22/03/2006
Le one-man-show de Fabrice Burgaud
Il s’est présenté, gêné et compassé, devant les caméras, pour rendre à son tour des comptes à la commission d’enquêtes parlementaires . Une audition publique devant des millions de télespectateurs : on n’avait encore jamais vu ça en France. Le visage pâle et crispé, les cheveux courts, le verbe hésitant : Fabrice Burgaud, 34 ans, n’était pas, aux dires de certains, dans son meilleur jour. Et si, tout au contraire, il avait réalisé une grande performance de comédien ? Si son masque pathétique n’était que l’envers savamment peaufiné de son vrai visage de juge instructeur dans ce scandaleux procés d’Outreau ? Nous savons bien que dans une situation où l’enjeu personnel est élevé, mieux vaut faire profil bas car l’assurance pourrait vite apparaître comme de l’arrogance. C’est évidemment différent dans une situation de pouvoir : et il en a eu du pouvoir, ce jeune juge dont les décisions ont brisé les vies de 14 innocents ! Nous aurions préféré le voir et l’entendre avant tout ce remue-ménage, dans son cabinet, comme l’ont vu et entendu ses victimes. Selon David Brunet, l’un des acquittés ( après 743 jours de prison), « il était cassant et ne doutait jamais ». Cela est certainement beaucoup plus conforme à sa vraie nature . La preuve qu’il n’a pas changé intérieurement, c’est sans doute que, malgré sa prétendue compassion, il n’a eu aucun mot d’excuse pour ceux qu’il a injustement envoyés en prison, qu’il a même estimé avoir fait honnêtement son travail. Alors on peut bien mettre son attitude sur le compte de sa jeunesse ; on peut critiquer l’institution judiciaire qui ne l’a pas assez accompagné au moment de l’instruction ; on peut, comme le procureur Gerard Lesigne ( auditionné après lui), reconnaître que le « mythe de la pédophilie » trouble un peu trop les esprits actuellement ; il n’en reste pas moins que Fabrice Burgaud a failli à ses fonctions, qu’il est sinon coupable , du moins responsable d’une catastrophe humaine et sociale et qu’à ce titre-là, il mérite d’être révoqué. Dans ce cas, nous lui suggérons de se recycler ( à l’instar de Bernard Tapie ) dans le théâtre et la télévision. Car il est à peu prés certain que ses dons de comédien pourraient lui valoir rapidement un César.
Bruno DA CAPO
14:35 Publié dans Numéro 2 | Lien permanent | Commentaires (0)
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