conclusion qui s’imposait. Aussi, le 30 juin dernier, le Minitel,  désormais sous respiration artificielle, a été définitivement débranché après trente années de bons et loyaux services. La fin d’une époque mais peut-être, aussi, le début d’un de ces « mythes » chers à Roland Barthes.

 

 

 

                               Erik PANIZZA