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25/01/2012

Les nouveaux chiens de garde, de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat


 Leurs visages et leurs noms nous sont connus depuis longtemps. La télévision nous les a rendus presque familiers, tellement ils hantent ses plateaux, animent des émissions culturelles, sont de tous les débats politiques ou littéraires. Mais quelle est leur rôle exact dans ce grand ballet médiatique où ils changent souvent de place sans cesser d’occuper le devant de la scène? De quoi sont-ils les noms – ou les prête-noms – pour user d’une expression à la mode ? Car les propos et les opinions qu’ils véhiculent à longueur de semaines et de mois ne sont pas aussi libres qu’ils voudraient bien nous le faire croire. « Ils », ce sont nos « médiacrates », éditorialistes et journalistes starifiés, experts et pseudo prophètes de l’économie mondialisée, philosophes en mal de grandes causes à défendre, autrement dit l’élite de notre pays. Qu’ils soient étiquetés de droite ou de gauche ne change d’ailleurs pas grand-chose au problème ; car ils finissent tous par se retrouver dans les mêmes restaurants chics, les mêmes clubs sélects où nul n’a accès sans avoir été adoubé. C’est ce que nous montre, entre autres éclairages, le documentaire de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat, « Les nouveaux chiens de garde », directement inspiré par le livre éponyme de Serge Halimi. Film sans concession, caustique, partisan, dans la lignée des pamphlets cinématographiques d’un Michael Moore, outre Atlantique. En le voyant, on comprend mieux pourquoi tant de personnalités nommément citées l’aient dénigré sans tarder dans l’un ou l’autre des médias où ils ont leur tribune. Qu’importe ! Le film existe et chacun pourra se faire une opinion sur les collusions qu’il met en lumière entre le pouvoir politique, le pouvoir économique et le pouvoir intellectuel. A l’instar des clercs de l’ordre bourgeois que Paul Nizan dénonçait déjà dans ses « Chiens de garde » (1932), leurs épigones sont toujours au service secret de sa majesté le Grand Capital dont ils reçoivent leurs directives et leurs prébendes. Ce sont eux qui prêchent au peuple la bonne parole du libéralisme – destructeur de nos acquis sociaux. Car il s’agit de l’acclimater à cette évidence en douceur, sans violence autre que le matraquage des idées et des chiffres. Nous connaissions depuis longtemps les visées  manipulatrices des médias de masse. Avec « Les nouveaux chiens de garde », nous le savons mieux et ce n’est pas rien. A voir sans tarder, même si tout ce que dénonce ce film courageux  a peu de chances d’être vraiment débattu au cours de cette campagne présidentielle.

                                                 Bruno DA CAPO

23/01/2012

Atermoiements de campagne


Qui peut dire aujourd’hui qui sera au deuxième tour de l’élection présidentielle ? Personne. Sarkozy est aujourd’hui au plus bas mais pas encore candidat. Son quinquennat lui pèsera. Il a accumulé des haines, y compris et surtout dans son camp. Les déçus sont nombreux. Mélenchon, quant à lui, fait un malheur parce qu’il incarne la gauche pure et dure telle qu’on l’a connue durant les jours glorieux du PCF. Un parfum du passé qui séduira plus d’un. Il dit pourtant vouloir se rallier à Hollande...après le premier tour. La campagne de Joly ne prend pas. Il ne suffit pas de proclamer des choses justes pour être entendu. Hollande, de son côté, piétine. Il n’est pas mou : il est évanescent. On votera sans doute pour lui mais sans élan. Restent Bayrou et Marine Le Pen qui tous les deux s’en prennent à l’UMPS. Ils montent l’un et l’autre dans les intentions de vote. Ils répondent tous les deux à une lassitude : celle d’une majorité de gens qui n’ont plus foi dans les dirigeants de droite comme de gauche, qui cherchent une autre voie sans trop savoir laquelle. On peut miser que l’un des deux sera au deuxième tour car tout va se jouer serré au premier tour. Sarkozy, Hollande, Bayrou, Le Pen tourneront autour des 18-20 %. Il est à craindre que les sirènes du Front rameutent, que Mélenchon fasse du dégât dans le camp hollandais. Bayrou de même devra trancher entre la droite et la gauche s’il n’atteint pas le deuxième tour. La politique, comme on voit, est un peu comme l’amour. On se hait, se déteste, s’affronte sans être sûr qu’on n’aura pas besoin de l’autre le lendemain. D’où les chassés-croisés, les doutes et les évitements, les alliances improbables et quelquefois contre nature... Gageons que nous ne sommes pas encore au bout de nos surprises !

                                           Yves CARCHON

19/01/2012

Le show de Mélenchon

                     


 Pluralisme électoral oblige, David Pujadas avait invité jeudi 12 janvier, dans son émission « Des paroles et des actes », le bulldozer de la gauche française, Jean-Luc Mélenchon. Un invité d’autant plus difficile à gérer que l’on connaît depuis longtemps ses différends avec les journalistes. Ce que Pujadas, lutin facétieux, ne manqua pas de lui rappeler d’entrée de jeu avec quelques extraits d’émission triés sur le volet. Qu’importe ! Il en eût fallu bien plus pour décontenancer le patron du Front de gauche venu, pour la circonstance, avec son staff de campagne –  dont, au premier rang, Marie-Georges Buffet et Clémentine Autain. Il était d’ailleurs particulièrement en forme ce soir-là et les différentes personnalités, journalistes sou grand patron, qui l’affrontèrent en direct en prirent toutes pour leur grade. Car sur un plateau de télévision, Mélenchon c’est tout un spectacle.  Qu’il gronde, commente, conteste, provoque ou plaisante, il a l’art de monopoliser la parole et, au final, d’avoir toujours raison. En cela il est le digne héritier de Georges Marchais, à ceci près qu’il est bien plus agile – intellectuellement -  que ne l’était l’ancien premier secrétaire du PC.  Comme Marchais en son temps, Mélenchon a quelque chose d’inactuel, quelque chose qui détonne dans ce landernau politique trop policé, trop technocrate. En lui passe le souffle des grands orateurs et, finalement, on verrait bien sa trogne dans une galerie de portraits d’anciens révolutionnaires, disons entre Danton et Robespierre. Peut-être est-ce pour cela – plus encore que pour ses propositions anticapitalistes - que Mélenchon fait peur à beaucoup. On sent trop en lui l’homme de passion et, malgré ses efforts pour se tempérer, on ne peut que se demander ce que serait son rapport au pouvoir si, par un caprice de Marianne, il accédait à la présidence de la France. Et pourtant, reconnaissons-le, quel adversaire idéal il ferait face à Sarkozy au second tour ! On imagine aisément la tournure musclée que prendrait, avec eux, le traditionnel débat de l’entre-deux tours. Un adversaire autrement plus coriace que François Hollande- même si celui-ci se prépare certainement à cette épreuve. Oui, Mélenchon est, présentement, le candidat le plus authentique, le plus représentatif de la gauche française. Il a une énergie et une clarté programmatique que n’a pas – encore – Hollande. Mais il n’a pas ce qu’Hollande a : un grand parti derrière lui et un important capital de sympathie.

                                                 Bruno DA CAPO