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16/11/2015

La spirale de l’horreur

 


Il fut un temps – pas si lointain – où les terroristes détournaient des avions et enlevaient des personnalités notoires contre rançon. Où ils plaçaient des bombes dans des sites stratégiques pour donner du poids à leurs revendications. On se prendrait presque à regretter ces méthodes, pourtant très contestables, quand on voit celles que mettent en œuvre leurs épigones, aujourd’hui. Les attentats monstrueux que Paris a vécus durant la soirée du 13 novembre sont manifestement le signe d’une rationalité opératoire devenue complètement folle. Attaquer à la mitraillette des terrasses de bar-restaurants ou une salle de concert sans la moindre distinction de personnes, se faire exploser dans un café ou aux abords du stade de France : voilà ce qu’on n’avait encore jamais vu dans notre pays. Voilà qui marque même un cran de plus dans l’horreur par rapport aux attentats de janvier dernier, politiquement plus ciblés. On est ici dans le cadre d’une vengeance généralisée exercée par l’état islamique contre la France ; non seulement pour ses bombardements en Syrie mais aussi pour son style de vie et son sens de la liberté, insupportables aux yeux de ces ténébreux fanatiques. Ils sont dans une toute autre logique existentielle que la notre, ce qui interdit – pour le moment – toute forme de négociations.

Le bilan humain, rappelons-le, est effarant, comparable à une attaque militaire en règle : 129 tués et 352 blessés dont 99 dans un état critique. En réponse à un tel carnage, François Hollande a aussitôt décrété l’état d’urgence sur tout le territoire, situation exceptionnelle dont le dernier précédent remonte à De Gaulle et à la guerre d’Algérie. D’autres mesures coercitives devraient forcément s’ensuivre, notamment vis-à-vis des foyers islamistes en France. Mais on se rend compte que, malgré des moyens de contrôle quasi illimités, les forces de police restent impuissantes à prévenir ce type de raids meurtriers. Que doit faire le citoyen lambda sinon se faire une raison et s’habituer peu à peu à vivre sous la menace de nouveaux attentats ? Comment éviter, dans ces conditions, la paranoïa et les amalgames destructeurs du lien social vis-à-vis des musulmans français ? Car nous sommes entrés dans une forme de guerre, même si sa configuration ne ressemble pas à celles que nous avons connues par le passé. Mais le pire est encore de savoir qu’une bonne partie de nos ennemis actuels sont, comme nous, des enfants de la République. Des garçons, très jeunes pour la plupart, qui ont rejeté nos valeurs au profit d’une idéologie nihiliste et obscurantiste. Et qui sont prêts à semer la mort sur la terre qui les a vus naitre jusqu’au mépris de leur propre vie.

Jacques LUCCHESI

13/02/2015

Du complot

                                          

 

Dans la fièvre médiatique qui a suivi les attentats du 7 janvier dernier, les théories  du complot sont reparties à la hausse. Qu’est-ce qu’un complot à l’ère post-moderne ? Un évènement monté de toutes pièces, voire sa simple mise en scène,  et destiné à tromper l’opinion. Mais surtout une action attribuée par d’obscurs agents de l’état à des individus jugés dangereux (quoiqu’innocents des faits reprochés), pour qu’ils en endossent la responsabilité aux yeux de l’opinion publique. En d’autres termes, on est dans une variante de la vieille théorie du bouc-émissaire, ceci à toute fin de purgation politique et sociale.

C’est un fait avéré que de plus en plus de gens doutent de la réalité. Ils mettent en cause un système informatif jugé manipulateur, qui cache bien plus que ce qu’il ne montre du monde. On sait quels discours paranoïaques avaient suivi les attentats du 11 septembre 2001, à New-York. Quoique revendiqués aussitôt par Al Qaïda, c’était, pour tous ces nouveaux sceptiques, la CIA qui était derrière. C’est à peine si certains acceptaient la disparition tangible des deux Twins Towers du paysage new-yorkais. Quant au nombre de morts causés par ces attentats, il n’a jamais cessé d’être contesté : belle forme de révisionnisme appliqué à l’histoire immédiate. Le même phénomène de dénégation s’est passé récemment en France, relayé et amplifié par un web encore plus prépondérant. Non, les terroristes français ne seraient pas les vrais responsables du massacre des journalistes de Charlie Hebdo. Les services secrets français  les auraient utilisés en sous main pour accroître l’islamophobie en France. Et qu’importe la version officielle des faits ! Qu’importe, même, les nombreux morts laissés sur le carreau! Rien ne peut faire changer d’avis celui qui s’est enfermé dans un système d’interprétation du monde qui lui convient à peu de frais. On a vu ainsi, dans des reportages télévisés, des adolescents qui déclaraient ouvertement que la vérité, désormais, étaient portée par Internet, par opposition à la télévision rangée du côté du mensonge. Cette vision simpliste mérite pourtant qu’on s’y arrête. S’il y a un peu de vrai dans cette opinion, cela tient à la connaissance des mécanismes de sélection qui caractérisent les images télévisuelles. Celles-ci sont évidemment partisanes mais pas dénuées de vérité pour autant. En revanche, il n’y a rien de tel sur Internet où les commentaires et les images, complètement libres, arrivent en cascade. C’est ce qui fait sa force et sa faiblesse à la fois, car elle oblige les internautes à redoubler de sens critique vis-à-vis de ce qui leur est donné à voir et à lire. La vraie valeur d’Internet ne réside pas dans son coefficient supplémentaire de vérité par rapport à la télévision, mais bien dans une liberté d’expression maximalisée. La véritable opposition est ici entre la liberté et la censure. Cette liberté d’expression nous a depuis longtemps séduits et nous y restons profondément attachés.  Mais nous en mesurons aussi le marasme et les dérives qu’elle induit. Et il se trouve  maintenant que, pour protéger la première, il faut de plus en plus accepter la seconde.                                                                               

                                      Bruno Da  CAPO