28/08/2015
Héros d’un jour…
Le scénario était encore inédit. Un train de grande ligne, bondé de voyageurs paisibles, vacanciers pour la plupart revenant vers leurs pénates, songeant sans doute à la prochaine rentrée et au retour progressif de l’automne. Le profil du candidat djihadiste est, en revanche, sans surprise : jeune, maghrébin, instable, délinquant, faisant l’objet d’une fiche « S », en recherche d’une reconnaissance personnelle, fut-ce au prix d’un carnage. On voudrait dire « hélas ». Car sa folie va encore retomber sur tous ces musulmans qui n’aspirent qu’à vivre tranquillement, dans notre pays ou ailleurs, accroissant ainsi un climat de suspicion sensible depuis janvier 2015. En ce sens, le récent incendie de la mosquée d’Auch, dans le Gers, n’augure rien de bon. Mais il faut croire que la main de Dieu n’était pas, ce vendredi 21 août, du côté de ceux qui osent perpétrer les pires atrocités en Son Nom. Un scénario nouveau là encore car, cette fois, la riposte n’est pas venue des forces de police mais de simples passagers, jeunes eux aussi, de formation militaire tout de même. En un éclair ils ont compris le drame qui se préparait et ont osé se jeter sur un agresseur lourdement armé pour le neutraliser.
Un tel courage force l’admiration. Il n’est pas, hélas, donné à tout le monde, à commencer par ces employés du rail qui, devant la menace, ont choisi d’aller s’enfermer dans un compartiment sécurisé, indifférents au sort de leurs passagers. Nous ne les accablerons pas davantage, préférant les laisser face à leur conscience. Mais c’est sans réserve que nous saluons Spencer Stone, Aleksander Skarlatos, Anthony Sadler et Chris Norman par qui le pire a été évité. Sans oublier, non plus, Mark Moogalian, le professeur franco-américain blessé par le terroriste. Héros d’un jour, héros toujours. Voilà des noms qu’il convient de ne jamais oublier, contrairement à ceux des crapules qui endeuillent périodiquement le monde. Dès lundi, soit seulement trois jours après l’attentat déjoué, François Hollande leur a décerné la Légion d’Honneur, réhabilitant du coup une distinction par trop galvaudée ces derniers temps. L’affaire, néanmoins, est loin d’être close. Reste maintenant à savoir ce que vont faire l’Etat et la SNCF pour renforcer la sécurité dans les trains. Augmenter le personnel de surveillance ? Installer à l’entrée des quais des portiques de détection des métaux (à l’instar des aérogares) ? Voire accroître les fouilles « au faciès » avec les risques d’injustice qu’on imagine ? Quoiqu’il en soit, les mesures prises seront toujours insuffisantes, eu égard à l’ampleur du trafic ferroviaire en France. Alors, dans un contexte de plus en plus incertain, il faut peut-être que nous méditions l’exemple du Thalys si nous voulons préserver dignement notre liberté de mouvement et d’action.
Bruno DA CAPO
15:34 Publié dans numéro 15 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : thalys, sncf, riposte, légion d'honneur
Les commentaires sont fermés.