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26/12/2011

Bruissements 2

 

                           

 

 

 

 

 

Prothèses : derrière chaque scandale sanitaire, il y a toujours la recherche du profit. On veut produire vite, au prix le plus bas, pour réaliser un maximum de bénéfices. Ainsi, la qualité des produits proposés passe à la trappe et, avec elle, la santé des consommateurs. L’affaire des prothèses mammaires PIP (produites par la société française Poly Implant Prothèse)  n’échappe pas à ce révoltant constat. Depuis, son fondateur, Jean-Claude Mas – un ancien charcutier ! – est sous le coup d’un mandat d’arrêt international, mais le mal est fait. Le pire est sans doute que, même après sa liquidation judiciaire en mars 2010, Poly Implant Prothèse  a continué à commercialiser des prothèses mammaires avec des gels de silicone douteux mais bon marché dans le monde entier. On estime à 300 000 le nombre de femmes qui en porteraient aujourd’hui. Si le Venezuela et le Brésil les ont aussitôt retirés du marché à la première alerte, cela n’a pas été le cas dans 65 autres pays, dont la France. Résultat : une marseillaise de 53 ans est morte récemment d’un lymphome et 7 autres femmes ont développé des cancers du sein et des amygdales directement imputables à ces médiocres prothèses qui se rompaient à la moindre occasion, déversant leur contenu fatal dans l’organisme des porteuses. Devant l’ampleur de cette affaire (qui ne fait peut-être que commencer) l’Etat a décrété la gratuité des opérations de retrait d’implants pour 30 000 Françaises concernées. Mais il n’est pas question, du moins pour le moment, qu’il finance les poses de nouvelles prothèses (sauf pour des cas médicaux avérés). C’est peu mais c’est, malgré tout, mieux qu’en Angleterre où le gouvernement cherche à minimiser le problème, au grand dam des femmes implantées. 250 d’entre elles ont ainsi décidé de saisir la justice contre les cliniques et les chirurgiens qui les leur ont posées. Il faut quand même savoir qu’en France, 500 000 femmes portent des prothèses mammaires, dont 80% pour des raisons purement esthétiques. On peut, au moins, souhaiter que cette dramatique affaire décourage les nouvelles candidates à  quelques centimètres supplémentaires de volume mammaire. Vanitas vanitatis…   

 

 

 

Génocide : depuis sa parution en 1990, la loi Gayssot (qui pénalise le racisme et l’antisémitisme) n’en finit pas de produire de la concurrence victimaire et de faire aussi des émules. La dernière législatrice en date s’appelle Valérie Boyer, députée UMP des Bouches du Rhône, laquelle a provoqué un beau tollé en obtenant l’édiction de sanctions judiciaires pour quiconque nierait publiquement le génocide arménien de 1915 (reconnu par la France depuis 2001). On peut se demander pourquoi l’Etat français est devenu si frileux sur cette page historique à laquelle il n’a pas directement participé (contrairement au génocide juif sous l’Occupation). Pourquoi le politique cherche toujours à s’immiscer dans l’Histoire, au risque d’entraver la liberté et le travail plus nuancé des chercheurs. En l’occurrence, la réponse semble n’être qu’un mesquin calcul électoral - la communauté franco-arménienne représentant un demi-million de personnes – où l’UMP a damé le pion au PS. Depuis, la Turquie a rappelé son ambassadeur et gelé une bonne partie de ses contrats avec notre pays (14 milliards d’euros). Quid des centaines d’entreprises françaises qui travaillent sur le territoire de cet éternel postulant à l’Europe ? Vous avez dit crise économique…     

 

 

 

Amende : que, dans le domaine des mœurs, le pendant de la rigueur budgétaire soit le puritanisme, qui pourrait en douter après la récente résolution d’un projet de loi pénalisant les clients de prostitué(e)s ? Celle-ci a été récemment proposée à l’Assemblée  Nationale par deux députés, Guy Geoffroy (UMP) et Danielle Bousquet (PS), révélant ainsi, sur ce troublant sujet, une convergence de vues non moins troublante. Faut-il dire qu’elle a, bien sûr, obtenu le soutien chaleureux de l’ineffable Roselyne Bachelot, ministre de la Solidarité en exercice ? Si cette loi passait – ce qui est encore loin d’être fait -, un client de prostitué(e)) pris sur le fait encourait une amende de 3750 euros et 2 ans d’emprisonnement. Outre que ces sanctions sont manifestement disproportionnées par rapport au « délit » susmentionné, elles sont également injustes car elles ne frapperaient que les plus pauvres clients, ceux qui ne peuvent que s’adresser à des prostitué(e)s de rue, à 40 ou 50 euros la passe. En revanche,  les « friqués »  qui peuvent recourir discrètement par Internet aux services  - autrement plus élevés - d’une escort-girl, ceux-là ne risquent guère d’être inquiétés par une telle loi. Il n’est pas inintéressant de noter que le montant proposé de l’amende contre les clients est le même que celui – effectif – pour racolage passif qui s’applique aux « pierreuses » depuis 2003. A l’époque l’initiateur de cette loi humaniste n’était autre que le ministre de l’Intérieur – un certain Nicolas Sarkozy – ;  et l’on voit, dans les deux cas, la constance à sanctionner les plus modestes, d’un côté comme de l’autre. Car la position abolitionniste de la France, vis-à-vis de ce phénomène particulièrement opiniâtre et mutant qu’est la prostitution, est on ne peut plus hypocrite et dépréciative pour celles et ceux qui ont fait un jour le choix de vivre de leurs charmes. Elle s’acharne à nier leur intime liberté et à leur refuser des droits sociaux dont ils devraient logiquement bénéficier, comme tous les autres travailleurs. Et si, au lieu de regarder du côté de la Suède, nos législateurs se tournaient encore une fois vers l’Allemagne ?    

 

 

 

Faute : notez bien que si certains hommes paient pour faire l’amour, d’autres paient pour ne pas faire assez l’amour - à leur épouse, pour préciser les choses. C’est qui est arrivé à un Niçois de 51 ans condamné, par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, à verser 10 000 euros à son ex-femme au motif qu’il ne l’avait pas assez « honorée » durant leurs 21 années de  mariage. Si le manque de désir pour son conjoint est certainement un bon motif de divorce, on a du mal à le considérer comme une faute : du reste, l’incompatibilité d’humeur, qui caractérise cette affaire, est sensée ne pas être une faute sous l’angle de la loi. Mais le juge, dans sa grande sagesse, a statué autrement. Aurait-il condamné l’épouse au même dédommagement si c’était le mari qui s’était plaint de son faible appétit sexuel ? Dans le contexte actuel, rien n’est moins sûr. J’imagine déjà les associations féministes qui se seraient élevées contre une justice machiste. Et de crier au viol conjugal. Alors que là, juste un sourire de compassion…    

 

 

 

 

 

                              Erik PANIZZA

18:08 Publié dans Numéro 8 | Lien permanent | Commentaires (0)

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