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18/09/2012

Le Bacile de la haine

 

                               

 

 Si Sam Bacile, promoteur immobilier et réalisateur israélo-américain, souffrait d’un manque de notoriété, le voici à présent comblé au-delà de ses espérances. Son film, « L’innocence des Musulmans » n’a même pas eu besoin d’une sortie nationale en salles pour devenir le film de l’année. Un extrait de dix minutes sur You Tube  aura suffi pour provoquer le scandale. Il faut dire que son personnage central n’est pas n’importe qui : Mahomet lui-même, Prophète de l’Islam et dont la représentation est interdite par la doxa musulmane. Mais nous vivons à une époque où rien n’échappe à l’emprise de l’image ; ce n’est d’ailleurs pas la première fois que Mahomet est montré à l’écran, dans des productions occidentales. Non, le problème est bien de l’avoir dépeint sous son plus mauvais jour, d’une façon qui ne pouvait que le ridiculiser. Aucune innocence dans ce parti-pris tant éthique qu’esthétique, mais bien la volonté de lancer un pavé dans la mare avec le soutien de financiers juifs et de fondamentalistes chrétiens (comme le pasteur Terry Jones qui s’était fait connaître en brûlant publiquement un Coran, l’an dernier). Tout pour plaire, en somme.    

La réponse à ce brûlot filmique ne s’est pas fait attendre. Les Musulmans sont tellement prévisibles quand on touche aux piliers de leur religion. D’abord dans le Moyen-Orient puis dans tous les pays à dominante islamique : cela fait beaucoup de gens sur cette planète. Partout des cris de haine et des émeutes devant les ambassades américaines, partout des manifestations durement réprimées par les pouvoirs en place, avec des victimes civiles qui s’ajoutent aux quatre morts américains lors de l’attentat de Benghazi, mercredi dernier – attentat où plane l’ombre d’Al Qaida. Et le gouvernement américain de dépêcher une escadre en Méditerranée pour protéger ses ressortissants menacés. La crise diplomatique menace. Avait-on besoin de ce regain de tension dans des pays qui peinent déjà à se reconstruire ? Des pays où la guerre civile est à l’état endémique. Sûrement pas ! Dans ce cas, il faut se poser la bonne vieille question : à qui profite le crime ? L’hypothèse d’une manipulation par l’extrême-droite américaine n’est pas à exclure par ces temps de campagne présidentielle. Tout leur est bon pour tenter d’affaiblir leur adversaire naturel en la personne d’Obama. Tout leur est bon pour accroître l’idée, dans le monde, que le « choc des civilisations » est inévitable. Face à eux, il y a d’autres extrémistes, musulmans ceux-là, qui rêvent aussi de faire triompher leurs valeurs à l’échelon planétaire et qui se posent, à la moindre occasion, en gardiens de la tradition. Pour eux aussi, le « film » de Sam Bacile est une aubaine propre à accroître davantage leur influence sur des populations en quête de repères. Personnellement, j’attends le jour où les Musulmans traiteront simplement par le mépris ce genre de provocations ; ce sera le signe, non pas de leur innocence, mais de leur maturité politique. Pour l’heure, force est hélas de constater que c’est bien la démocratie, de quelque bord qu’on se tourne, qui sort blessée de tout ce tumulte. Son honneur aura été d’avoir permis la création et la diffusion de l’ignoble brûlot de monsieur Bacile.

 

 

                                       Salim Ben Bella