Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

09/04/2013

Cinéma: In another country, de Hong Sang-Soo

 


Ce film sud coréen, sous des allures de cinéma à la Rohmer, nous parle d’un autre pays, la Corée du Sud, dont on perçoit même dans le titre l’étrangeté. Car il est clair que cet « autre » pays est bien évidemment celui dont veut parler le cinéaste. Une Corée du sud en pointillé, suggérée, esquissée dont on comprend qu’il manque l’essentiel. Au spectateur d’entendre ces dialogues décalés qui nous disent plus qu’un long discours. Trois histoires dans ce film, sans lien direct, si ce n’est un même lieu et un personnage féminin ayant le même prénom mais n’étant pas la même femme, jouée par Isabelle Huppert qui est ici l’Occidentale en visite dans le pays, somme de tous les fantasmes des mâles sud-coréens... On boit beaucoup, on fume sur cette plage où l’héroïne a trouvé une chambre dans un pittoresque bungalow tenue par une jeune femme affable et souriante. La rencontre avec un maître-nageur intrigue Anne, notre héroïne, qui finira dans l’une des trois histoires par partager une nuit avec l’athlète de bord de mer. Mais on voit bien que là n’est pas l’essentiel du film. L’essentiel est palpable, sans être vraiment montré. Et c’est dans ces chassés-croisés entre comique de situation et mal de vivre antonionien qu’il s’insinue. La métaphore du maître-nageur est celle du protecteur qui peut sauver des vies, celle du metteur en scène - se sentant épié sur la plage – nous renvoie à une société éternellement surveillée... Celle du phare, enfin, que cherche notre héroïne sur la plage, que personne ne connaît, symbolisant la lumière qui éclaire les consciences. Les scènes de séduction très souvent maladroites que tentent les hommes avec Anne traduisent la forte fascination qu’exerce notre monde (et donc nos valeurs) sur ces machos tournant à vide. Hong Sang-Soo, par petites touches drolatiques, souvent risibles nous donnent à voir une humanité sans espoir, sans réel avenir et dont le seul contact avec le monde occidental reste un malentendu. Mais nous, même à travers les chemins de traverse qu’il a cru emprunter pour nous parler de son pays, nous l’avons entendu. Rohmer serait ravi d’avoir fait des émules à l’autre bout du monde !

                                          


                                                    Yves CARCHON

05/04/2013

La terreur de Pyongyang

 

                   

 

 

 Amer destin que celui d’un dictateur de seconde main. Il ne sait que trop bien qu’il ne jouera jamais les premiers violons au niveau international. Alors, il en rajoute, se tape sur la poitrine – une poitrine souvent décorée de breloques imméritées – pour tenter d’effrayer l’opinion publique. Et parfois, il va jusqu’à provoquer une guerre éclair au motif de l’honneur national bafoué, par vanité personnelle en fait. Tout cela n’en obéit pas moins à une forme de rationalité. Car en désignant violemment un ennemi externe, il vise aussi à fédérer les énergies et museler toute opposition à l’intérieur de ses frontières. Orwell le savait bien : « la guerre c’est la paix » - la paix chez soi pour préciser les choses. Cette stratégie du pire est manifestement celle adoptée par Kim-Jong-Un, grand timonier  héréditaire de la Corée du Nord. En décrétant l’état de guerre avec son voisin, la Corée du Sud, en lui interdisant l’accès au complexe industriel commun de Kaesong,  il entend montrer au monde qu’il est le digne successeur de son père, Kim-Jong-Il, lequel avait porté l’esbrouffe au niveau d’un art. Certes, il y a derrière tout ça un passé qui ne passe pas. C’est d’abord l’occupation japonaise durant le deuxième conflit mondial,  laquelle n’a jamais entrainé la moindre repentance de la part de Tokyo. C’est ensuite la guerre idéologique avec la Corée du Sud qui s’est terminée, en 1953, par un compromis frontalier bien plus que par un véritable traité de paix. Comment s’étonner, dans ces conditions, que de temps à autre, ce passif remonte à la surface ? A cela s’ajoute l’interdiction onusienne – c'est-à-dire américaine – de développer des recherches nucléaires à caractère militaire. Comme l’Iran en ce domaine, la Corée du Nord est en permanence scrutée – et parfois montrée du doigt – par ceux qui entendent bien rester les gendarmes du monde. D’où la rébellion tonitruante du fils prodigue de Pyongyang. A l’extrême, Kim-Jong-Un sait qu’il peut compter sur le soutien de la Chine capitalo-marxiste de Xi Jinping, même si celle-ci a plus d’intérêt à jouer les modérateurs que les fauteurs de guerre. Du reste, les USA prennent au sérieux les menaces nord-coréennes de frapper des bases américaines dans le Pacifique, renforçant ces jours-ci leur surveillance aérienne. Quelle que soit l’arme employée, même sur des objectifs sud-coréens, la riposte de Washington serait immédiate et Kim-Jong-Un le sait bien. Le problème est bien, à présent, qu’il en a trop dit et trop fait pour faire amende honorable sans perdre la face, tout d’abord aux yeux de son propre peuple. D’où une possible attaque, par pure fierté martiale, sur des cibles américano-coréennes. Avec les conséquences, même limitées à cette région du monde, que l’on imagine.

 

 

                             Bruno DA CAPO

02/04/2013

L’état de la France

 


Pauvre France, disait souvent ma mère qui révélait un sens bien français du fatalisme. Mais de quelle France parle-t-on ? Celle éternelle et fantasmée ou celle qui, aujourd’hui,  doit affronter la mondialisation ? Les nationalistes du FN se gargarisent à l’évidence de la première. Mais pour tous ceux qui savent que le pays aborde une ère nouvelle, peut-être est-il utile de s’en remettre aux géographes et démographes... Selon l’étude d’Hervé Le Bras et d’Emmanuel Todd, intitulée Le Mystère français, qui doit sortir prochainement en librairie, la France offre aujourd’hui un paysage sociologique doublement paradoxal. D’abord, deux profils différents de notre pays se dessinent : celui de la France qui s’en sort (Bretagne, Sud- Ouest, Alsace, Rhône-Alpes) et celui d’une France qui vacille (Bassin parisien, Nord, pourtour méditerranéen). Il s’agirait, selon nos deux éminents démographes, de deux attitudes face à la mondialisation : ainsi la dimension « doctrinaire » du catholicisme se révélerait être, une fois laïcisée, une protection contre la crise alors que dans les zones porteuses historiquement de l’égalité, autrement dit de la Révolution, cet héritage renforcerait l’isolement des faibles. Aussi pertinemment, nos deux auteurs soulignent-ils que les anciennes provinces de tradition chrétienne sont désormais à gauche alors que celles d’obédience communiste ont basculé à droite ou au FN. Est-ce à dire que les anciens clivages sont morts et qu’il faut repenser la France ? Oui et non, car on sait bien que ce qui couve n’est jamais apparent. Ainsi, la dernière presque-victoire du FN dans l’Oise peut alarmer plus d’un. A commencer par moi qui vois dans cette percée un signe avant-coureur. S’il n’était question que de l’Oise ! Dans l’Aude, à Castelnaudary, fief socialiste depuis des lustres, nous atteignons les 20 % FN ! Je voudrais bien sûr me tromper. Attendons les Municipales : elles nous diront si l’on doit être rassuré ou non.


                                                       Yves CARCHON

14:10 Publié dans 11 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fn, démographes, oise, aude