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11/07/2018

                   Carton rouge

                            

 

 

Il est journaliste culturel dans un quotidien picard. Ecrivain,aussi – ce qui nous fait à priori deux points communs. Par élégance, je ne citerai pas son nom ici. Mais il se reconnaîtra sans peine s’il lit ces lignes.

Tout avait pourtant bien commencé. En 2015, il avait commis un petit article sur « Coupure d’électricité », un poème de MCDem que j’avais édité au Port d‘Attache : mais peut-être n’était-ce qu’un geste de solidarité régionaliste ? Quoiqu’il en soit je l’en avais chaleureusement remercié. Au printemps dernier, avec la parution de mon essai « Le désir d ‘être un autre », je crus bon reprendre contact avec lui. Chaque auteur sait cela : il est important, pour la promotion d’un livre, d’avoir des relais dans la presse, même si ça ne garantit en rien son succès.

Je lui en fais donc une petite présentation par mail. Et lui précise que s’il veut en donner une recension dans ses pages, je peux lui en faire parvenir un exemplaire en service de presse. Il accepte, même laconiquement, et l’ouvrage est envoyé à l’adresse de son journal à Amiens.

Deux mois se passent sans la moindre nouvelle. En juin, je l’avise par mail et lui demande simplement s’il a bien reçu mon livre. La question n’est pas superflue quand on sait combien de courriers sont égarés par la Poste. Trois semaines se passent encore avant qu’il ne se fende d’une réponse d’amnésique : « mais qui êtes vous ? »

Surpris- car je ne lui ai jamais caché mon identité -, je lui rappelle brièvement l’objet de notre correspondance. Mais tout d’abord, a-t’il bien reçu mon livre ? Il me répond qu’il en reçoit des dizaines et s’amuse même à faire de l’esprit  (« Est-ce vous que j’avais croisé à un cocktail de l’Académie Française ? ») quand j’attends simplement un « oui » ou un « non ». Forcément, devant tant de désinvolture, la tension monte d’un cran et je lui demande en retour s’il lit les livres qu’on lui adresse. Sans me départir, pour préciser les choses, d’une élémentaire politesse. Et voilà ce qu’il me répond en retour :

« Je n'aime pas du tout le ton des vos messages. Mais pas du tout. Pour qui vous prenez-vous? J'ai enfin retrouvé qui vous étiez? J'ai écrit sur l'un de vos auteurs, c'est exact. Vous m'avez proposez, dites-vous, de m'envoyer votre livre. C'est votre droit. Ca ne vous donne pas le droit de l'interpeller de cette manière, espèce de petit prétentieux. 

Je n'ai pas de temps à perdre avec des bouffis de l'égo de votre espèce. A un message aussi con, on répond généralement merde. Ce que je fais. De plus, sachez que le postulant à l'Académie française vous emmerde. Il va sans dire que je bloque tous vos contacts afin de ne plus jamais entendre parler de vous. Et j'espère sincèrement à ne jamais croiser votre route. En d'autre lieux, on m'a appris autre chose que les mots. A bon entendeur. »

 Ce mail, j’ai tenu à le reproduire ici in extenso – fautes d’orthographes comprises -, car il me semble être un sommet d’arrogance et de vulgarité. Si, de nous deux, il y en a un qui est un « bouffi de l’égo », ce n’est sûrement pas moi. Où est le minimum de rationalité et d’intelligence qu’on peut attendre d’un soi-disant intellectuel dans ces lignes ? Quiconque ayant un peu de respect pour ses semblables se serait excusé du retard accumulé : c’est ce que moi, à sa place, j’aurais fait. Pas lui qui se répand en insultes gratuites, qui va même en filigrane à me menacer physiquement (s’il savait comme ça me fait rire). Belle manière de se discréditer. Ainsi il ne fait pas seulement la preuve de sa bassesse d’âme mais aussi de son manque total de curiosité pour le travail d’autrui. Un comble quand on est censé écrire sur les livres ! En d’autres temps, Léopardi disait que la plupart des gens sont inférieurs aux fonctions qu’ils occupent. Ce constat, fait vers 1830, est plus que jamais pertinent pour notre époque. Et, comme on le voit, aucune profession n’est épargnée.  

 

Jacques LUCCHESI